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le suspect arrêté était sous OQTF, quelle est cette mesure (souvent critiquée) ?

Par

Raphaël Lardeur

Publié le

25 septembre 2024 à 19h46
; mis à jour le 25 septembre 2024 à 19h49

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Après la tristesse, maintenant la colère. Mardi 24 septembre 2024, un homme a été arrêté en Suisse. Il est désigné comme le suspect du meurtre de Philippine, cette étudiante de 19 ans, dont le corps a été retrouvé enterré samedi 21 septembre 2024, dans le bois de Boulogne, à Paris.

Et c’est le profil de l’homme qui interroge. Il s’agit d’un Marocain de 22 ans, déjà condamné pour viol, libéré grâce à des aménagements de peine. Il était également soumis à une obligation de quitter le territoire français (OQTF). Mais quelle est cette mesure administrative française ? est-ce appliqué en France ?

OQTF, définition

Tout est dans le titre : obligation de quitter le territoire français (OQTF).

En droit, il s’agit d’une mesure administrative, édictée par la préfecture. Son objectif est donc : expulser une personne du territoire françaisexplique sur son site La Cimade (Comité Inter-mouvements pour les Evacués), association de solidarité et de soutien politique aux migrants, réfugiés, demandeurs d’asile et étrangers en situation irrégulière.

La mesure est émise en cas de refus ou de retrait d’un droit de rester ou de séjour irrégulier en France. Cette décision s’accompagne donc d’une précision concernant le pays de destination et le nombre de jours accordés pour un départ volontaire.

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Comment s’applique l’OQTF?

Il y a deux cas de figure, note le site service-public.fr.

  • Soit, la personne est tenue d’accomplir immédiatement la mesure et aucun délai de départ volontaire ne lui sont accordés. Les autorités l’expulsent du territoire.
  • Le plus généralement, la personne concernée a une date limite 30 jours pour quitter le territoire français par leurs propres moyens.

Si les personnes se trouvent toujours en France, une fois ce délai passé, elles sont placées en centre de rétention administrative (CRA) ou assignées à résidence. Le préfet notifie également une interdiction de retour en France (IRTF). Et, c’est à « l’administration française d’organiser le départ », note le site du gouvernement.

Il est toutefois possible pour ces personnes de faire appel au tribunal administratif et ainsi d’obtenir annuler l’OQTF. Ce recours a également pour effet de suspendre l’exécution de l’OQTF jusqu’à ce que le juge ait rendu sa décision.

Pourquoi cela n’a-t-il pas été appliqué au suspect ?

Dans le cas du meurtre de Philippine, le suspect avait été envoyé dans un CRA après avoir purgé sa peine pour viol. Deux jours avant sa libération, le 18 juin 2024, indique BFM TV, Le suspect avait été placé sous OQTF.

Bien qu’il n’ait pas déposé de recours contre cette mesure administrative, il n’a pas été expulsé. La demande de laissez-passer (sorte de passeport délivré aux nationaux afin de pouvoir les expulser) nécessaire à son expulsion vers le Maroc a été délivrée le même jour, mais pas par le bon service français.

Le 24 juin 2024, les autorités marocaines s’en plaignent. Et ce n’est que le 18 juillet 2024, soit un mois après la demande initiale, que la demande de laissez-passer consulaire est émise. Une sorte de couac administratif.

Finalement, le 3 septembre, le suspect avait été remis en liberté par un juge des libertés et de la détention, avec obligation de pointage. Toujours sous le coup d’une OQTF, il n’avait pas atteint la durée maximale de détention en CRA (90 jours en France).

Le 6 septembre, le Maroc a finalement envoyé le laissez-passer. Trop tard, le suspect a disparu dans la nature, après avoir passé 74 jours au CRA.

Où est expulsée la personne faisant l’objet d’une OQTF ?

La personne qui fait l’objet d’une OQTF est (en théorie) renvoyée par l’administration française dans son pays d’origine. Au Maroc, dans le cas du suspect du meurtre de Philippine.

Sauf si sa vie ou sa liberté sont menacées, s’il est exposé à la torture, à des peines ou traitements inhumains, indique l’article L511-1 à L511-5 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.

Autres destinations prévues par la loi : le dernier pays qui a délivré un document de voyage à la personne ou un pays dans lequel elle peut être légalement admise.

Combien d’OQTF sont appliquées en France ?

En France, selon les derniers chiffres disponibles sur ce sujet, 134 280 obligations de quitter le territoire français ont été prononcé en 2022, selon la Cour des comptes. Il était de 124 111 en 2021, 107 488 en 2020 et 122 839 en 2019, selon le ministère de l’Intérieur.

Depuis la crise sanitaire du Covid-19, le taux d’exécution des OQTF est inférieur à 10 %. En 2022, ce taux était 6,9% selon le rapport annuel du Contrôleur général des lieux de privation de liberté. Contre 6% en 2021 et 12,2% en 2019.

Conclusion : très peu d’OQTF sont effectivement appliquées. Quant aux centres de rétention administrative (CRA), utilisés dans l’attente d’expulsions effectives, ils ne comptent que 1.869 places sur l’ensemble du territoire français, précise le ministère de l’Intérieur. L’objectif affiché par Beauvau est d’en avoir 3.000 d’ici 2027.

A peine nommé par Michel Barnier, le nouveau ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, a promis « augmenter significativement le taux d’exécution des OQTF ».

Il veut également rétablir le délit de séjour irrégulier en France, que François Hollande avait supprimé. Une mesure de durcissement également régulièrement réclamée par l’extrême droite.

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