Laval annoncera ce vendredi avoir récupéré une nouvelle somme de 3,8 millions auprès des entreprises de Tony Accurso. Au total, la ville estime avoir récupéré 60 millions de dollars perdus à cause de la corruption qui la sévissait il y a des années, dont 12 millions de dollars du seul groupe Accurso. Un bilan global sera présenté cet automne, à la fin des travaux.
Posté à 1h00
Mis à jour à 5h00
« Évidemment, on pourrait toujours en vouloir plus, mais nous sommes vraiment satisfaits de ce que nous avons réussi à obtenir. C’est de l’argent neuf qu’on réinvestit dans les services aux citoyens », explique le maire de la municipalité de la couronne nord de Montréal, Stéphane Boyer, en entrevue.
PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, ARCHIVES LA PRESSE
Maire de Laval, Stéphane Boyer
Lorsque son administration a entamé des poursuites judiciaires pour récupérer des sommes de corruption, en 2014, “beaucoup de gens nous ont dit qu’on perdait notre temps et qu’on ne verrait jamais la couleur de cet argent”, rappelle le maire.
Aujourd’hui, nous dépassons la barre des 60 millions. C’est un résultat dont nous sommes très satisfaits, tant pour M. Accurso que pour la suite de la procédure.
Stéphane Boyer, maire de Laval
Dénouement, car la Ville arrive au bout de quelque chose, 2023 étant la dernière année d’application de la Loi sur le recouvrement des sommes indûment versées à la suite de fraudes dans le cadre de contrats publics, qui découlait de la commission Charbonneau. « Nous approchons de la fin de la procédure. Il y a encore des dossiers qu’on va essayer de conclure, donc le total pourrait augmenter, mais il ne faut pas s’attendre à d’autres montants en 2024 », a déclaré M. Boyer.
PHOTO FRANÇOIS ROY, ARCHIVES LA PRESSE
Tony Accurso, au palais de justice de Laval, en 2018
---Depuis près de dix ans, une équipe spécialisée intégrée au Service des affaires juridiques de la Ville de Laval, composée de sept personnes, dont des enquêteurs de la Commission Charbonneau, a travaillé sur des dizaines de dossiers distincts liés à la corruption. Au total, plus d’une centaine de personnes ont été visées, certaines voulant s’installer immédiatement et d’autres forçant la Ville à aller en justice.
« La loi nous permettait de percevoir jusqu’à 20 % de la valeur des contrats obtenus par la municipalité jugés frauduleux. Ces personnes ont donc retracé l’historique de tous les dossiers, recherché les preuves et intenté des poursuites tant contre les particuliers que contre les entreprises. Il faut mettre en valeur leur travail », poursuit le maire.
Prévenir les écarts futurs
Pour le reste, désormais, il faudra être aux aguets pour s’assurer que « l’histoire ne se répète pas à Laval », insiste le maire Boyer. « Pour nous, il s’agira de veiller à ne jamais baisser la garde, de continuer à être très vigilants et surtout de pouvoir intervenir rapidement en cas de besoin avec l’expertise que nous avons développée notamment au Bureau de d’intégrité et d’éthique de Laval (BIEL) », insiste-t-il.
Rappelons que l’administration municipale de Laval est reconnue comme le premier organisme public à avoir déployé des stratégies judiciaires pour récupérer des millions détournés. L’ancien maire de Laval, Gilles Vaillancourt, a déjà purgé une peine de six ans de prison pour des fraudes commises sur plusieurs années.

PHOTO PATRICK SANFAÇON, ARCHIVES LA PRESSE
L’ancien maire de Laval Gilles Vaillancourt, en 2013
Avant l’arrivée de Stéphane Boyer à la tête de la Ville, son prédécesseur, Marc Demers, avait déjà réussi à récupérer près de 50 millions de dollars détournés par des fraudes et des manœuvres illégales. M. Demers avait également annoncé en novembre 2019 qu’un montant de 20 millions serait réinjecté dans la réserve pour l’acquisition et la mise en valeur des milieux naturels. Une partie servirait également à payer comptant certains projets pour éviter l’endettement.
Quelque 10 millions ont également été injectés dans le Fonds Place-du-Souvenir, mis en place pour financer des initiatives en faveur des jeunes issus de milieux défavorisés. « Nous générons toujours 600 000 $ annuellement grâce aux intérêts et chaque année, nous accueillons des projets destinés aux jeunes défavorisés. Ce sont des avantages très concrets pour nous. Et le reste, on le réinvestit partout pour les citoyens », assure M. Boyer.
Un rapport complet doit être déposé cet automne pour faire le point sur toutes les actions et poursuites intentées par la Ville de Laval au cours des dernières années.
“Nous allons faire le point sur toutes les opérations dans un souci de transparence”, conclut le maire, dont l’équipe a également poursuivi, en février dernier, des particuliers et des entreprises qui auraient participé à des stratagèmes frauduleux pour obtenir des contrats. municipalités, sous l’administration de l’ancien maire Gilles Vaillancourt, pour 9 millions de dollars.