Pour Donald Trump, la loyauté est le critère qui surpasse tous les autres. Le ralliement de Mark Zuckerberg, l’un des derniers milliardaires de la tech américaine qui avait jusque-là gardé ses distances, méritait bien d’être mis en scène à la télévision.
« Muskification de ses plateformes », a réagi Reporters sans frontières, qui s’est alarmée de « cette politique renforcée contre le droit à l’information. »
Zuckerberg après Musk, Bezos et les autres
« Ce discours marque un tournant dans la révolution numérique. Cette remarque n’est pas exagérée. Facebook a été construit sur la monétisation de la rage et de l’indignation. En tant que tel, le réseau social est devenu une bombe puissante pour fragmenter les démocraties. Le voilà aujourd’hui qui prête allégeance à une administration autocratique, imprévisible et hégémonique », a résumé sur son blog l’expert des médias numériques Frédéric Filloux.
Après Elon Musk, patron de Tesla, SpaceX et du paiement en ligne Paypal et bien d’autres dont Tim Cook patron d’Apple, Mark Zuckerberg rejoint le cortège des magnats américains de la tech pro-Trump. Des entrepreneurs et hommes d’affaires dont l’objectif est évidemment de tirer le maximum de profits du deuxième mandat présidentiel. La galaxie politique MAGA (Make America Great Again) et l’élite économique de la Silicon Valley forment une alliance dans le but de remodeler l’environnement culturel et réglementaire dans lequel ils opèrent. Cela se fera grâce à la déréglementation. Et bien sûr.
Le DSA, objet de toutes les tensions
En septembre 2024, en pleine campagne présidentielle, une phrase de JD Vance, le futur vice-président américain, est passée relativement inaperçue. En ce mois de janvier 2025, il prend tout son sens. Interrogé sur les différences entre Elon Musk et son réseau social Européens. « Ce que l’Amérique devrait dire, c’est que si l’OTAN veut que nous continuions à soutenir l’alliance militaire, pourquoi ne respectez-vous pas les valeurs américaines et la liberté d’expression ? « . Traduisons les termes du marché : protection militaire américaine en échange d’un assouplissement de la réglementation européenne sur le numérique.
Car depuis décembre 2023, les géants américains de la tech sont nerveux. Bruxelles a ouvert une enquête contre l’ancien compte Twitter. En cause : des violations présumées des règles européennes en matière de modération et de transparence des contenus, conformément à la loi sur les services numériques. Le DSA, le voilà, l’objet de toutes les tensions. Adopté pour lutter contre la diffusion de contenus illicites en ligne, ce règlement impose aux plateformes et aux moteurs de prendre des mesures pour atténuer les risques découlant de l’utilisation de leurs services. Y compris la diffusion de contenus illicites tels que l’incitation à la haine ou à la violence, le harcèlement, la pédopornographie ou l’apologie du terrorisme. Le DSA prévoit des pénalités pouvant aller jusqu’à 6 % du revenu ou du chiffre d’affaires annuel de l’entreprise.
L’Europe en plein désarroi
Donald Trump élu, l’objectif de son camp et des alliés de la « droite technologique » est d’obliger l’UE à abandonner les enquêtes et les réglementations. Ils font peser trop de risques sur l’activité et entravent la liberté d’innovation des géants américains du numérique. Commerce en ligne, réseaux sociaux mais il faut voir implicitement le domaine de l’Intelligence Artificielle. Sur ce dernier sujet parmi ceux qui murmurent à l’oreille du futur locataire de la Maison Blanche, Sundar Pichai, le directeur général de Google.
Les Européens réagissent de manière dispersée. Première remarque : le commissaire au Marché intérieur, le Français Thierry Breton, l’un des principaux promoteurs du DSA et meilleur ennemi européen d’Elon Musk, a démissionné de la Commission européenne en septembre. La cheffe de la Commission Ursula von der Leyen a, de son côté, donné l’instruction début janvier « de suspendre les enquêtes en cours contre les plateformes américaines (enquêtes qui concernent notamment Apple, Meta et X, ndlr), et de faire pas en lancer d’autres », rapporte Le Monde.
Une attitude qui ne fait pas l’unanimité. Invité de Radio France mercredi, le ministre des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot a ajusté son approche. Si la Commission européenne « n’exerce pas fermement ses pouvoirs » pour protéger le débat public en ligne, « elle devra laisser les Etats libres de prendre des mesures nationales ».
États-Unis : faut-il l’appeler « Président Musk » ?
Faut-il l’appeler « Président Musk » comme le font déjà certains opposants à Donald Trump ? La bataille actuelle sur le budget américain confirme en tout cas l’incroyable influence politique du multimilliardaire sur la présidence Trump, avant même qu’elle ne commence.
Bataille culturelle
Et pendant ce temps, l’offensive continue. Dans le rôle de l’agent d’ambiance trumpiste, l’incontournable Elon Musk. L’organisation d’une « conversation » entre Alice Weidel, dirigeante de l’organisation radicale allemande AfD, avec Musk sur son réseau X, le 9 janvier, quelques semaines avant les élections législatives de février outre-Rhin, donne le ton.
Lors de la conférence annuelle des ambassadeurs, Emmanuel Macron a déclaré : « Il y a dix ans, si on nous avait dit que le propriétaire de l’un des plus grands réseaux sociaux au monde soutiendrait une nouvelle internationale réactionnaire et interviendrait directement dans les élections, y compris en Allemagne. , qui l’aurait imaginé ? » Il aurait aussi pu regarder outre-Manche, où Musk affiche son soutien à Tommy Robinson, militant d’extrême droite islamophobe et conspirationniste.
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