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La justice européenne bouscule les règles de transfert en résolvant l’affaire Diarra

A la demande de la justice belge, la haute juridiction établie à Luxembourg a examiné le cas de l’ancien international français Lassana Diarra qui avait contesté, il y a dix ans, les conditions de son départ du Lokomotiv Moscou.

En raison d’une réduction drastique de son salaire, Diarra a quitté le club moscovite, mais ce dernier a jugé la rupture injuste et lui a demandé 20 millions d’euros, ramenés à 10,5 millions d’euros.

Conséquence : le club belge de Charleroi a finalement renoncé à recruter le Français de peur de devoir assumer une partie de ces sanctions, conformément au règlement FIFA étudié par la CJUE.

Ces règles « sont de nature à entraver la liberté de circulation des footballeurs professionnels », a jugé vendredi la Cour.

Le tribunal estime qu’ils « font peser sur ces joueurs et sur les clubs souhaitant les engager des risques juridiques importants, des risques financiers imprévisibles et potentiellement très élevés ainsi que des risques sportifs majeurs, qui, ensemble, sont de nature à gêner le transfert international des joueurs ». .

« Rémunération disproportionnée »

“C’est toute la logique économique du marché des transferts qui est aujourd’hui mise à mal”, a déclaré à l’AFP Pieter Paepe, l’avocat de la Fifpro, le syndicat international des joueurs.

“Le Tribunal ne dit pas que les joueurs ont le droit de résilier leur contrat sans aucune conséquence, mais que l’indemnisation est disproportionnée et que le montant du transfert non amorti ne peut être inclus”, comme le demande le Lokomotiv. Diarra, ajoute l’avocat belge, qui défend également l’UNFP, le syndicat des joueurs français.

« La Fifa prévoit aussi une sanction sportive contre le joueur, et celle-ci est également disproportionnée pour la CJUE », ajoute Me Paepe.

L’ancien milieu de terrain français Lassana Diarra aux Trophées UNFP à Paris, le 28 mai 2023 AFP/Archives / Bertrand GUAY.

Ces règles contestées « visent à restreindre, voire empêcher, la concurrence transfrontalière à laquelle pourraient se livrer tous les clubs de football professionnels établis dans l’Union », estime la CJUE dans son arrêt.

Une question préjudicielle lui avait été posée par la cour d’appel de Mons, Diarra ayant d’abord porté l’affaire devant les tribunaux belges.

La CJUE le rend désormais, après avoir dit le droit européen : « Sous réserve de vérification » par cette cour d’appel belge, ces règles de la Fifa restreignant la concurrence « ne semblent ni essentielles ni nécessaires ».

“Seulement deux paragraphes”

L’avocat belge Jean-Louis Dupont, qui défend le joueur français de 39 ans, aujourd’hui à la retraite, s’est félicité de cette “décision majeure pour la régulation du marché du travail dans le football”.

M. Dupont était déjà à l’oeuvre il y a trente ans avec le Belge Jean-Marc Bosman, à l’origine du jugement de 1995 qui porte son nom et mettant fin aux quotas de joueurs étrangers dans un club, une révolution à l’époque.

Si l’avocat s’est d’abord réjoui dans son communiqué à destination de son client – ​​« Pour Lassana Diarra, c’est une victoire totale », il enjoint « à tous les joueurs professionnels qui ont été concernés par ces règles illégales (en vigueur depuis 2001) » de « demander pleinement réparation de leurs dommages ».

La Fifa n’a pas la même lecture, “satisfaite que la légalité des principes clés du système de transfert ait été reconfirmée”.

Elle « ne remet en cause que deux paragraphes de deux articles du règlement de la Fifa sur le statut et le transfert des joueurs », estime la Fédération internationale.

Pour la Fifa, le jugement ne révolutionne pas son système de transfert, mais lui demande seulement de revoir une règle : pour le moment, un club qui souhaiterait recruter un joueur ayant rompu son contrat est tenu de répondre de l’amende encourue. , un point que la Fédération internationale semble prête à modifier.

L’arrêt de la CJUE pourrait cependant avoir des conséquences bien plus importantes selon l’avocat britannique Ian Giles, du cabinet d’avocats Norton Rose Fulbright.

“Il est tout à fait possible que cela signifie que les joueurs ont le sentiment qu’ils peuvent désormais rompre leur contrat et signer avec de nouveaux clubs, sans que le club vendeur puisse les conserver ou exiger des indemnités de transfert importantes”, explique-t-il.

Et l’affaire Lassana Diarra pourrait alors devenir « l’affaire Bosman 2.0 », comme l’a estimé Jean-Louis Dupont, l’avocat des deux joueurs.

 
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