Après quatre mois de débats, le procès pour viol de Mazan s’est conclu jeudi avec la peine maximale pour Dominique Pelicot, mais des peines inférieures à celles demandées par le parquet pour ses 50 coaccusés, une décision que Gisèle Pelicot a affirmé « respecter ».
Dans une brève intervention après le verdict du tribunal correctionnel du Vaucluse, l’ex-épouse de Dominique Pelicot, 72 ans, véritable icône féministe depuis sa décision de refuser le huis clos à l’ouverture de ce procès hors norme, le 2 septembre, Avignon, a également dit penser aux « victimes méconnues » des violences sexuelles.
Optimiste, elle a assuré avoir « désormais confiance » dans « un avenir dans lequel chacun, femme et homme, pourra vivre en harmonie ».
Sans surprise, son désormais ex-mari, Dominique Pelicot, également âgé de 72 ans, a été condamné à la peine maximale pour viol aggravé, soit 20 ans de réclusion criminelle, comme l’avait requis le parquet. Le tribunal est même allé plus loin en ajoutant une peine de sécurité de deux tiers.
Il était jugé pour avoir aspergé sa femme d’anxiolytiques pendant une décennie, en faisant son objet sexuel et en la livrant à des dizaines d’hommes recrutés sur Internet.
– Des enfants « déçus » –
Ses 50 coaccusés, des hommes âgés de 27 à 74 ans, ont également été reconnus coupables, la plupart pour « viol aggravé ». Puis, dans une lecture sèche, sans aucun commentaire ni motivation, le président Roger Arata a ensuite énuméré une à une leurs phrases, lors d’une ultime audience qui a duré à peine plus d’une heure.
La peine la plus basse, trois ans de prison dont deux avec sursis, a été prononcée contre Joseph C., 69 ans, accusé d’avoir « attouché » Gisèle Pelicot. La plus lourde, 15 ans de réclusion criminelle, a visé Romain V., 63 ans, venu six fois à Mazan pour violer Mme Pelicot.
Le ministère public avait requis des peines de 10 à 18 ans d’emprisonnement contre les 49 coaccusés jugés pour viol aggravé ou tentative de viol, espérant que le tribunal, dans son verdict final, enverrait « un message d’espoir aux victimes de violences sexuelles ».
Un verdict jugé trop clément par les enfants du couple Pelicot, David, Caroline et Florian, “déçus” de ces peines “faibles”, a déclaré à l’AFP un membre de la famille, qui a requis l’anonymat.
Avec la condamnation des 51 accusés, “la justice a donné raison à Gisèle Pelicot”, s’est félicitée la Fondation des Femmes, partageant toutefois “l’incompréhension et la déception face à certaines condamnations prononcées, malgré les témoins et les preuves”, ces milliers de des photos et vidéos des viols de Gisèle Pelicot que son mari avait soigneusement conservées et légendées.
“Le message envoyé, c’est ‘un viol, ce n’est pas si grave, c’est un sous-crime'”, s’est également indignée l’association Osez le féminisme.
Dans la foule rassemblée devant le tribunal, la colère était également forte, avec les cris de « cessons de réclamer justice, rendons justice », de la part de certains militants. Signe de cette tension, l’un des six accusés sortis libres a été bousculé alors qu’il s’éloignait avec son avocat.
– Dominique Pélicot “hébété” –
Selon son avocat, Me Béatrice Zavarro, Dominique Pelicot était « quelque peu abasourdi » par la période de sûreté prononcée contre lui, n’excluant pas un recours afin d’être rejugé, cette fois devant « un jury populaire », comme c’est la règle après un premier procès. instance devant un tribunal correctionnel, composé de magistrats professionnels.
Le ministère public prendra une décision dans les prochains jours: “Nous jugerons au cas par cas d’un éventuel recours, lorsque nous aurons reçu les motivations”, a déclaré à l’AFP l’un de ses deux représentants, Jean-Pierre. François Mayet.
Parmi les avocats de la défense, dont une trentaine avait plaidé pour l’acquittement de leurs clients, prétendument « manipulés » par le « monstre », le « loup » ou encore « l’ogre » Dominique Pelicot, peu semblaient enclins à le faire. appel. « Même s’il trouve cela un peu dur, mon client a compris le sens de la sentence et a reconnu les faits », a déclaré Me Cécile Attard, qui défend Fabien S., condamné à 11 ans de prison (le parquet en a requis 16).
Jérôme V., condamné à 13 ans de prison, avait déclaré avant même le verdict qu’il ne ferait pas appel, pour ne pas imposer un nouveau procès à Mme Pelicot.
Reconnus coupables, la majorité des 32 accusés qui ont comparu libres dormiront jeudi soir derrière les barreaux. Prêts à cette éventualité, la plupart sont arrivés à l’audience avec un sac contenant quelques vêtements. En larmes, l’un d’eux a longuement serré sa compagne dans ses bras avant d’entrer dans la pièce.
Une chose est sûre : la décision du tribunal a été scrutée de près, en France et à l’étranger, tant ce procès a provoqué une onde de choc, devenant emblématique des problématiques liées aux violences sexistes et sexuelles et, plus largement, aux relations de genre.
Le combat de Gisèle Pélicot « nous oblige tous et doit être poursuivi », a commenté le Premier ministre François Bayrou. “Merci Gisèle”, ont réagi sur X les chefs des gouvernements espagnol et allemand Pedro Sanchez et Olaf Scholz.
Clôturant ce dernier chapitre d’un procès hors norme, Gisèle Pelicot a quitté le palais de justice pour « bravo » et « merci », faisant écho à une immense banderole « Merci Gisèle » accrochée sur les remparts de la ville d’Avignon, devant le tribunal.
Quant à Dominique Pelicot, appel ou non à ce procès pour viol à Mazan, il n’en a pas fini avec la justice. Mis en examen par le pôle +cold cases+, il pourrait être jugé pour une tentative de viol en 1999 en Seine-et-Marne, mais surtout un viol suivi d’assassinat en 1991 à Paris, celui d’une jeune agent immobilier de 23 ans. . .
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