Ils étaient sans doute nombreux à pousser un ouf de soulagement dans les couloirs des ministères, à Matignon, Bercy et autres. L’agence de notation S&P Global Ratings (anciennement Standard & Poor’s) a envoyé ce vendredi soir un signal positif au gouvernement français en maintenant sa note au niveau actuel : « AA- », soit le quatrième niveau de son classement, accompagné d’une perspective stable. .
C’est peu dire que la rencontre était attendue. Tous les six mois environ, à quelques semaines d’intervalle, les trois principales agences de notation de la planète (toutes américaines) évaluent la santé économique du pays, ainsi que sa capacité à rembourser sa dette. L’exécutif suit la publication de ces notes comme du lait sur le feu puisqu’elles constituent également un bon indicateur de sa capacité à piloter le paquebot France.
« Mais ici, c’est vrai que nous avons été particulièrement attentifs, compte tenu des fortes turbulences qui secouent notre pays », confie un membre du cabinet. Et c’est la première note qui prend véritablement en compte notre plan budgétaire et structurel à moyen terme (Le PSMT, qui fixe la trajectoire des finances publiques au regard des règles budgétaires européennes). Cette notation est certainement un indicateur précieux de la perception que les marchés financiers ont de ce gouvernement. »
Un signal positif
“Malgré l’incertitude politique, nous attendons de la France qu’elle se conforme – avec retard – au cadre budgétaire européen et consolide progressivement ses finances publiques à moyen terme”, indique l’agence américaine dans un communiqué.
L’avis de S&P envoie donc pour l’instant un signal positif, à la fois économique et financier, aux marchés et aux entreprises, mais aussi politique, en réponse aux critiques des oppositions de tous bords. D’autant que le gouvernement est actuellement menacé d’une motion de censure sur les trois budgets en discussion au Parlement (sécurité sociale, général et fin de gestion), et qui, s’ils étaient votés, entraîneraient sa chute.
“Vu le contexte, c’est sans doute une manière de ne pas jeter de l’huile sur le feu”, estime Paul Chollet, chef économiste du Crédit Mutuel Arkéa. En mai, S&P a abaissé la note de la France de AA avec perspective négative à AA-. Une analyse partagée par Marc Fiorentino, spécialiste des marchés financiers : « La logique voulait que l’agence ne fasse pas tomber le pays pour le moment », décrypte l’économiste. AA-, cela reste une très bonne note, l’équivalent d’un 16 sur 20. Ce qui ne nous empêche pas d’envoyer des signaux pour que nos dirigeants ne se reposent pas sur leurs lauriers. » S&P joue donc la carte de la confiance, tout en suivant la ligne déjà tracée par les deux autres grandes agences américaines.
Pour mémoire, mi-octobre, au lendemain de la présentation du prochain budget par le gouvernement, Fitch avait annoncé qu’il maintiendrait la notation de la France à AA-, mais avec une perspective négative, en raison de « risques accrus liés à politique budgétaire. Deux semaines plus tard, Moody’s adoptait le même ton : pas de changement de notation (Aa2, l’équivalent d’un AA chez Fitch et S&P), mais toujours avec une perspective allant de « stable » à « négative ». », l’agence jugeant « peu probable » que le gouvernement parvienne à réduire le déficit à 5 % l’année prochaine.
“La France reste un actif à très faible risque”
“En maintenant sa note, S&P confirme que malgré les difficultés actuelles, la France reste un actif à très faible risque”, ajoute Bruno De Moura Fernandes, responsable de la recherche macroéconomique à la Coface. La preuve en est qu’à chaque émission de dette française par le Trésor sur le marché obligataire, il y a toujours deux fois plus de demande, c’est-à-dire d’acheteurs, que d’offre. » Dans son évaluation des budgets des États membres, l’Union européenne a par ailleurs jugé mercredi dernier le budget 2025 présenté par l’exécutif français actuellement « conforme » aux exigences européennes. A condition évidemment que le pays ne soit pas frappé par une nouvelle crise grave de gouvernance.
Car attention, soulignent de nombreux experts, cette relativement bonne surprise ne doit pas faire oublier les nombreux autres indicateurs économiques actuellement dans le rouge pour la France. A commencer par une dette astronomique (3 200 milliards d’euros en 2024) et un déficit public tout aussi abyssal (178,2 milliards d’euros). prévue pour 2024, soit 6,1% du produit intérieur brut, ou PIB). “Ce que regardent avant tout les marchés, et avec eux les agences de notation, c’est notre capacité à redresser la trajectoire de notre dette dans le bon sens”, prévient Alexandre Baradez, responsable de l’analyse de marché chez IG France. Pour l’instant, ils sont encore relativement attentistes, mais s’ils estiment que les efforts sont insuffisants, ce sera la sanction. »
Jeudi, pendant quelques heures, le taux d’emprunt à dix ans de la France a atteint le même niveau que celui de la Grèce. Une première dans son histoire. Et un avertissement.
« En maintenant la note de la France, Standard and Poor’s démontre le crédit accordé au gouvernement pour réduire le déficit et redresser nos finances publiques. L’agence souligne cependant le risque lié à l’incertitude politique qui remettrait en cause cette trajectoire », réagit Antoine Armand, le ministre de l’Économie.
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