FRançois Bayrou n’a pas encore fourni de budget à la France. Mais il vient de survivre à sa première motion de censure, préalable indispensable à la poursuite de son bail à Matignon. Certes, il n’y avait pas beaucoup de suspense puisque le RN avait annoncé qu’il ne voterait pas pour lui. Toujours. Grâce à cette offensive initiée par les Insoumis, le Premier ministre a surtout réussi à fracturer le NFP, révélant au passage une qualité que son prédécesseur Michel Barnier n’avait pas fait preuve : celle d’être un fin et rusé négociateur.
En effet, si le Parti socialiste d’Olivier Faure a choisi de ne pas censurer le Premier ministre, c’est parce que, dans leurs négociations, les Béarnais ont fait de nombreuses concessions. Des gestes qu’il a pris soin de mettre par écrit dans une lettre qu’en bon tacticien il a adressée aux dirigeants socialistes une heure avant l’examen de cette motion de censure. Or, « surprise », cette liste de mesures s’avère bien plus conséquente que son discours de politique générale. En effet, alors qu’il avait déjà signé la renégociation de la réforme des retraites et renoncé à la suppression de 4 000 postes dans l’Éducation nationale, il y a ajouté la baisse des prix de l’électricité, la création de 2 000 postes d’assistants aux étudiants handicapés, un milliard de plus pour l’hôpital. et exclu tout démboursement des médicaments et des consultations médicales.
«Quelle justification ridicule»
Des avancées décisives pour le PS, comme l’a souligné Olivier Faure depuis la tribune de l’Assemblée : « Nos négociations ont permis de faire bouger les lignes. 12 000 postes de personnel soignant et hospitalier créés ou maintenus, pas d’augmentation d’un à trois jours du délai d’attente dans la fonction publique, pas de réduction du budget outre-mer, l’extension du prêt à taux zéro pour les logements neufs et sur tout le territoire, le plus le patrimoine insolent sera à nouveau taxé… »
“Nous avons refusé la politique du pire”
Reste que ce choix de ne pas censurer le gouvernement pose la question de l’avenir du NFP. S’adressant à François Bayrou depuis la tribune de l’Assemblée, Manuel Bompard, le coordinateur de France Insoumise, a également visé les socialistes : « Certains, dans cet hémicycle, bien qu’élus pour en finir avec le macronisme, s’apprêtent à sauver votre gouvernement et à servir comme une béquille pour la continuité de sa politique. » Et de poursuivre : « On prétend qu’il faut attendre quelques jours ou quelques semaines. Quelle justification ridicule. On sait tout des orientations politiques de ce gouvernement. Pensez-vous que le pays peut se permettre le luxe de votre procrastination ? Chacun est donc face à ses responsabilités et à sa fidélité aux engagements pris auprès des populations. » C’est ce qu’on appelle une accusation de trahison.
-« Le PS capitule seul »
Une attaque à laquelle Olivier Faure a répondu : « Nous avons refusé la politique du pire. » Dans ces conditions, on ne voit pas comment le PS et LFI pourraient continuer ensemble sachant que les flèches de Manuel Bompard sont venues après celles, tout aussi empoisonnées, de Jean-Luc Mélenchon qui les avait déjà accusés de « forfaiture » et de « servilité ». . Ce jeudi, il a enfoncé le clou : « Le PS fracture le NFP. Mais il capitule seul. Les trois autres groupes votent la censure. Nous continuons le combat. »
De fait, les écologistes et les communistes ayant voté la censure avec LFI, le PS se retrouve donc isolé au sein du NFP. Et la suite s’annonce difficile, car les Insoumis ne comptent pas dévier de leur stratégie : faire campagne, matin, midi et soir, pour la démission d’Emmanuel Macron. Ce que Manuel Bompard n’a pas caché ce jeudi. Dans son flot de critiques adressées à François Bayrou, il a également pris le glaive contre le chef de l’Etat : « Les jours de votre gouvernement malchanceux sont comptés, quand il tombera, le monarque suivra. » Et d’ajouter : « C’est le président de la République qui sème le chaos. Seuls son départ et le retour aux urnes permettront au pays de sortir de l’impasse. » Mais le Parti socialiste refuse de jouer cette carte de la crise institutionnelle.
Avec cette motion de censure largement rejetée – seulement 131 voix, dont huit PS –, les Insoumis considèrent désormais que les socialistes sont du côté des macronistes, selon le principe selon lequel ceux qui ne sont pas avec vous sont contre vous. Toutefois, Olivier Faure a rappelé : « Il n’y a pas d’accord de non-censure, et la censure est possible à tout moment. » Si les prochaines semaines s’annoncent mouvementées à gauche, François Bayrou peut se tourner vers la préparation du budget, l’heure de vérité.
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