« Nous devons continuer à envoyer des journalistes sur les terrains de conflit »

« Nous devons continuer à envoyer des journalistes sur les terrains de conflit »
« Nous devons continuer à envoyer des journalistes sur les terrains de conflit »

Afghanistan, Rwanda, Liban, Tchétchénie… Marine Jacquemin a couvert tous les conflits de 1985 aux années 2010.

L’ancien grand reporter de TF1 retrace son parcours dans son livre « Mes Guerres ».

Dans le podcast Expertes à la une, présenté par Christelle Chiroux, elle raconte des anecdotes sur son travail et explique comment la fortune lui a souri.

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Avec eux

Pape François, Mère Teresa, présidents français, ministres talibans… Marine Jacquemin a rencontré de nombreux personnages différents. Depuis près de trente ans, le grand reporter voyage à travers le monde et notamment dans les zones de conflits pour TF1. Afghanistan, Irak, Rwanda, Liban, Tchétchénie… Il a vu mourir sous ses yeux collègues et amis, une pauvreté endémique et même des enfants déchirants. Elle raconte l’histoire dans le podcast « Expertes à la Une » de Christelle Chiroux, à écouter ci-dessus : «Je suis né heureux et j’espère mourir heureux. Je sais ce que sont les tragédies. Il ne faut jamais montrer ses émotions sur le terrain, sourire aux gens qui meurent et les accompagner.”

Marine Jacquemin n’a pas peur de mourir. Devant les jeunes soldats armés, il ne le montre pas. « J’ai toujours pensé qu’ils me regardaient comme une sœur, une mère ou une grand-mère. Ils me voyaient comme une femme et non comme quelqu’un qui pouvait les attaquer.” Il confie une autre crainte, plus intense, à François Mitterrand : « J’avais peur d’être kidnappée et violée. La mort est inévitable. Mais ce qui me fait peur, c’est de me retrouver dans une situation difficile et de ne pas pouvoir m’en sortir. »

Le petit truc de Marine Jacquemin : trouver la petite histoire dans la grande histoire. « Ce petit morceau d’histoire, c’est par exemple le zoo de Kaboul. Mon traducteur m’emmène et me fait rencontrer le directeur du zoo. Il me fait visiter : je vois un lion aveugle qui a pris une fusée en plein visage, un ours anorexique, des singes très agressifs parce qu’ils ont peur, un éléphant touché lui aussi par une fusée… Ce zoo est la métaphore de la ville. dont j’ouvre le journal à 20h00. Nous avons reçu plus de 20 000 euros pour reconstruire le zoo.

La chance de survivre et de rencontrer des gens

Être reporter de guerre, c’est avoir de la chance. Pour rester en vie, avant tout, mais aussi pour rencontrer des gens. Tout au long de son livre, Marine Jacquemin raconte à quel point elle lui souriait. En Sicile, par exemple, un concours de circonstances lui a permis de rencontrer le juge Falcone : « J’arrive au tribunal de Palerme. Il y a plusieurs points de contrôle, mais j’ai oublié mes documents. Je dis que je suis journaliste et que je veux interviewer Giovanni Falcone. Tout le monde rit. Un garçon m’emmène prendre un café et m’emmène quelques minutes avec lui. Le lendemain, le garçon qui m’a emmené au palais avoue être le chauffeur du juge et m’explique que la nuit précédente, Giovanni Falcone avait rêvé qu’une blonde. Je voulais me rencontrer à la Chapelle Sixtine.

Un jour, dans un orphelinat de Kaboul, un garçon demande à Marine de partager son repas : «C’était des haricots avec un morceau de tomate et de la viande. J’ai fondu de joie et je me suis dit que j’allais l’adopter. Plus tard, alors qu’il allait ramasser des mines, il sauta sur l’une d’elles. Je me suis demandé ce que je pouvais faire pour ce garçon. Quelques mois plus tard, la journaliste émut Murielle Robin : « Une petite fille est en train de mourir après avoir ingéré de la sciure de brique. Murielle Robin m’appelle et me demande ce qu’elle peut faire. Je vous le dis, un hôpital en Afghanistan. Martin Bouygues nous a aidé avec un chèque avec un zéro. » Le journaliste a alors collaboré avec l’association La Chaîne de l’Espoir et la Fondation Aga Khan pour gérer l’hôpital sur place.

« Il faut se poser la question »

Faut-il arrêter de couvrir les guerres ? Marine Jacquemin répond négativement : « Je me demande souvent à quoi servait mon reportage. Les mêmes guerres continuent. Entre Israël et la Palestine, par exemple, cela dure depuis 76 ans.» Il lance cependant ce message avec émotion : « Il faut continuer à envoyer des journalistes dans les zones de conflit, même si parfois des jeunes y restent. C’est très important, et ce n’est pas l’intelligence artificielle qui nous aidera à regarder la réalité et à ramener la démocratie.»

Comment avancer ? La journaliste se demande chaque jour ce qu’elle peut faire pour rendre le monde meilleur : « Il faut se remettre en question, se fixer des objectifs et ne pas s’emballer. C’est ce que j’ai voulu transmettre dans mon livre.”

  • « Mes guerres, confidences d’un grand reporter » disponible aux Éditions de l’Observatoire

Geoffroy LOPES

 
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