Le week-end dernier à Pontevedra (Espagne), l’équipe de France a ramené trois médailles de métaux différents du Championnat d’Europe de Cyclo-cross : l’or en Espoirs Féminin avec Célia Gery, l’argent au relais mixte et le bronze en Espoirs Hommes via Aubin Sparfel. François Trarieux, le sélectionneur national, revient à DirectVélo sur ce rendez-vous continental et évoque l’hiver à venir avec en tête le Championnat du Monde de Liévin.
DirectVelo : Quel bilan faites-vous de ce Championnat d’Europe ?
François Trarieux : Je suis très content, notamment concernant les Élites et les Espoirs. Chez les Juniors, il y a deux ou trois choses à analyser et des ajustements à faire pour la préparation finale. Mais je ne suis pas inquiet, je suis plutôt confiant pour la suite, ils vont monter la pression et je suis convaincu qu’ils joueront devant. La priorité, c’est la Coupe du Monde où il y aura plus d’attentes. Nous avons coché de belles cases, c’est un résultat qui correspond à peu près à ce que j’avais imaginé sachant qu’il y avait peu de compétition auparavant avec l’ensemble du continent puisqu’il n’y avait pas eu de manche de Coupe du Monde.
« ELLE A TOURNÉ LA PAGE »
Vous attendiez-vous à ce que Célia Gery remporte le titre dès sa première année Espoir ?
Les conditions étaient particulières avec un circuit très fluide. Elle a su jouer de ses qualités et d’une bonne pointe de vitesse. Elle a attendu le dernier tour et surtout le dernier demi-tour car j’avais demandé à l’équipe de courir. Je comptais sur le fait que cela se jouerait en finale. Elle était intelligente. Marie Schreiber a tenté de faire péter Célia sur le plat mais dans les parties techniques, Célia était plus forte. Elle était étrangère, elle n’avait rien à perdre. Son statut va changer mais on ne va pas non plus mettre la charrue avant les boeufs. A Anvers à la fin du mois, elle découvrira la Coupe du Monde avec les Elites, la transition n’est pas toujours facile. En tout cas, elle a découvert la catégorie U23 et elle continuera à y rester. Ma vision est que la victoire engendre la victoire et la confiance.
C’est une belle revanche pour elle après une Coupe du monde route compliquée où elle s’est sortie de deux chutes…
Elle a pris beaucoup sur elle pour pouvoir résister à ce qu’elle a eu en arrivant affaiblie à la Coupe du Monde avec une préparation finale compliquée. Cela l’aidera à tourner la page. Je tiens à remercier Maryline Salvetat (le médecin FFC, NDLR) qui a fait des rencontres importantes avec des spécialistes dont l’expertise est reconnue et qui suit Célia depuis son départ des Cadettes, au même titre que de nombreux athlètes du collectif. Certains pensent qu’on prend les coureurs et qu’on ne sait pas ce qu’on fait, alors qu’il y a un vrai suivi. Nous ne sommes pas là pour faire « un coup »nous sommes également là pour accompagner les athlètes tout au long de leur carrière. Je demande des avis, je n’ai pas les connaissances. J’échange beaucoup avec différentes personnes dont mes prédécesseurs Jean-Yves Plaisance et Pierre-Yves Chatelon. Jean-Yves a une belle phrase affichée au service des courses à Montry : « Il vaut mieux ne rien faire et ne rien dire plutôt que ne rien dire et ne rien faire ». Célia n’est pas celle qui parle le plus, mais sur le vélo, elle est efficace. La preuve dans ce Championnat d’Europe.
«DAVID EST UN EXEMPLE POUR LES JEUNES»
Aubin Sparfel est également Espoir 1 et monte sur le podium !
Il a eu un certain succès (avec le problème mécanique de David Haverdings à la fin du dernier tour, NDLR)mais quand on regarde le palmarès, il n’y a que trois Espoirs 1 qui ont terminé sur le podium du Championnat d’Europe : Mathieu Van der Poel, Eli Iserbyt et Niels Albert. Bien entendu, il faut se méfier des comparaisons douteuses. De plus, il manquait Tibor Del Grosso et Léo Bisiaux, mais cela dit quand même quelque chose et cela confirme ce qu’on avait vu l’année dernière avec Jules Simon. Comme Célia, Aubin, Johan (Blanc) et la plupart des coureurs du collectif, c’est l’exemple type que nous consultons auprès de l’équipe de France sur route ainsi qu’avec leurs structures respectives qui jouent le jeu à part entière. consacrer de grandes ressources à la performance. On travaille ensemble, on anticipe les pauses et les périodes de repos, on n’accumule pas les défis. Quand Aubin se préparait pour la Coupe du monde à Zurich, il faisait déjà du cyclo-cross chez lui.
