Flore Benguigui prend la parole. Il y a un mois, elle annonçait son départ de l’Impératrice. Le 23 novembre, l’artiste témoignait dans une vidéo de Médiapart, racontant des « humiliations », un « contrôle » et un « très fort sentiment d’isolement » qui allaient jusqu’à lui faire perdre la voix.
“Beaucoup d’entre vous n’en savaient pas assez pour pouvoir lire entre les lignes à cette époque». Ce sont les mots qui nous sont adressés Flore Benguigui dans une story Instagram, relayant son témoignage vidéo de vingt minutes publié le Mediapart. Une vidéo dans laquelle l’ancienne voix de l’Impératrice, qui a également écrit et composé de nombreuses pièces, raconte neuf années de « sexisme ordinaire » et « d’humiliation » a répété au sein du groupe.
Critique, dévaluation et « Love Bombing »
Son témoignage revient d’abord sur critiques de sa voix par les membres du groupe, jugés trop faibles pour vivre. ” On m’a toujours dit que j’étais un mauvais chanteur, que je chantais faux, pas assez fort», rapporte Flore Benguigui. Elle a finalement accepté de se faire doubler avec des pistes vocales enregistrées et de prendre des cours de chant pour tenter de modifier sa voix, de « fausser», selon ses mots. Le chanteur et compositeur parle ensuite d’un dévaluation progressive. D’une part, signes d’affection soudains et intenses : elle parle de «cadeaux» proposés par deux des membres du groupe, suivis de humiliations et crisede ces mêmes membres, parfois en public. Elle décrit ici un système de manipulation qui porte un nom : le «Bombardement d’amour».
“J’ai fini par penser que je méritais d’être traité comme ça, d’être rabaissé”
Pour Flore Benguigui, « J’ai fini par penser que je méritais d’être traité comme ça, d’être rabaissé. ». Elle décrit vivre alors dans le peur constantele “le sentiment d’être constamment licencié.” C’est cette peur qui la pousse à faire “Toutes les choses que personne ne veut faire” : gérer les réseaux sociaux, le merch… elle ira jusqu’à laver et repasser les tenues de scène de tous les membres du groupe. La mécanique s’emballe et en 2021, Flore Benguigui raconte avoir perdu la voix, cassée lors d’une séance en studio. “Je pourrais m’échauffer, parler” elle s’en souvient, mais quand elle doit chanter une chanson du groupe, cordes vocales tendues. Le blocage durera un an et demi. La tournée continue, le volume des pistes vocales est augmenté pour compenser, et Flore se convainc que la lecture s’arrêtera lorsque sa voix reviendra comme par magie lors d’un concert. Elle affirme « J’avais peur que le public découvre que j’étais un gigantesque imposteur. »
Une industrie musicale insensible et axée sur le profit
En parlant de MédiapartFlore Benguigui n’accuse pas seulement deux des membres de son ancien groupe : elle pointe également un industrie de la musique sous la forme d’un distributeur automatique de billets. Les tournées sont réservées avant même la composition de l’album qui y sera joué, et le la priorité est donnée à l’argent avant le santé mentale et physique les artistes qui le génèrent. Malgré l’apparent malaise de Flore, elle assure que personne, pas même elle-même, ne pense à sa pause.
Les garçons du groupe « surpris » et « triste »
Le groupe, qui a rapidement remplacé la chanteuse après l’annonce de son départa répondu par un communiqué de presse, disant «surpris” et “triste», assure Flore Benguigui «cela signifie encore beaucoup pour nous et nous savons ce que le groupe lui doit, artistiquement et personnellement..» Les musiciens tranche néanmoins en affirmant que «les situations décrites par Flore ne correspondent pas à la réalité des faits.» Et de conclure : «Si l’investissement et l’attention que nous lui avons apportés n’ont pas suffi, nous ne pouvons que le regretter. En tout cas, nous lui souhaitons le meilleur pour la suite..»
Le groupe précise, entre autres, que «il n’y a jamais eu de contrôle sur ses discours“, et ça ” Concernant l’enregistrement de l’album, le lancement de la tournée et la promotion, Flore nous a réaffirmé à chacune de ces étapes son envie de continuer« . Concernant les pistes vocales, le communiqué précise que « le traitement live du chant est depuis le premier concert en 2015 une décision artistique validée collectivement, qui n’a jamais remis en cause ses qualités de chanteuse, compositrice, interprète ni sa place dans le groupe« .
Symboliquement, l’artiste a récemment reposté sur son réseaux les paroles du titre éponyme du dernier album de l’Impératrice, « Pulsar« . Un titre qu’elle a elle-même proposé au groupe.
Pulsar est l’étoile morte qui brille encore. La voix de Flore Benguigui porte : le soutien abonde. Elle ajoute : « Je sachez que cela m’expose à beaucoup de violence, et pourrait avoir un impact sur la bataille juridique dans laquelle je me trouve pour avoir le droit à mes paroles».