Lorrenzo Manzin recharge ses batteries sur son île et repart au combat

Lorrenzo Manzin recharge ses batteries sur son île et repart au combat
Lorrenzo Manzin recharge ses batteries sur son île et repart au combat

Il y a 12 mois, le Réunionnais Lorrenzo Manzin était opéré de l’artère iliaque. Une intervention classique chez les cyclistes professionnels qui parcourent plus de 30 000 km par an. Après 6 semaines d’arrêt total, 10 semaines de récupération progressive, une préparation physique et mentale retrouvée, le cycliste réunionnais pro depuis 10 ans a repris le combat avec une saison 2024 bien remplie. Nous avons profité de son passage chez lui à Bras-Panon pour les vacances pour l’interroger sur son nouveau rôle au sein de l’équipe Total Énergie, sa formation, ses rêves et ses peurs aussi, et ses expressions préférées du monde du cyclisme. … (Photo rb/www.imazpress.com)

Il ne reste aujourd’hui que deux Réunionnais à afficher le statut de cycliste professionnel : Donavan Grondin et Lorrenzo Manzin.

A seulement 30 ans, et avec quatre Tours d’Espagne à son actif, Lorrenzo Manzin est un vétéran des pelotons professionnels avec 10 ans d’expérience : il a signé son premier contrat avec la prestigieuse équipe FDJ en 2015, poursuivi chez Vital Concept en 2017. , avant de rejoindre Total Energie en 2020.

Il vient de re-signer pour deux ans supplémentaires jusqu’en 2026. Et est devenu père pour la première fois il y a 4 mois ! Pas étonnant de le retrouver serein et souriant, malgré notre rendez-vous tardif au Bassin La Paix, non loin de sa destination des vacances annuelles à la Réunion, à Bras-Panon.

15 jours sans sport, avant de reprendre une grande préparation aux sports d’hiver : les courses reprendront en effet mi-janvier 2025. Son approche trahit cependant les courbatures d’une randonnée sportive entre Bélouve et le Cap Anglais deux jours plus tôt.

On ne serait pas surpris de le voir aligné sur un sentier dans quelques années, au moment de la reconversion. Pour l’instant, Lorrenzo Manzin va vite sur son vélo. De plus en plus vite. Mais il prend le temps de revenir sur c2024, l’année de tous les dangers. Entretien

– Imaz Press : quel est votre état d’esprit après cette année charnière 2024 ?

– Lorrenzo Manzin : Cela s’est mieux passé que prévu. Après l’opération chirurgicale que j’ai subie en novembre 2023, les 6 semaines d’arrêt total (une première pour moi depuis l’âge de 6 ans), j’y suis allée progressivement, patiemment pendant les 10 semaines de convalescence.

Nous avons fait une préparation physique originale au Rwanda pendant 3 semaines. J’ai fait tout ce que j’ai pu pour être prêt à reprendre en mars… et finalement, je fais une saison complète : mon premier Paris-Roubaix, le Grand Prix du Morbihan, le Grand Prix de Wallonie, le Championnat des Flandres…

Nous avons terminé en octobre avec le Tour du Lac Taihu en Chine où l’équipe a remporté une étape. J’ai retrouvé un bon niveau, j’ai contribué à de bons résultats, avec un nouveau rôle au sein de l’équipe, celui de « poisson sprinter-pilote ».

Presse Imaz : En quoi consiste concrètement ce rôle ?

–LM : Mon rôle est de diriger, de lancer mon sprinter sur les dernières centaines de mètres avant le sprint final. J’ai un rôle de passeur. Idéalement, le départ se situe à 400 m de la ligne d’arrivée. Je dois placer mon sprinter dans une bonne position… après 150 km de courses, échappées maîtrisées puis rattrapées, montées et descentes.

