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qui sont les jihadistes et les rebelles qui progressent contre le régime de Bachar al-Assad ?

Une coalition composée de jihadistes, notamment de l’ex-branche syrienne d’Al-Qaïda, et de rebelles, dont ceux de l’Armée nationale syrienne, soutenus par la Turquie, ont repris de vastes régions du nord de la Syrie aux forces gouvernementales de Bachar al-Assad.

Un revers cinglant. Pour la première fois depuis le début de la guerre en Syrie en 2011 – qui a fait à ce stade un demi-million de morts – le régime de Bachar al-Assad a complètement perdu le contrôle d’Alep, la deuxième ville du pays.

Poumon économique de la Syrie avant la guerre, Alep a été reprise par une coalition d’opposants lors d’une fulgurante offensive lancée le 27 novembre. Outre la ville d’Alep et son aéroport, des dizaines d’autres villes du nord du pays ont été prises. retour du régime soutenu par la Russie et l’Iran.

Derrière cette offensive surprise ? Une « mosaïque immensément complexe » de groupes armés, décrit le général Jérôme Pellistrandi, consultant défense sur notre chaîne.

« Il s’agit d’une coalition très hétérogène d’opposants au régime de Bachar al-Assad », explique-t-il.

Une ancienne branche d’Al-Qaïda

Première force de cette coalition : les jihadistes de Hayat Tahrir al-Sham (HTS), alliance dominée par l’ancienne branche syrienne d’Al-Qaïda.

Pour comprendre la genèse de ce groupe, il faut remonter aux attentats du 11 septembre 2001 lorsque son fondateur, Abou Mohammed al-Joulani, commença à se radicaliser. Arrêté par les Américains, il rencontre en prison le futur créateur de Daesh, Abou Bakr al-Baghdadi.

De là est née l’idée d’Abou Mohammed al-Joulani de créer un califat en Syrie. Mais il va vite prendre ses distances avec Daesh et se tourner vers Al-Qaïda. En 2012, Abou Mohammed al-Joulani crée le Front al-Nosra, la filiale syrienne de l’organisation jihadiste. Bien que le groupe ait continué à combattre Bachar al-Assad, il a rompu avec Al-Qaïda en 2016.

L’organisation Hayat Tahrir al-Sham (HTS) a été créée un an plus tard suite à une fusion avec d’autres groupes similaires.

«En rompant avec Al-Qaïda, le groupe renonce en quelque sorte au terrorisme, il veut s’inscrire dans ce que l’on pourrait qualifier d’un salafisme-djihadisme plus réaliste. Elle rouvre le dialogue avec les Etats-Unis, dissocie la politique militaire…», explique à BFMTV.com Pierre Boussel, chercheur associé à la Fondation pour la recherche stratégique et spécialiste de l’organisation Hayat Tahrir al-Sham.

Composé majoritairement de combattants syriens, le groupe se revendique aujourd’hui comme une alternative politique locale. Début 2019, il prend le contrôle de la majorité de la province d’Idlib (nord-ouest) et crée un « gouvernement de salut ».

Aucune volonté « d’exporter le conflit »

« Il ne me semble pas qu’il y ait de tentatives terroristes d’exporter le conflit », analyse le général Jérôme Pellistrandi. Mais plusieurs observateurs appellent à la prudence, affirmant que Hayat Tahrir al-Sham reste fondamentalement un groupe islamiste radical.

“Le groupe a démontré qu’il était incroyablement opportuniste dans ses alliances et allégeances”, a déclaré Tammy Palacios, chargée de la lutte contre le terrorisme au New Lines Institute. Sa transition autoproclamée “n’est pas forcément partagée par tous ses membres” et elle “continue de graviter autour des intérêts et des objectifs majeurs d’Al-Qaïda”, a-t-elle déclaré à l’Agence Presse. « Le HTS peut être fait avec Al-Qaïda, mais Al-Qaïda n’en a pas fini avec le HTS. »

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Des combattants antigouvernementaux posent pour une photo sur un char sur la route menant à Maaret al-Numan dans la province d’Idlib, au nord-ouest de la Syrie, le 30 novembre 2024. © MUHAMMAD HAJ KADOUR / AFP

Selon un rapport du Centre américain d’études stratégiques et internationales (CSIS), HTS disposait d’une force de combat comprise entre 12 000 et 15 000 hommes en octobre 2018.

A côté de Hayat Tahrir al-Sham, il existe également d’autres groupes indépendants, « plus ou moins radicalisés et endoctrinés », affirme Pierre Boussel.

