« Les gardiens m’ont regardée d’un air moqueur », raconte l’avocate sommée d’enlever son soutien-gorge pour voir la détenue

« Les gardiens m’ont regardée d’un air moqueur », raconte l’avocate sommée d’enlever son soutien-gorge pour voir la détenue
« Les gardiens m’ont regardée d’un air moqueur », raconte l’avocate sommée d’enlever son soutien-gorge pour voir la détenue

l’essentiel
Me Stella Bisseuil raconte en détail l’épisode au cours duquel elle a été forcée de retirer son soutien-gorge à armatures métalliques afin de parler avec un client en détention.

Cet été-là, comme une grande partie du monde, la vit sous cloche. En particulier dans les prisons. Les surveillants sont en alerte permanente. Tout le monde craint la propagation de l’épidémie de Covid-19 dans les cellules. C’est dans ce contexte que, le 25 août 2020, Me Stella Bisseuil se rend à la maison d’arrêt de Seysses pour s’entretenir avec une cliente en détention provisoire.

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Pour accéder au parloir, elle doit passer les contrôles de sécurité, comme tous les visiteurs. Le portail sonne. Croyant que ses bijoux déclenchent l’alarme, l’avocate les retire rapidement. Mais l’alarme persiste. Me Bisseuil en déduit que c’est certainement son soutien-gorge à armatures métalliques qui déclenche la machine. Elle en informe les gardiens. Leur réaction la stupéfie. « Ils m’ont regardée d’un air moqueur et m’ont dit que si je voulais voir mon client, je devais enlever mon soutien-gorge », se souvient-elle.

La directrice de la prison est alors intervenue pour régler le différend. À la grande surprise de Me Bisseuil, elle n’a fait preuve d’aucune clémence. « Je m’attendais à plus d’empathie de la part de la directrice, mais elle a été tout aussi catégorique. » Contrairement à ce qu’elle espérait, l’avocate a été contrainte de quitter l’établissement et d’enlever son soutien-gorge dans sa voiture avant de pouvoir accéder au parloir. Cette situation, qu’elle juge humiliante, lui reste encore en travers de la gorge. « Ce que j’ai vécu ce jour-là, c’était une atteinte à ma dignité et à mes droits d’avocate, je l’ai pris sur moi uniquement pour mon client », explique-t-elle.

Privé de salle de visite
« à cause d’une pompe à insuline »

Le soir même, de retour à son bureau, Me Bisseuil a écrit une lettre à l’administration pénitentiaire pour lui demander de reconnaître ses torts. Elle a essuyé un refus catégorique.

En étudiant la réglementation, elle découvre que lorsqu’une alarme se déclenche au portique de sécurité, un contrôle manuel doit lui être proposé, comme cela se fait dans les aéroports. Or, selon les règles en vigueur, un contrôle manuel aurait dû lui être proposé, ce qui n’a pas été le cas. Face au refus obstiné de l’administration de reconnaître son erreur, Me Bisseuil décide de porter l’affaire en justice. Le tribunal administratif donne d’abord raison à l’administration, précisant que « l’avocate avait choisi de se déshabiller dans sa voiture ». Elle fait appel, demandant la production de la vidéo, mais l’administration pénitentiaire affirme ne pas avoir conservé l’enregistrement.

Le 17 septembre, la Cour d’appel a finalement statué en faveur de M. Bisseuil. Dans son arrêt, la Cour a estimé que les faits étaient établis en faveur de l’avocat et que l’administration pénitentiaire n’avait pas respecté les procédures de sécurité. La Cour a conclu que M. Bisseuil aurait dû se voir proposer un contrôle manuel ou, à défaut, une fouille par une femme.

Pour l’avocate, cette victoire est bien plus qu’un succès personnel. « Je me suis battue pour mes droits, mais aussi pour les professions qui travaillent avec les détenus. J’ai aussi entendu le témoignage d’une assistante sociale qui, à cause de sa pompe à insuline, n’a pas pu accéder au parloir. Ce genre de situation ne doit plus se reproduire. »

 
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