News Day FR

« Les Allemands se barricadent derrière les normes »

Ce mercredi 23 octobre, cela fera neuf ans qu’a eu lieu l’accident de Puisseguin. Depuis neuf ans, les familles et amis des 43 victimes espèrent une réponse de la justice sur les responsabilités qui, cumulativement, ont permis à ce bus de prendre si vite feu, après avoir heurté une semi-remorque en portefeuille, à la sortie d’un virage de la RD 17. Neuf années d’un ascenseur émotionnel qui, de la prononciation d’un non-lieu en 2021 au nouvel espoir d’un procès, impacte les cœurs déjà meurtris des personnes rassemblées au sein du Collectif des victimes de Puisseguin, présidé depuis 2023 par Dany Gauvin. Suite à la réouverture du dossier par la cour d’appel de Bordeaux en mars 2023, les investigations et les audiences ont repris. A quelques jours de cette date anniversaire désastreuse, Dany Gauvin évoque les dernières avancées de la justice.

Lors des premières auditions, l’entreprise de camionnage a fait usage de son droit au silence et le garage qui avait installé le réservoir supplémentaire ne s’est pas présenté. Que s’est-il passé depuis ?

Ils ont été interviewés en juin et ont finalement accepté de répondre aux questions. Le patron de l’entreprise Alexandre explique qu’il a déjà fait installer un tel réservoir sur un autre camion d’une autre marque et qu’il a fait confiance au garage. Le garage explique que c’est la première fois qu’il réalise une telle installation et qu’il a suivi les instructions du client. Il dit également avoir fait confiance au fabricant qui lui a délivré un certificat de conformité sans émettre de consignes ni de contre-indications. En gros, tout le monde fait confiance et personne ne vérifie. Le garage aurait pu au moins se renseigner, surtout quand on ne connaît pas les normes et qu’on fait quelque chose pour la première fois. Oui, le camion était aux normes et le char aussi, c’est l’assemblage des deux qui est hors norme.

Et qu’en est-il du constructeur automobile Mercedes en Allemagne ?

Là aussi, les choses ont avancé. Ils ont trouvé un responsable actuel en qui, par email, transmet toutes les questions au spécialiste Daimler Buses (la société mère du constructeur). Même s’il n’était pas incriminé, alors qu’il y avait tant de morts, il aurait au moins pu fournir des informations. Je trouve son attitude légère et décontractée. Côté Allemagne et design, le responsable du développement de l’époque répondait par mail « respect des normes ». Il y a eu également l’audition d’un témoin assisté : la personne responsable du développement et des tests. Ce qui nous intéresse, c’est le choix du constructeur de ne pas réaliser les tests optionnels sur les collisions frontales. Il n’a pas répondu à cette question, il a seulement décrit ce qui avait été fait. Quant à l’avocat de Daimler, il estime que ces épreuves facultatives ne concernent pas les entraîneurs. Ce dont nos avocats doutent, qui clarifiera ce point.

On revient toujours à une histoire de normes…

Il est clair que les Allemands se barricadent derrière les normes. Mais nos avocats nous expliquent qu’en réalité, pour le choix des matériaux intérieurs des cabines, point crucial selon eux, il n’y en a pas pour les autocars. Il y en a dans les trains, les bateaux, les avions mais pas dans les autocars. D’un autre côté, il existe des recommandations dans les revues d’ingénierie. Depuis des décennies, des articles ont été publiés dans ces magazines sur le danger très élevé de ces matériaux face au risque d’incendie. Une presse internationale spécialisée qu’ils ne sont pas censés ignorer selon nos avocats. Et en France, c’est un risque dénoncé noir sur blanc depuis l’accident de Beaune de 1982. Nos avocats insisteront fortement sur ce point.

Quel est votre sentiment suite à ces nouvelles avancées ?

Ce dont je me souviens, c’est un manque d’empathie du côté allemand. Toutes les audiences côté camion se terminent par un mot de compassion pour les familles. Quelque chose que je n’ai absolument pas vu chez Daimler.

Quelles sont les prochaines étapes ?

Nous ne le savons pas. Ce que l’on voit dans le dossier, ce sont les points complétés. On ne sait pas ce que font les juges d’instruction et ce qu’ils comptent faire. Après en avoir discuté, nos avocats demanderont certainement des documents pour approfondir certains points.

L’année prochaine, cela fera dix ans…

Oui, et nous n’avons peut-être même pas terminé l’aspect juridique. Nous espérons toujours progresser en termes de sécurité. Nous n’allons pas attendre passivement que la machine judiciaire fasse son travail. Nous essayons également de faire progresser ces fameuses normes. Que les autocars bénéficient des mêmes normes de sécurité que les autres modes de transports publics.

 
For Latest Updates Follow us on Google News
 

Related News :