D. Turcotte & fils | Liberté 60

Dans son autobiographie drôle, touchante et sans détour, Dany Turcotte revient non seulement sur ses déboires avec Tout le monde en parle. Cela nous donne aussi une belle leçon de vie.


Publié à 02h38

Mis à jour à 6h00

Un thème majeur traverse la biographie de Dany Turcotte : celui de la résilience. D’une enfance « dans les eaux de la vie » à Jonquière, avec un père alcoolique et bipolaire, aux propos homophobes et haineux reçus depuis plus d’une décennie, en marge de sa collaboration à Tout le monde en parle, traversant le deuil de proches décédés trop tôt, l’homme a vécu son lot de traumatismes.

Pourtant, l’humour a toujours été sa bouée de sauvetage, reconnaît l’ancien Fou du Roi, rencontré mardi dernier dans un café de Griffintown. À peine 48 heures après son apparition controversée dans l’émission animée par Guy A. Lepage. « À mon avis, le rire est le seul moyen de survivre à l’absurdité de la vie. Nous devons minimiser les défis. Sinon, vous vous effondrez. »

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PHOTO ROBERT MAILLOUX, LA PRESSE ARCHIVES

Dany Turcotte and Dominique Lévesque on stage, during the Groupe Sanguin era

Le rire, c’est aussi une manière de rebondir : “J’ai tellement pleuré quand mon amie Dominique est décédée à 62 ans [Lévesque]continue-t-il. À un moment donné, j’ai commencé à plaisanter avec ses proches. Lorsque nous avons reçu le coffret de ses cendres du Honduras, nous l’avons pesé ! La première chose que Dominique aurait voulu savoir, c’était combien pèse un humain… une fois brûlé. » La réponse : 5 livres.

Souffrir en silence

À presque 60 ans, Dany Turcotte dit entamer le troisième chapitre de sa vie professionnelle avec la publication de son premier livre : D. Turcotte & fils. Un livre plein d’anecdotes savoureuses – rien que le récit du tournage « extraordinaire » d’un épisode de La petite séduction avec Ginette Reno vaut son prix. Mais l’animateur fait aussi des aveux déchirants : les problèmes de santé mentale de son père ; l’accident qui a quitté son premier amour, André, tétraplégique, homme d’exception avec qui il a vécu 18 ans. Avant que ce dernier ne décède d’un cancer dévastateur, deux jours après la disparition de Dominique Lévesque.

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PHOTO ROBERT SKINNER, LA PRESSE

Dany Turcotte, au bord du canal Lachine à Griffintown, le quartier où il habite à Montréal

Ce qu’il raconte dans sa biographie nous fait aussi penser à l’histoire de plusieurs hommes au Québec. Ces types sensibles qui souffrent en silence, incapables de montrer leur vulnérabilité. « Il y a plein d’hommes qui parlent peu, qui ont du mal à exprimer leurs émotions. Mon père était comme ça ; son père aussi. »

Les hommes transmettent leur malheur d’une génération à l’autre. Souvent, ce sont leurs femmes qui les sortent de leur apathie et les obligent à consulter et à demander de l’aide. C’est une camisole de force ancrée dans notre cerveau comme des fossiles.

Dany Turcotte

Écrire est un plaisir solitaire

Dany Turcotte le répète à tout le monde : ce livre était « extrêmement thérapeutique, libérateur ». Le déclic est venu après la lecture de la biographie de Stéphane Rousseau. « Nous avons le même âge, nous faisons le même métier et nous avons (un peu) le même parcours. J’aime jouer avec les mots et je voulais moi-même écrire sur ma vie. En plus, la solitude de l’écriture me fait du bien, après plusieurs années sous le feu des projecteurs. 20 ans de tournées avec le Groupe Sanguin, puis Lévesque & Turcotte. Puis, avec La petite séductionJ’étais comme en campagne électorale et dans une foule constante pendant 12 ans. »

Nous abordons le chapitre de son départ houleux de Tout le monde en parle. Une étape douloureuse dans la cinquantaine. Depuis son passage à l’émission dimanche dernier, certains lui reprochent, dont notre chroniqueur Hugo Dumas, de régler ses comptes avec son ancienne équipe, avec ce « noyau dur » qui ressemble davantage à un triumvirat : Guy A. Lepage, André Ducharme et le producteur. Guillaume Lspérance.

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PHOTO MARTIN TREMBLAY, LA PRESSE ARCHIVES

Sur le plateau de Tout le monde en parle avec Guy A. Lepage, en 2007

Pourquoi revenir là-dessus, trois ans après votre départ ? Et pourquoi ne pas en parler alors ? « Produire une émission hebdomadaire, c’est comme un train en marche. Il faut que ça marche ! il illustre. Vous êtes constamment en action. Vous ne pouvez pas avoir une crise existentielle. Je n’ai pas osé exprimer ce que je ressentais… Même si j’ai évoqué mon mal-être avec la nouvelle formule. Quand la pandémie est arrivée, j’étais déjà fragilisée par les tempêtes sur les réseaux sociaux. Je n’étais pas équipé pour faire face aux changements. C’est bien de répéter que j’aurais dû leur parler, mais on ne m’a pas souvent demandé comment j’allais… »

La question qui tue…

Et pourquoi ne pas les avoir mis à jour avant la sortie du livre ? « Quand je suis allé dîner chez Guy il y a quelques semaines, je lui ai dit : mon livre sort bientôt. Si ça vous plaît, vous m’invitez, sinon, vous ne m’invitez pas. Je lui ai également mentionné le passage en question, sans en expliquer le contenu. J’ai été surpris par leur surprise, mais en même temps, je comprends. Et dans ce passage, on ressent aussi tout l’amour que j’avais (et j’ai encore) pour ce spectacle et son équipe. »

Selon Turcotte, la réaction du public cette semaine est excessive.

Cela me fait réaliser que cette pression ne me manque pas. C’est comme si je retombais dans mon ancien traumatisme. Chaque minute, je reçois un nouveau message sur mon téléphone. Et ça part dans tous les sens.

Dany Turcotte

Est-ce la fin de son amitié avec Guy A. Lepage, dont le fils est son filleul ? “Je ne pense pas. Bien sûr, je vais lui laisser le temps de digérer mon livre. Mais j’assume l’entière responsabilité de ce que j’ai écrit. Je me sentais exactement comme ça. Je me sens libéré. »

L’auteur termine actuellement les dernières pages d’un deuxième livre, un roman cette fois, qui sortira en 2025. Il ne ferme pas la porte à la télévision, mais il ne veut plus subir la « grosse pression » d’un projet qui le met sur une « sellette ». « Je vais faire des choses qui m’intéressent sans le stress de réagir face à un million de personnes qui scrutent chaque mot qui sort de votre bouche, chaque expression de votre visage. »

Il dit qu’il ne blâme personne. «Je n’ai pas de rancune. C’est de l’énergie complètement inutile, du ressentiment, de la bile… ma mère appelle ça roter un vieux concombre ». » (rires)

Enfin, Dany Turcotte estime que « la clôture démontre les mots choisis pour exprimer [sa] la détresse explique en grande partie [sa] peur de les verbaliser quand [il était] stationné à TLMEP ».

« Et j’ai trouvé mon dévouement aux salons du livre : En espérant que vous l’aimerez plus que Guy A. » » !

L’humour, pour mieux rebondir. Encore et encore.

En librairie

D. Turcotte & fils

D. Turcotte & fils

Dany Turcotte

Editions La Presse

340pages

 
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