Ôopération surprise avant l’aube ce jeudi 19 décembre chez le caviste Maison Parsat à Eymet, en Périgord, à deux pas du Lot-et-Garonne. Une centaine de membres de la Coordination rurale (CR) du Lot-et-Garonne, Dordogne et Gironde souhaitent contrôler l’origine du vin. Le négociant est soupçonné d’importer d’importants volumes de vins espagnols alors que les caves des viticulteurs de la région débordent et que les plans d’arrachage portent sur des milliers d’hectares.
Les esprits s’échauffent
Dans la nuit de pleine lune, nous sommes prêts à intervenir dès qu’un pétrolier espagnol pointe son pare-chocs. “Allez, c’est bon, allons-y !” », raconte Karine Duc, co-présidente du CR 47. Immédiatement, des véhicules légers encerclent l’entreprise. Les hommes aux casquettes jaunes lèvent un grand portail à rideaux d’où sort un tuyau relié au camion espagnol. Les esprits s’échauffent un peu avec un employé. La police est déjà là. Et la tension retombe en attendant l’arrivée du chef d’entreprise Jean-Marc Parsat, alors en route pour Carcassonne où il doit négocier avec la grande distribution.
“C’est toujours la faute des autres et on meurt”
« Nous savons qu’il y a au moins huit semi-remorques espagnols qui arrivent ici tous les jeudis. Cela fait au moins 5 800 hl par semaine », précise un vigneron. Certains souhaitent vider le contenu du camion sur l’asphalte. Jean-Marc Parsat est désormais là. Elle annonce qu’elle est également en difficulté, avec 7 millions d’euros de pertes de marché ces derniers mois avec la grande distribution. « Moi aussi, je suis au bord du gouffre. »
Opération de Coordination rurale à Eymet (24) chez le négociant Parsat accusé de vendre du vin espagnol en grande quantité. Une centaine de membres des CR 24, 47 et 33 bloquent le site. La police est sur place. #CR47 #agriculteursen colère
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– j-jamet.bsky.social (@j-jamet.bsky.social) 19 décembre 2024 à 8h03
Le commerçant assure acheter un fût de Bergerac rouge entre 850 et 930 euros. Il avoue également importer environ 30 % de vins espagnols. “Non, je ne gagne pas plus avec ça”, se défend-il. Mais quand je vais voir Carrefour, Leclerc, Intermarché, Casino, Système U…, les vins français représentent 7 ou 8 % de l’activité. Et si vous arrivez avec des vins d’Espagne, vous avez 25 ou 30 %. »
« C’est inacceptable ! »
“C’est toujours la faute des autres et nous sommes en train de mourir”, dit une casquette jaune. Les représentants de CR exigent l’accès aux registres de l’entreprise pour vérifier les volumes de vins espagnols. Jean-Marc Parsat négocie, puis cède face à la promesse de se revoir plus tard dans un contexte moins tendu.
« Ce que nous avons découvert, c’est que les vins espagnols représentent en réalité 60 % des volumes. C’est inacceptable ! », tempête José Pérez, l’autre figure du CR 47. « C’est le consommateur qui décide, plaide le commerçant. Les Français n’ont plus les moyens de payer plus de 4 ou 6 euros la bouteille. Je ne suis qu’un petit commerçant. Si j’arrête de produire du vin espagnol, je fermerai l’entreprise et sacrifierai 35 employés et leurs familles. »
Rendez-vous en janvier
Les deux parties conviennent de se retrouver le 28 janvier 2025, à la Chambre d’agriculture du Lot-et-Garonne, pour créer une marque de bavoirs de vins français avec un prix plancher pour les vignerons. L’initiative de ce « dossard de résurrection » a déjà été lancée à petite échelle cette année par la Maison Parsat et sept vignerons qui ont pu vendre leur vin à 1 150 euros le fût.
L’idée est désormais de voir plus grand en impliquant d’autres commerçants et d’autres producteurs. « Il faudra que les distributeurs jouent le jeu », prévient Jean-Marc Parsat.
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