Marine Vlahovic a été retrouvée morte à son domicile de Marseille, lundi 25 novembre. L’auteur du brillant Carnets des correspondants – terme qu’il faut comprendre à la fois dans un sens journalistique et comme un écho de son énergie à donner et à prendre des nouvelles de tous ceux qu’elle croisait au bord de sa Méditerranée d’adoption – avait 39 ans.
Le dernier échange que j’ai eu avec elle remonte à trop longtemps, juste avant l’été. Mais cela reflète à quel point le journalisme, pour Marine, était un engagement continu qui ne s’arrêtait pas une fois le podcast diffusé ou l’article publié.
« Bonjour, je vous ai certainement parlé de mes amis Heba et Islam de Gaza qui ont perdu leurs quatre enfants dans un bombardement israélien en octobre 2023. Leurs vies, leurs espoirs et leurs rêves ont été balayés, mais ils sont déterminés à rejoindre la France. De notre côté, avec des amis, nous nous sommes résignés à payer leurs frais d’évacuation à une agence égyptienne. Islam et Heba sont actuellement au Caire et nous attendons leur arrivée avec impatience. Pour découvrir leur histoire (en arabe, anglais et français) et les aider financièrement, cliquez ici. »
Juste après le 7 octobre, Marine part en Egypte où elle reste plusieurs mois pour à la fois couvrir l’anéantissement de Gaza et tenter d’aider les nombreux amis qu’elle avait dans la bande palestinienne, depuis qu’elle était correspondante indépendante en Cisjordanie pour Radio France et RFI.
Une expérience qu’elle a racontée d’une manière à la fois douloureuse et drôle dans Carnets des correspondantsdiffusé sur Arte Radio, prix Scam au festival Paris Podcast, une chronique de la vie sous l’occupation, mais aussi une critique de la raison médiatique.
Pour Mediapart, elle avait, depuis l’Egypte, publié plusieurs articles sous le pseudonyme de Julie Paris (à retrouver ici, ici ou ici). Le dernier podcast qu’elle a réalisé cet été sur Arte Radio est également dédié aux voix de Gaza.
Avant cela, nous avions signé ensemble, en mars 2023, plusieurs articles basés sur des reportages en Cisjordanie occupée et à Gaza. À une époque où les tensions semblaient se concentrer vers Naplouse et Huwara, elle a insisté pour que nous allions également à Gaza, à la fois par envie de découvrir la terre de son cœur et par le sentiment que c’est là que le jeu se poursuivait. , en profondeur, le sort de la Palestine historique, sous le vernis d’une apparente normalité qui volera en éclats quelques mois plus tard, le 7 octobre de la même année.
La toute première fois que le nom de Marine Vlahovic est apparu dans Mediapart, c’était pourtant avant son aventure palestinienne, il y a dix ans, lorsque cette Bretonne sillonnant la Méditerranée était basée à Naples, pour un reportage à la fois écrit et sonore sur la manière dont la crise économique a touché la ville italienne.
J’ai chez moi trois objets directement liés à Marine. Une fausse pièce de 1 euro d’un faussaire napolitain que m’avait fait découvrir ce passionné des mondes souterrains. Un dessous de plat ébréché provenant d’un petit magasin d’Hébron “Parce que c’est là qu’il faut acheter des céramiques, et seulement là-bas.” Et un laissez-passer de « Le gouvernement du Hamas à Gaza » que tout journaliste franchissant la frontière d’Erez devait obtenir pour travailler dans la bande palestinienne avant octobre 2023. Et je ne me rends pas encore compte qu’il n’y aura plus d’autres objets liés à d’autres reportages. Repose en paix Marine.
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