Chez les Elites, Amandine Fouquenet termine 5ème et David Menut 6ème, c’est leur meilleure performance internationale respective !
Amandine a bénéficié d’un circuit très fluide mais elle a déjà obtenu des Top 10 lorsqu’il y avait de la boue. Elle a été en difficulté par moment, sa confiance en sera renforcée. Je n’ai pas oublié Hélène qui a réalisé une très bonne course après un très bon début de saison. Même si elle a pris la route cette année, il lui manquait ce bagage pour finir encore mieux. Quant à David, c’est la grosse performance du week-end, seul Clément Venturini a fait mieux en 2016 à Pontchâteau (4ème) C’est le résultat de ce qu’il a su mettre en place avec AS Bike et je tiens à les féliciter pour le soutien tout comme avec leurs Espoirs qui ont répondu avec Nathan (Bommenel) dans le Top 5. David est un exemple pour les jeunes, il fait toute la saison et c’est une récompense pour son investissement dans la discipline. A 32 ans, il vit la meilleure période de sa carrière. Alors qu’il figurait dans le Top 10 mondial en Juniors et Espoirs, il fait partie des coureurs restreints pendant des années en France et des 90% qui ont arrêté le cyclo-cross à la fin des Espoirs parce que les équipes pros ne l’ont pas fait. croire au cyclo-cross. Quand votre DS vous fait comprendre qu’il vaudrait mieux arrêter le cyclo-cross et privilégier la route, cela n’aide pas vos performances. Il décide de mettre fin à sa carrière sur route et se met en danger. Il est reparti de zéro en 2018. En quelques années à parcourir le circuit de la Coupe du monde, il est revenu à son meilleur niveau. S’il avait eu la même chance qu’Aubin et Léo chez Decathlon AG2R La Mondiale ou Amandine et Rémi (Lelandais) chez Arkéa-B&B Hôtels, peut-être aurait-il eu une autre carrière chez les Élites. J’espère que nous ne répéterons pas les mêmes erreurs car nous avons une génération talentueuse. C’est important d’avoir des Elites qui tirent les jeunes, ça les nourrit. Les jeunes ne croyaient pas qu’il allait finir entre van der Haar et Vanthourenhout. Il y a une certaine forme de cohésion, ils étaient tout autour de David et des Elites pour les encourager.
« PERMETTRE À UN PLUS GRAND NOMBRE DE PERSONNES DE PARTICIPER »
Qu’est-ce qui change cette saison à l’approche des manches de Coupe du monde dont le début est fixé au 24 novembre à Anvers ?
Clément Venturini, Joshua Dubau et Léo Bisiaux ne reprennent que mi-novembre pour pouvoir être frais pour l’ouverture de la Coupe du monde et avec l’objectif de la Coupe du monde en ligne de mire. Pour les autres, ceux qui étaient au Championnat d’Europe, ils couperont une semaine après Pierric. Il est important de marquer des points en Coupe du Monde car les deux premières lignes de la Coupe du Monde seront déterminées par le classement général de la Coupe du Monde. Les mois de décembre et janvier seront très chargés. Il faut vraiment ralentir en novembre. Il y a une véritable planification et nous espérons qu’elle portera ses fruits.
Comment imaginez-vous cette prochaine Coupe du monde en France à Liévin ?
L’idée est déjà de permettre au plus grand nombre de participer. J’ai interrogé plusieurs coureurs professionnels qui étaient à Nommay mais c’est encore un peu prématuré sachant que c’est leur DS qui choisit son calendrier. Cela fait plusieurs saisons qu’on parle de cette Coupe du Monde. L’année dernière, on a déjà eu l’opportunité d’avoir le Championnat d’Europe, ça reste quelque chose. Chaque année, nous organisons une manche de Coupe du monde, nous sommes habitués aux grands événements. Une Coupe du monde booste tout le monde. Tout le monde veut y être et rêve de devenir champion du monde à domicile. Vous êtes soutenu par un public engagé dans votre cause. J’espère que derrière lui, il emportera le cyclo-cross français, la jeune génération, et qu’il ne s’arrêtera pas à Liévin. J’espère que ce sera une belle fête et que nous serons là.