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À Salindres (Gard), le cruel dilemme entre santé et emploi

C’est une bataille menée sur deux fronts. A Salindres, commune de 3 600 habitants située à la périphérie d’Alès (Gard), l’usine chimique Solvay est assiégée par deux types de protestations distinctes… et largement contradictoires.

La première, à caractère environnemental, a été menée par des associations, des groupements d’habitants et des élus locaux. En cause, l’acide trifluoroacétique (TFA) fabriqué par cette usine pour l’industrie pharmaceutique et la production de pesticides. Comme toutes les substances per- et polyfluoroalkyles (PFAS), c’est un « polluant pérenne », c’est-à-dire une molécule toxique qui contamine l’environnement et met des siècles à se dégrader. Reconnu comme perturbateur endocrinien par l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA), il présente également des risques pour la santé humaine.

Mais l’usine est aussi l’objet d’une lutte sociale. Car le 24 septembre 2024, Solvay a annoncé la fermeture du site à l’automne 2025, entraînant la suppression de 64 emplois. Depuis, les syndicats tentent de défendre leurs outils de travail, malgré les risques qu’ils comportent.

Because according to Générations Futures, « Les niveaux de TFA mesurés dans les rejets d’usine et dans l’environnement sont exceptionnellement élevés : nous avons mesuré des concentrations de 7,6 µg/L dans les rejets d’usine, 6,5 à 7,5 µg/L à proximité immédiate et jusqu’à 2 µg/L dans les eaux de surface en aval et en amont du site »explains François Veillerette, spokesperson for the association.

L’eau potable n’est malheureusement pas épargnée, y compris dans deux communes voisines, avec des concentrations d’AGT de 19 µg/L et 18 µg/L, soit « 36 et 38 fois supérieur aux normes européennes ».

L’association a porté plainte contre X et saisi l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses).) « afin que la dangerosité du TFA soit reconnue, en tant que « métabolite pertinent », que sa présence soit recherchée partout en et qu’une valeur sanitaire soit définie »précise François Veillerette. L’objectif immédiat étant la décontamination du site et de ses abords, selon le principe du « pollueur-payeur ».

Personnel de première ligne

Le personnel Solvay est en première ligne face à ces contaminations. « L’employeur nie toute exposition des salariés, mais toute l’ambiance dans l’atelier est acide, car il y a des fuites partout, le produit est corrosif et l’atelier est vétuste. Le TFA est connu pour avoir un impact sur le foie, les reins et la reproduction, et les personnes affectées ont de nombreux problèmes dans ces domaines. »alerte Damien Olry, délégué syndical CGT au Comité social et économique central (CSE) du groupe Solvay en France.

« Nous avons demandé des analyses de sang […] pour les travailleurs les plus concernés, en vain. La direction souhaite qu’ils reprennent le travail», déclare le syndicaliste CGT

L’expertise pour risques graves, lancée au printemps à la demande du CSE, aurait montré « les défaillances de l’employeur en matière de prévention des risques professionnels et d’entretien des équipements »assure-t-il également. Il dit attendre toujours les fiches d’exposition individuelles des salariés aux produits utilisés – une obligation réglementaire – que la direction n’a pas fournies. « Nous avons demandé des analyses de sang et une biosurveillance pour les travailleurs les plus touchés, en vain. La direction souhaite qu’ils reprennent le travail, mais pas question pour eux de s’exposer à nouveau »déclare le syndicaliste.

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Sur le deuxième front, celui de l’emploi, la bataille n’est pas moins rude. Malgré deux semaines de grève sur le site de Salindres en octobre, le groupe envisage toujours de fermer les ateliers de fabrication, de maintenance et les fonctions support. Cette décision, prise officiellement pour des raisons économiques, entraînerait la suppression de 64 emplois.

Mais selon le rapport de l’expert du CSE, la motivation économique n’est pas démontrée : malgré la récente concurrence chinoise, le TFA produit par l’usine du Gard est toujours très demandé par les marchés européens et américains en pleine croissance.

Mauvaise excuse ?

Le groupe Solvay souligne de son côté la mauvaise santé financière du site, dont les pertes sont estimées entre 5 et 10 millions d’euros sur un an et demi. Mais pour les syndicats, ces mauvais résultats pèsent bien peu au regard des bénéfices très confortables que réalise le groupe chaque année. Sur son site interne, le groupe se vante lui-même auprès des investisseurs potentiels « un dividende attractif »s’assurer que « ces 30 ces dernières années, le dividende […] seulement augmenté ».

« Sur le papier, Solvay souhaite se retirer pour des raisons économiques. Serait-ce une mauvaise excuse ? », demande Jean-Louis Peyren. Le secrétaire fédéral de la fédération CGT de la chimie soupçonne le groupe de « je ne veux pas payer un centime pour nettoyer le site ».

Les révélations sur la dangerosité des éternels polluants se succèdent, laissant présager un scandale sanitaire bien au-delà de Salindres

Localement, on craint un effet domino. Il existe des inquiétudes à long terme quant à la pérennité de la plateforme chimique de Salindres. Elle emploie 28 salariés Solvay, responsables de la logistique du site qui comprend, outre Solvay, une autre société (Axens). Au-delà, les pertes d’emplois pèseront indirectement sur l’ensemble du bassin d’emploi d’Alès.

Ailleurs en France, d’autres sites sont également dans l’oeil du cyclone. Le plus tristement célèbre est celui du groupe Arkéma, à Pierre-Bénite, au sud de Lyon. L’association Générations Futures y a également trouvé des alliés locaux pour protester contre la pollution massive de cette zone.

La lutte est moins délicate qu’à Salindres sur le plan économique, car le bassin d’emploi de la métropole lyonnaise est plus riche en postes, notamment en chimie. Mais la question environnementale est tout aussi importante : les révélations sur la dangerosité de ces éternels polluants se succèdent ces dernières semaines, laissant présager un vaste scandale sanitaire bien au-delà de Salindres et Pierre-Bénite.

 
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