Réformé pour honorer son leader décédé en février 2023, le groupe de rock alternatif s’est produit dans sa salle parisienne fétiche, l’Élysée Montmartre. Réunions, pogos et lambada.
À propos d’Éric Delhaye
Publié le 23 novembre 2024 à 10h53
Mis à jour le 23 novembre 2024 à 11h04
«P.notre François, hip hip hip, hourra ! Hip hip hip, hourra ! Hip hip hip, hourra ! » Paris, vendredi 22 novembre. L’Élysée Montmartre crie une dernière fois pour saluer François Hadji-Lazaro dont le visage globulaire occupe le grand écran. Décédé le 25 février 2023, ce pilier du rock alternatif, pétri de musette et de punk, a notamment dirigé trois groupes mémorables : Pigalle (1982-1998 et 2007-2022) dont il fut le chanteur, Los Carayos (1985-1990) avec Manu Chao, et les Butcher Boys (1986-1997) avec lesquels il pratique pléthore d’instruments, dont le accordéon. Les Boys Butchers ont ressuscité, au vu d’une soirée aussi généreuse que leur défunt chef, moins commémorée que joyeusement célébrée avec un public dans son jus, de nombreuses retrouvailles et pogos comme avant.
La genèse du concert se déroule au cimetière du Père-Lachaise, quelques jours après le décès de François Hadji-Lazaro. Sur les marches du crématorium, parmi parents et amis dominés par vignerons et restaurateurs, Stefff Gotovski, le saxophoniste des Garçons Bouchers, rencontre une vieille connaissance du groupe : Edgard Garcia, directeur de Zebrock, une association qui œuvre à l’émergence des talents. et l’éducation publique. Qui a une idée : organiser une soirée hommage, en septembre de la même année, sur la scène Zebrock de la Fête de l’Humanité. Les Butchers’ Boys historiques sont réunis et l’émotion saisit les participants, vingt-six ans après leur séparation, à tel point que le chanteur Pierrot Sapu, longtemps disparu des radars, en redemande : “Et si on partait en tournée ?” »
Il y a une tournée. Baptisé « Tchao François », il s’étend sur une soixantaine de dates entre 2024 et 2025, dont bien sûr l’Élysée-Montmartre, salle préférée des Garçons Bouchers, où Stefff Gotovski a également organisé 350 « bals » de 1995 à 2010 avec des survivants du rock alternatif. . Le répertoire est principalement tiré des deux premiers albums du groupe (1987 et 1988), les plus subversifs : “François écrivait des choses qui étaient intemporelles à l’époque, donc on en profite pour le rapporter, d’autant qu’on considère que la scène musicale s’est aseptisée”dit Gotovsky. Au fond de la scène, sont projetées des images d’archives et un François Hadji-Lazaro modélisé en 3D façon dessin animé par l’un de ses deux fils, Pierre. Directeur artistique spécialisé dans le rap, il indique que la famille a été associée à la reformation du groupe : « Mon père est resté plus proche des musiciens des Garçons Bouchers que de ceux de Pigalle. Sa mort les rapproche, même si Stefff et Pierrot ne se sont pas vus depuis des années. C’est bien de l’avoir fait. Et on préfère que le concert ne force pas l’hommage, pour ne pas gâcher l’ambiance. »
Une ambiance d’outre-tombe tout de même, la voix de François Hadji-Lazaro ouvrant le concert devant un millier de spectateurs dont le crâne est désormais plus souvent chauve que peigné. Sur scène aussi, les têtes ont changé. Barbe blanche, tête tatouée, vie abîmée, bénévole depuis vingt ans au Secours catholique, Pierrot Sapu tracte la troupe composée de Stefff Gotovski en t-shirt « Sexe, bœuf & rock’n’roll », Gaël Mesny (guitare), Benoît Simon (basse), Christophe Gauziède (batterie) et Toto Rossi (trompette), tous anciens membres des Garçons Bouchers et/ou Pigalle. Auxquels s’ajoutent des invités surprises au fil des titres : Sanseverino sur Le éboueur et Jacotte Hadji-Lazaro (veuve de François) sur ParfoisRoberto Basarte et Yan Darçon, de l’ancien Mano Negra (Antoine Chao, Daniel Jamet, Pierre « Kropol » Gauthé), Docteur Destroy… Cela ne rajeunit-il personne ? Pas si sûr. Les chansons se succèdent, soulignant la perspicacité intacte des textes de François Hadji-Lazaro (Guerre, Noir et blanc, Des personnes âgées à la poubelle), et la sauce prend au fur et à mesure que les joints se desserrent. Au point que sur les hymnes (Le rap des Garçons Bouchers, Ratatam farci en peluche, Beaujolais, Lambada, nous n’aimons pas ça, Bière), les pogos sont enflammés et le plongées par étapes se succèdent, même de la part d’anciens combattants qui risquent de se casser le dos.
Visiblement impliqué et heureux, comme ses camarades que l’on entend avoir travaillé à leur retour, Pierrot Sapu rappelle que François Hadji-Lazaro a créé le label Boucherie Productions (les premières Mano Negra, Roadrunners, Happy Drivers, Les Tétines Noirs, etc.) puis il tons Zorro de BB Doc et le shall Longue vie à la vie par le docteur Destroy. « Longue vie à la vie »insiste-t-il avant que le concert ne se termine sur le tube de Pigalle, Dans la salle du bar tabac de la rue des Martyrs. Rue voisine, par laquelle sont partis les spectateurs, moins nostalgiques que dynamisés.
En tournée : novembre. le 23 novembre à Wasquehal. le 29 novembre à Bordeaux. 30 à Nantes, le 30 décembre. Le 6 décembre à Miramont-de-Guyenne, le 7 décembre à Perpignan, le 12 décembre à Villeurbanne, le 13 décembre à Audincourt, le 14 décembre à Nilvange…