UNAlors que Michel Barnier prévoyait de réduire le déficit à 5 % en 2025, Eric Lombard, le ministre de l’Économie, vise un objectif compris entre 5 et 5,5 %. Est-ce que cela laisse une marge de manœuvre ?
La situation des finances publiques reste difficile. Qu’il y a un espace de négociation, oui. Mais nous avons un impondérable : nous devons continuer à réduire notre déficit après des années de « quoi qu’il en coûte » pendant lesquelles nous avons beaucoup protégé. Dans les accords qui seront conclus, notamment avec le PS, il faudra qu’il y ait des exigences raisonnables compatibles avec la réduction du déficit.
Le futur projet de loi de finances porté par François Bayrou reposerait sur 50 milliards d’euros d’effort. C’est 10 milliards de moins que le précédent. Est-ce significatif ?
C’est beaucoup. Ces 10 milliards représentent une partie de ce qui était prévu dans le budget de Michel Barnier pour la contribution des grandes entreprises à cet effort de relance, soit 8 milliards. Mais pour réduire le déficit, il faut faire des économies et chercher d’autres recettes comme les taxes sur les rachats d’actions.
Pour le PS, la non-censure du gouvernement nécessitera la suspension de la réforme des retraites. Est-ce compatible avec cet impératif de maîtrise des dépenses publiques ?
Je ne suis pas favorable à une suspension, car quand on suspend, on ne sait jamais quand on va recommencer. Il vaut mieux maintenir la réforme et discuter dans un cadre. Nos régimes de retraite, malgré la réforme de 2023, sont déjà déficitaires. Le président du COR [Conseil d’orientation des retraites, NDLR] a indiqué que la situation allait se dégrader d’ici 2030. On peut discuter d’éléments techniques, comme la pénibilité, les carrières interrompues pour les femmes, mais on ne peut pas aggraver davantage la situation, au risque de menacer le régime par la répartition.
Économiser de l’argent est-il aussi le sens de votre proposition de loi anti-fraude ?
Je le présenterai dans l’Hémicycle le 27 janvier. Il vise à lutter contre la fraude aux aides publiques et l’éco-délinquance, c’est-à-dire le détournement de toutes les aides dédiées à l’environnement. Aujourd’hui, l’État verse un peu plus de 20 milliards d’euros d’aides par an pour changer de voiture, rénover sa maison, son train, etc.
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Dix ans après l’attentat de « Charlie Hebdo », les jihadistes n’ont pas rendu les armes. Les récentes frappes en Syrie contre les positions de Daesh le prouvent. De même, l’émergence du nouveau maître de Damas, al-Jolani, ancien d’Al-Qaïda, peut inquiéter. Décryptage avec Marc Hecker, spécialiste du terrorisme et directeur adjoint de l’Institut français des relations internationales (Ifri)
« Tracfin a identifié un détournement potentiel de 400 millions d’euros de MaPrimeRénov’ »
À combien s’élèvent ces malversations ?
Tracfin, le service de lutte contre le blanchiment, a identifié un potentiel détournement de 400 millions d’euros auprès de MaPrimeRénov’. La Cour des comptes a identifié un détournement potentiel de certificats d’économies d’énergie d’une valeur de 450 millions d’euros. Comme nous dépensons beaucoup pour aider, il existe un risque de détournement. Ce projet de loi vise à frapper fort contre ceux qui détournent de l’argent en augmentant les sanctions et en renforçant les pouvoirs des services de l’État.
Qu’est-ce que votre proposition de loi va améliorer ?
Il permettra à un organisme de suspendre le versement de l’aide en cas de doute, ce qui n’est pas possible aujourd’hui. Car, bien souvent, ces aides sont versées à des entreprises éphémères qui disparaissent. Ce texte permettra également aux services de l’État d’échanger des données. Lorsque Tracfin dispose d’informations, il ne peut pas les partager avec le ministère de l’Ecologie qui rémunère MaPrimeRénov’. Demain, ce sera possible. Cela devrait permettre de récupérer ou d’éviter de perdre 700 millions à 1,6 milliard en détournements d’argent public.
Vous présiderez également une commission d’enquête sur les élections. De quoi s’agit-il ?
Cette commission a été créée à la demande de LFI sur l’organisation des élections. L’objectif est d’aborder plusieurs sujets fondamentaux de la vie démocratique : l’inscription et la radiation des listes électorales, ou comment accroître la participation ? Nous examinerons le vote électronique, la violence dans les campagnes et leur financement. Le rapporteur sera le député LFI Antoine Léaument.
Emmanuel Macron a ouvert la porte à plusieurs référendums. Quels sujets possibles ?
Le référendum fait partie des prérogatives du président. Dans d’autres pays, il est plus facile de revenir aux électeurs pour trancher sur certaines questions. Une réforme territoriale serait un bon sujet de référendum.
Est-ce une manière pour le chef de l’Etat de garder le contrôle ?
Dans cette période où l’Assemblée connaît des difficultés, se tourner vers les Français est une manière d’avancer. Le pire pour nous serait de tomber dans l’immobilité.
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