Kamala Harris, le 5 novembre 2024 à Washington (AFP / Brendan SMIALOWSKI)
Le poids écrasant des thèmes de l’immigration et de l’inflation, le vote pro-Trump des électeurs masculins, noirs ou latinos, une entrée en campagne trop tardive et pas suffisamment éloignée de Joe Biden : voici les raisons cruciales expliquant la défaite de Kamala Harris.
– Le lourd impact de l’économie
« L’économie, stupide » : telle est la célèbre citation entrée dans l’histoire du stratège en chef de Bill Clinton, Jim Carville, pour expliquer la victoire du président démocrate en 1992.
Trente ans plus tard, l’inflation post-pandémique et les prix élevés de l’essence et des produits de première nécessité ont gravement porté atteinte à la candidature de Kamala Harris et au bilan du président Joe Biden, contre lequel Donald Trump n’a cessé de s’opposer.
“L’inflation a joué un rôle important” parmi d’autres éléments, comme l’immigration, souligne Bernard Yaros, économiste pour Oxford Economics. Et, dit-il à l’AFP, même si “l’inflation a ralenti, cela ne semble pas avoir profité au parti au pouvoir”.
– L’« échec » sur l’immigration
Le président élu Donald Trump n’a cessé de dénoncer tout au long de sa campagne l’immigration clandestine de millions de « criminels », qu’il a promis d’expulser massivement.
Un discours qui a fait mouche auprès de sa base électorale, qu’il a même élargie : Carl Tobias, professeur de droit à l’université de Richmond, estime que « l’immigration a clairement été un facteur dans la victoire de Trump, une question sur laquelle il insiste depuis sa campagne de 2016 ». avec ses discours au mur, l’invasion et les menaces sur les emplois américains.
D’autant que le candidat républicain a fustigé « l’échec » de Kamala Harris qui était chargée comme vice-présidente de la politique migratoire aux Etats-Unis mais qu’il a dénoncé comme une politique « frontalière ». ouvert » avec le Mexique.
– Une nouvelle démographie électorale
Selon deux grands sondages à la sortie des urnes d’Edison Research et de CNN, le soutien des Afro-Américains à Donald Trump est passé de 8 % à 13 % entre 2020 et 2024, et de 32 % à 45 % chez les Latinos. . Un signe inquiétant pour les démocrates de l’évolution démographique de leur base.
Selon Roberto Suro, professeur à l’Université de Californie du Sud, « il y a eu un mouvement constant vers Trump, élection après élection, parmi les hommes mexicains-américains, évangéliques (chrétiens), sans diplôme universitaire, et parmi les gens de la classe ouvrière. .» élections », notamment parce qu’ils sont traditionnellement conservateurs sur les questions sociales.
Et contre toute attente, Donald Trump a fait mieux qu’en 2020 auprès des femmes – malgré la mobilisation sur l’avortement – et de la jeunesse.
Pour Hillary Mouafong, 21 ans, étudiante afro-américaine en informatique à la Georgia State University qui a voté pour Harris, cette dernière « comptait sur le vote afro-américain qui, au final, l’a laissée tomber ».
« Beaucoup de gens ne sont pas allés voter, surtout beaucoup de jeunes », a-t-elle déclaré.
– Arriver trop tard dans la campagne
En annonçant, en avril 2023, son intention de se présenter à la Maison Blanche, Joe Biden avait déjà suscité à l’époque des réserves chez de nombreux démocrates.
Mais les ténors du parti ont choisi de garder le silence et de s’aligner derrière la deuxième candidature du président octogénaire, niant mois après mois les signes évidents du déclin de celui qui prétendait être le seul à pouvoir battre Donald Trump.
Donald Trump lors d’un rassemblement électoral à Grand Rapids, Michigan, États-Unis, le 5 novembre 2024 (AFP / KAMIL KRZACZYNSKI)
Lorsqu’il fallut remplacer Joe Biden en urgence, en juillet 2024, Kamala Harris n’avait plus que trois mois pour rattraper son déficit de notoriété et dissiper l’impression qu’elle n’avait pas vraiment eu le temps de se préparer. un programme gouvernemental.
« Ce désastre démocrate est en grande partie imputable à Joe Biden. Il n’aurait jamais dû tenter de se présenter à nouveau à l’âge de 80 ans, laissant finalement Harris gérer une courte campagne de substitution qui s’est avérée insuffisante », résume Larry Sabato, politologue à l’Université de Virginie.
– Sa difficulté à se différencier de Biden
Les Américains ont massivement rejeté la présidence de Joe Biden, et Kamala Harris s’est différenciée bien trop tard du président, particulièrement impopulaire sur les thèmes de l’économie et de l’immigration, voire critiquée pour son soutien à Israël.
La vice-présidente s’est retrouvée coincée le 8 octobre, sur un plateau d’ABC, lorsqu’on lui a demandé si elle aurait agi différemment de Joe Biden durant les quatre dernières années. Après un moment d’hésitation, elle a répondu : « Rien de spécial ne me vient à l’esprit. »
Cet échange s’est avéré “désastreux” pour le candidat démocrate, a déclaré mercredi sur CNN David Axelrod, ancien conseiller de Barack Obama.
Donald Trump ne s’y est pas trompé : à chacun de ses meetings électoraux, il a projeté ce moment décisif sur grand écran, qu’il a d’ailleurs exploité à l’extrême dans ses clips de campagne.
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