« Une situation inacceptable. » Le chef de la diplomatie française, Jean-Noël Barrot, en déplacement à Jérusalem, n’a pas mâché ses mots après un incident survenu en marge de sa visite prévue à Eléona jeudi. Les forces de sécurité israéliennes y sont entrées « armées, sans obtenir au préalable l’autorisation de la France et sans accepter de sortir », affirme-t-il.
Deux gendarmes français qui assuraient la sécurité du ministre des Affaires étrangères ont été brièvement interpellés à l’intérieur du site, qui fait pourtant partie du domaine national français.
La France est la seule puissance étrangère à posséder quatre sites dits « domaines nationaux » à Jérusalem, fruits d’un long héritage historique. Outre le site d’Eléona, dans lequel la police israélienne est entrée jeudi, se trouvent le Tombeau des Rois, le domaine de Sainte-Anne et le monastère d’Abou Gosh.
L’éléphant
Propriété de la France depuis le XIXème siècle, le domaine national d’Eléona est situé sur le Mont des Oliviers à Jérusalem-Est, partie palestinienne de la ville occupée et annexée par Israël depuis 1967.
Le site a été construit sur la grotte dite du « Pater », où le Christ, selon la tradition chrétienne, enseignait la prière du « Notre Père » (notre pèreen latin) à ses disciples. Une basilique, aujourd’hui en ruines, y fut construite par Hélène, la mère de l’empereur Constantin, au IVe siècle.
Longtemps interdit d’accès aux chrétiens, le domaine fut acheté en 1856 par Aurélie de la Tour d’Auvergne qui fit construire un cloître au-dessus de la grotte par Viollet-le-Duc. Elle en fit don à la France en 1874. Les carmélites y vivent depuis 1873 sous protection diplomatique française. Bénéficiant d’une vue exceptionnelle sur la Vieille Ville, le quartier attire de nombreux touristes et pèlerins.
Le Tombeau des Rois
Longtemps considéré à tort comme le tombeau des rois de Judée, le Tombeau des Rois correspond plus probablement au mausolée d’Hélène d’Adiabène, reine juive du Ier siècle enterrée avec une trentaine de notables. Le site souterrain, également situé dans la zone contestée de Jérusalem-Est, est accessible par un escalier monumental creusé dans la pierre qui descend jusqu’à une vaste grotte où se trouvent plusieurs sarcophages, dont certains ont été transportés au Louvre.
Fouillé en 1863 par des archéologues français, le Tombeau fut acheté par les frères Péreire, banquiers juifs français, qui le cédèrent à la France en 1886 pour « le conserver pour la science et la vénération des fidèles enfants d’Israël ».
Les juifs ultra-orthodoxes contestent toujours ce droit de propriété. Ils se réunissent régulièrement devant le portail pour obtenir le droit d’entrer et de prier sur ce lieu vénéré. Le lieu a rouvert en 2019 après dix ans de travaux financés par la France.
Église Sainte-Anne
Située dans la vieille ville de Jérusalem, l’église Sainte-Anne se trouve à deux pas de la porte Saint-Étienne, également appelée porte des Lions. Le bâtiment original, de style roman, a été construit par les croisés au XIIe siècle sur l’emplacement supposé de la maison des parents de la Vierge (dont la mère s’appelait Anne), juste à côté de la piscine de Bethesda, où, selon les Évangiles , le Christ guérit un homme paralysé.
Transformée en école coranique après la chute du royaume latin de Jérusalem en 1291, elle fut offerte à la France en 1856 par le sultan ottoman pour remercier Napoléon III de son intervention contre les Russes lors de la guerre de Crimée.
Elle est gérée depuis 1878 par les « Pères Blancs », communauté de prêtres missionnaires au Maghreb et en Afrique subsaharienne, chargés du dialogue avec les Églises orientales présentes à Jérusalem.
En 2020, Emmanuel Macron a ordonné aux policiers israéliens de quitter la zone après avoir attaqué des forces de l’ordre françaises. L’incident le plus célèbre reste celui de 1996, lorsque Jacques Chirac s’est emporté contre les soldats israéliens qui l’entouraient de trop près, avant d’exiger leur expulsion de la zone.
Monastère d’Abou Gosh
Situé à une dizaine de kilomètres à l’ouest de Jérusalem dans un village musulman israélien, le monastère d’Abou Gosh abrite depuis 1976 des moines et des moniales bénédictins. Cette ancienne commanderie a été construite au XIIe siècle par l’Ordre des Hospitaliers pour les pèlerins qui s’y arrêtaient avant de partir. jusqu’à Jérusalem. Le monastère possède également une chapelle romane ornée de superbes fresques byzantines.
Elle fut donnée à la France par le sultan Abdulaziz en 1873 pour compenser la prise de l’église Saint-Georges de Lydda par les Grecs orthodoxes.
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