Le mois d’août 1942 marque un tournant dans la Seconde Guerre mondiale, en Alsace et en Moselle. Le 25 août 1942, Robert Wagner, chef de l’administration civile d’Alsace, rédige un décret instaurant le service militaire obligatoire dans la région. La Moselle subit le même sort dans les jours qui suivirent. Ces décisions conduisirent à une accélération de l’intégration des locaux dans les troupes allemandes. Ainsi, 130 000 hommes, pour la plupart des jeunes, combattirent dans l’armée allemande. Environ 40 000 personnes ne rentreront jamais chez elles. D’autres seront jugés pour avoir exécuté les ordres.
En déplacement à Strasbourg ce samedi 23 novembre 2024, le président Emmanuel Macron, qui a également annoncé la panthéonisation de Marc Bloch, a appelé samedi à « reconnaître et enseigner » la tragédie de ces « Malgré nous », comme sont appelés ces Alsaciens et Mosellans incorporés de force par les nazis. « Ces enfants alsaciens et mosellans ont été capturés, vêtus d’un uniforme qu’ils détestaient, au service d’une cause qui en faisait des esclaves, instruments d’un crime qui les tuait aussi, menacés de représailles s’ils tentaient de fuir »a-t-il déclaré dans un discours au palais universitaire de Strasbourg, ajoutant que leur « La tragédie doit être nommée, reconnue et enseignée car elle est celle de la Nation ».
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Une histoire peu connue
Le sort de Malgré Nous a marqué les régions concernées, mais n’occupe pas une grande place dans l’histoire nationale. «C’est un de ces souvenirs qui étaient cachés parce que c’était embarrassant. Après la guerre, la France est dans une période de reconstruction et le fait que des citoyens nationaux aient revêtu l’uniforme allemand est inquiétant, expliquait Christophe Prime, historien au Mémorial de Caen, interrogé en 2022 par Ouest de la France . Ceci est né de beaucoup de malentendus : comme dans le cas des déportés, les gens savaient ce qu’ils avaient vécu et pouvaient en parler entre eux, mais la communication est plus difficile avec les autres, ceux qui n’ont pas été dans la même situation. En plus de cela, il y a une partie de la population qui ne veut pas voir la réalité : pour eux, si vous avez porté l’uniforme allemand, vous êtes un collaborateur. On ressent toujours, chez les descendants des Malgré-nous, une frustration liée à ce manque de reconnaissance. »
Des familles menacées
Mais ces hommes n’avaient pas vraiment le choix. L’armée allemande n’hésite pas à se montrer dure envers les récalcitrants. « Ceux qui ont été capturés ont été envoyés dans un camp de rééducation à Schirmeck (Bas-Rhin). Sinon, c’était leur famille qui partait au camp. Beaucoup de jeunes ne voulaient pas prendre le risque que leurs proches subissent des représailles de leur choix. »dit l’historien du Mémorial.
Une fois l’uniforme allemand enfilé, les Malgré Nous furent envoyés dans les différentes unités. À partir de 1942, ils furent principalement envoyés sur le front de l’Est, pour compenser les lourdes pertes subies par les Waffen-SS lors des combats avec l’Armée rouge. S’ils étaient capturés, ils ne pourraient pas compter sur un traitement préférentiel. « Pour les Soviétiques, lorsque vous faisiez partie des Waffen-SS, que vous soyez Français ou Allemand ne faisait aucune différence et vous étiez sommairement exécutés »indique Christophe Prime.
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