Rebelles soutenus par la Turquie

Au-delà de cette première myriade de groupes jihadistes, la coalition face à Bachar al-Assad est également composée de groupes « rebelles ». Dans ces rangs, on retrouve les restes de l’Armée syrienne libre, un groupe de rebelles formé en 2011, qui s’est lentement désintégré à partir de 2017.

De nombreux groupes de l’Armée syrienne libre se sont également retrouvés au sein d’une autre organisation, née en 2017, qui porte le nom d’Armée nationale syrienne (ANS).

« L’Armée nationale syrienne est une organisation d’une quarantaine de groupes armés qui combat aujourd’hui aux côtés d’Al-Fatah al-Mubin et de Hayat Tahrir al-Sham », résume le chercheur associé au FRS.

Et cette organisation bénéficie d’un soutien important : celui de la Turquie, dont l’armée contrôle plusieurs zones du nord de la Syrie, près de sa frontière sud. Ankara a toutefois réfuté ce lundi 2 décembre toute « ingérence étrangère » dans l’offensive en cours et déclaré ne pas vouloir « que la guerre civile s’intensifie davantage ».

La Turquie souhaiterait en effet que les quelque trois millions de Syriens réfugiés sur son territoire en raison de la guerre reviennent de l’autre côté de la frontière. Pour cela, le président Erdogan souhaiterait une « zone tampon » dans le nord de la Syrie.

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Des Iraniens manifestent devant l’ambassade de Turquie contre le soutien de la Turquie à une alliance rebelle dominée par les islamistes combattant le régime en Syrie, le 2 décembre 2024 à Téhéran. © ATTA KENARE / AFP

Vient ensuite le combat d’Ankara contre les Forces démocratiques syriennes, composées en grande partie de combattants kurdes d’un groupe connu sous le nom d’Unités de protection du peuple (YPG). Ce groupe est considéré comme une émanation du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), classé terroriste par la Turquie. A noter que les Forces démocratiques syriennes ont combattu Daesh aux côtés de la coalition internationale et contrôlent le nord d’Alep.

« HTS représente pour la Turquie un rempart contre les forces kurdes. Ils ont laissé le levier HTS agir tout seul », image Pierre Boussel.

“Erdogan veut aussi accroître son influence sur la frontière sud de son pays, une zone qui faisait partie de l’Empire ottoman jusqu’à la fin de la Première Guerre mondiale”, ajoute le général Jérôme Pellistrandi.

Des groupes qui « ne sont pas d’accord sur la voie à suivre »

Si groupes jihadistes et rebelles combattent côte à côte, leurs relations n’ont pas toujours été bonnes. L’opposition syrienne se méfiait de l’intervention de groupes jihadistes au début du conflit en 2011, car de nombreux membres espéraient que la lutte contre le régime brutal de Bachar al-Assad ne serait pas entachée par un extrémisme violent.

Mais finalement, les différents groupes se sont mis d’accord car ils n’avaient qu’un seul objectif : renverser Bachar al-Assad. Par ailleurs, « ils veulent tous un régime islamique qui s’étende de la province d’Idleb jusqu’à Alep », souligne Pierre Boussel. “Mais ils ne sont pas d’accord sur la manière d’y parvenir.”

La province d’Idlib, au nord-ouest de la Syrie, était déjà aux mains des opposants au régime de Bachar Al-Assad. C’est également depuis Idlib que l’offensive a été lancée « parce que le régime criminel avait massé ses forces sur les lignes de front et commencé à bombarder des zones civiles, ce qui a provoqué l’exode de dizaines de milliers de personnes », selon le chef du parti autoproclamé. « gouvernement » par HTS dans cette province, Mohammad al-Bashir.

“Je ne pense pas que les rebelles veuillent aller jusqu’à Damas (sud-ouest de la Syrie)”, renchérit le général Jérôme Pellistrandi, qui s’interroge plutôt sur la réaction de Bachar al-Assad.

« Idlib est un territoire qui échappe complètement à Assad mais va-t-il mener une reconquête d’Alep avec l’aide des Russes et des Iraniens comme en 2016… », s’interroge-t-il. Si la Russie et l’Iran ont affirmé leur soutien « inconditionnel » à la Syrie de Bachar al-Assad, les deux pays restent respectivement absorbés par la guerre en Ukraine et par les conflits entre le Hamas, le Hezbollah et Israël.

 
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