“C’est une attaque contre la démocratie”
“Je pense que la volonté du parquet est de priver les Français de la possibilité de voter pour ceux qu’ils veulent” et de “ruiner le parti”, a réagi Marine Le Pen aux journalistes à la sortie de la salle, tout en lui infligeant une amende de 300 000 euros. a été demandée contre lui. Elle a également fustigé la « violence » et la « démesure » des mises en examen. Jordan Bardella, président du parti d’extrême droite, a vivement réagi sur X. « L’accusation n’est pas dans la justice, elle est dans l’acharnement et la vengeance contre Marine Le Pen. Ses réquisitions scandaleuses visent à priver des millions de Français de leur droit de vote en 2027. C’est une atteinte à la démocratie.»
Le parquet a dépeint mercredi dans son réquisitoire un « système organisé » de détournement de fonds publics au détriment du Parlement européen, avec des « contrats artificiels » d’assistants parlementaires afin de « faire économiser » de l’argent au parti. “Nous ne sommes pas ici aujourd’hui à cause d’un acharnement”, ni à cause d’une dénonciation “du Parlement européen”, mais au terme d'”une longue enquête judiciaire”, a déclaré d’emblée au début du réquisitoire l’un des deux représentants de l’accusation, Louise Neyton. “Vous prendrez votre décision au vu des pièces du dossier”, et après “six semaines d’audience” et “des débats particulièrement approfondis”, a poursuivi le magistrat dans une salle d’audience pleine.
Marine Le Pen, la « donneuse d’ordre »
Tour à tour, tout au long de leurs réquisitions, les deux procureurs ont détaillé mercredi l’architecture d’un « système » qui selon eux a été mis en place au Front national (aujourd’hui Rassemblement national, RN) entre 2004 et 2016, consistant à recruter des « fictifs » Assistants parlementaires européens qui ont effectivement travaillé pour le parti. A l’époque, « le parti se trouvait dans une situation financière particulièrement tendue. Tout ce qui peut contribuer à alléger les charges sera utilisé systématiquement », que ce soit « légal ou non », a affirmé Louise Neyton, tandis que Marine Le Pen hoche vigoureusement la tête « non ».
Le Parlement européen n’effectue que des « contrôles comptables », pour le reste il « fait confiance » aux députés dans l’utilisation de leur dotation mensuelle de 21 000 euros : « Alors, c’est trop tentant, ces enveloppes vont apparaître comme une aubaine et être utilisées comme telles, » a insisté le magistrat. Et ce « système », dit l’accusation, va « se renforcer » avec l’arrivée, en 2011, de Marine Le Pen à la tête du parti, avec un employé chargé de gérer les contrats européens, qui rend compte « uniquement » au président, le « donneur d’ordre ».
En 2014, après l’élection d’une vingtaine d’eurodéputés FN, le trésorier du parti, Wallerand de Saint-Just, écrivait : « On ne s’en sortira que si on fait des économies significatives grâce au Parlement européen », rappelait le procureur. Et de citer les mails – « pas tous, il y en a trop » – parlant de « modalités financières », de « transferts » d’un assistant particulier « à » tel député en fonction de la disponibilité des enveloppes. L’un ou l’autre, « vous pouvez choisir », est-il écrit dans un message.
Le Parlement réclame 3,4 millions d’euros
Face à « la fiction alternative » proposée en défense, les procureurs entrent alors longuement dans les détails de l’affaire. Défendus par accusés et contrat par contrat, ils décortiquent pour chacun « la nature du travail » effectué par les 12 assistants parlementaires, le « lien de subordination » qu’ils entretiennent avec « leur député européen » – dont neuf sont Marine Le Pen. jugé au total, pour détournement de fonds publics.
Avec une observation générale. Comme preuve de travail, « il n’y a rien », sauf « la fameuse preuve standard : la revue de presse ». Des contrats de travail ? “Artificiel”, sans “cohérence” – “on est très content de quelqu’un mais on s’en sépare, puis on le reprend”, commente Nicolas Barret. “Des déclarations à géométrie variable”, voire “n’importe quoi”, résume Louise Neyton.
Le Parlement européen a estimé son préjudice financier à 4,5 millions d’euros, mais n’en a réclamé que 3,4 millions (une partie ayant été remboursée).
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