C’est un travail très spécifique et… super dangereux. Quand ça « frotte » à plus de 60 km/h, ça peut faire peur ! Le rôle de « lanceur » s’affine avec Mark Cavendish au début des années 2010. Il forme un duo d’enfer avec Mark Renshaw. Ce métier est spécifique dans le sens où je ne cours pas pour gagner, mais pour aider mon leader à gagner. Cela ne vous empêche pas de profiter des opportunités lors d’une course ! Ce n’est pas une frustration pour moi. Cela peut être pour mes proches, ma famille, mais pas pour moi. Je suis satisfait quand Jason (Tesson) ou Emilien (Jeannière) gagnent.

Presse Imaz : Pouvez-vous nous parler du sprint de vos rêves, le plus significatif, celui dont vous vous souvenez le plus en détail ?

–LM : Mon meilleur souvenir est ma deuxième place sur la dernière étape de La Vuelta (le Tour d’Espagne) en 2017. On est à Madrid, on termine sur l’équivalent des Champs Élysées, au sprint, je termine une ligne derrière Matteo Trentin. Cela aurait été historique…

Presse Imaz : En , le cyclisme est généralement associé au Tour de France, n’êtes-vous pas déçu de ne pas y avoir encore participé ?

–LM : J’ai eu plusieurs phases avec le Tour de France. J’en ai d’abord rêvé. Puis la phase de désillusion. Puis j’ai arrêté d’y penser. Et là, ça redevient un objectif ! Même si les places coûtent cher : nous sommes 27 dans l’équipe Total Energie, il n’y a que 8 places sur un TDF et un noyau défini. On verra donc les choix du manager en avril-mai de l’année prochaine, en fonction des résultats, de l’état de forme de chacun, du profil des étapes…

Presse Imaz : Quelle est une semaine type d’entraînement pour Lorrenzo Manzin ?

–LM : 2h de repos le lundi (si on a fait une course le dimanche), repos le mardi, 4h de vélo + gym le mercredi, 5h le jeudi, on se détend un peu en fin de semaine si on a une course pendant le week-end. Entre entraînements et courses, je roule environ 2 700 km par mois, soit plus de 30 000 km par an !

– Imaz Press : Après 10 ans d’expérience en tant que coureur professionnel, qu’est-ce qui vous surprend encore aujourd’hui ?

–LM : Depuis la crise du COVID en 2020, l’intensité des courses a vraiment augmenté, il y a plus d’agressivité entre coureurs, les moyennes baissent les unes après les autres. Il n’y a plus de temps morts sur les courses par étapes, plus de courses de préparation au calendrier. Les cours de préparation sont également plus exigeants, la matière continue d’évoluer. Je vois mes propres données progresser. En fait, cela élève tout le monde. J’ai refait la piste récemment, j’ai dû changer 3 fois de plateaux pour trouver le bon rapport de puissance (ndlr : Lorrenzo a ajouté des dents à chaque fois)

– IP : Que représente pour vous la Réunion ? Un bon plan pour la retraite ? Des vacances annuelles ? Nostalgie?

–LM : C’est d’abord un retour aux sources. Parce que je suis parti jeune (à 15 ans) en métropole pour me former au centre Espoirs de La Roche sur Yon. Ensuite, c’est mon oxygène pour me déconnecter et refaire le plein d’énergie avant de partir dans le froid et la pluie. Avant, je revenais deux fois par an à la Réunion. Mais je suis devenu papa d’un garçon (Matéo) il y a 4 mois, ça a changé beaucoup de choses : ça m’a enlevé beaucoup de pression, m’a donné une raison supplémentaire de me battre dans le peloton. Et ça me permet aussi de relativiser quand je rentre d’une course déçu !

– IP : Enfin, quelles expressions du langage très fleuri du cycliste utilisez-vous souvent ?

–LM : Celui qui me convient le plus, c’est « J’ai pété dans une bosse » (ndlr : « J’ai explosé dans une colline »), ça m’est arrivé souvent ! Lorsque vous rentrez d’une séance d’entraînement où vous vous êtes senti très fort, vous pouvez dire : « Je marchais ». Mais la consigne que j’entendais le plus souvent dans les rangs du Vélo Club de l’Est (VCE) était « fé pèt la kol ! ». En d’autres termes, « poussez si fort que la colle des tuyaux fondra ».

xl/www.imazpress.com/ [email protected]

 
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