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folie à deux… Les films à voir cette semaine ou pas

Deux amis retraités face à leur passé trouble, une jeune femme alcoolique qui veut s’en sortir, Joaquin Phoenix et Lady Gaga réunis pour le retour du Joker…La sélection cinéma de Figaro.

Quand l’automne arrive – Avoir

Comédie dramatique de François Ozon, 1h42

Quand l’automne arrive met en scène deux femmes et deux interprètes qui arrivent avec leurs expériences, leurs rides, leur corps vieillissant et leur désillusion face à la vie. Michelle et Marie-Claude sont deux amies de longue date, retraitées dans un village de Bourgogne à la routine agréable. La première est interprétée par Hélène Vincent, merveilleuse dans le rôle de Grand-mère Cake, coquette et pimpante dans sa doudoune rose, inquiète et inquiétante en un clin d’œil. La seconde est incarnée par Josiane Balasko, impeccable en amie battue et fumeuse, qui traîne sa carcasse comme une balle. Leur progéniture fera remonter leur passé à la surface. Michelle a une fille, Valérie, qui vit à Paris. Elle a désespérément envie de lui rendre visite, notamment pour profiter de son petit-fils, Lucas, qu’elle aime désespérément. Quand les retrouvailles arrivent enfin, l’ambiance n’est pas à la fête. Valérie (Ludivine Sagnier), en plein divorce, est encore plus odieuse que d’habitude. Une fille à battre, sûrement. Tuer, probablement pas. Elle est la seule à manger les champignons vénéneux pendant le repas. Elle s’en sort avec un lavage gastrique et rentre à Paris avec des soupçons. Des vertiges dus à la vieillesse ou à une tentative d’empoisonnement ? Marie-Claude a un fils, Vincent. Il sort de prison et promet d’arrêter les « bêtises ». Pour lui rendre service, Michelle lui fait faire des petits boulots. Un bel élan de solidarité intergénérationnelle. Nous n’en dirons pas plus, au risque de gâcher le travail de François Ozon en apportant des ellipses et des surprises et le plaisir du spectateur à se laisser promener. Quand l’automne arrive on dirait le titre d’une chanson d’Aznavour. C’est une chanson de François Valéry qu’on entend dans une scène de bar : Aimons-nous vivants. Il n’y a rien d’innocent dans ce choix. C’est peut-être même plutôt ironique et amoral. ES

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Tout ce que nous imaginons comme lumière – Avoir

Drame de Payal Kapadia, 1h58

Mumbai (Bombay) rugit sous les rideaux de pluie. A l’hôpital, c’est une hémorragie. Les patients arrivent par vagues incessantes. Les infirmières font ce qu’elles peuvent pour prodiguer les premiers soins. Parmi eux, Prabha, l’une des trois héroïnes de Tout ce que nous imaginons comme lumièrele premier long métrage de fiction du réalisateur indien Payal Kapadia, qui a remporté le grand prix au dernier Festival de Cannes. Le réalisateur explore avec délicatesse les destins croisés de trois femmes hindoues dans l’Inde d’aujourd’hui. Prabha est donc une infirmière d’une trentaine d’années discrète, très dévouée à ses patients. Elle partage un appartement en colocation avec la jeune Anu, également infirmière, mais qui, à 23 ans, affiche une insouciance naïve tout en se pensant moderne et libérée. Alors que Prabha accepte un mariage forcé avec un homme qui l’abandonne rapidement pour aller travailler en Allemagne, Anu noue une relation amoureuse passionnée avec un charmant jeune homme. Un jour, Prabha reçoit un mystérieux colis qui contient une cocotte minute rouge « made in Germany ». Soudain, le souvenir de son mari fantôme refait surface. L’héroïne prend conscience de sa solitude. Petit à petit, les deux femmes commencent à se connaître malgré leur différence d’âge. Leurs amours entravés les rapprochent. A l’hôpital, un troisième voleur rejoint bientôt le duo. Parvaty est veuve. Plus âgée, elle est à la fois plus sage et plus rebelle que les deux autres. Mais elle est menacée d’expulsion par des promoteurs immobiliers qui veulent raser son immeuble. L’alchimie opère dans ce trio de trois générations différentes. On s’attache vite au destin contrarié de ces personnages filmés avec empathie. À la limite de la fable, cette œuvre captivante, féministe sans le revendiquer, scrute le cœur des femmes, mettant joliment en lumière leurs envies d’échapper aux diktats d’un patriarcat encore très ancré dans la société indienne. DO

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Le dépassementAvoir

Drame de Nora Fingsheidt, 1h58

Il semble. Là, les noyés se transforment en phoques. C’est du moins ce que prétend une légende écossaise. D’autres rêves traversent l’esprit de Rona. A 30 ans, cette jeune femme s’est réfugiée dans les Orcades, les îles où elle a grandi. Elle fuit Londres et une forte dépendance à l’alcool. Il était temps. C’était ça ou mourir. Elle n’a pas hésité. Le dépassement de la réalisatrice allemande Nora Fing Scheidt, est construit comme un puzzle. Les souvenirs de la ville reviennent par éclats, comme des hoquets, ponctués d’une voix off. Il y avait les soirées bien arrosées, ces rires bêtes, ces pubs où les tournées finissaient mal. Elle s’est réveillée dans une sorte de coma, en vomissant dans les toilettes. Son petit ami n’en pouvait plus. Elle se cognait contre les fenêtres. Il s’agissait de plonger dans l’inconscience. Il y a donc eu les séances avec les Alcooliques anonymes – et ce retour dans sa terre natale battue par les vagues.
La terre vibre. Le vent ne se repose jamais. Au régime sec, Rona s’occupe des moutons, jetant les agneaux mort-nés à la poubelle. Une tempête les isole du reste du monde. Le père, bipolaire, vit dans une caravane. Sa mère a été obligée de le quitter, s’est plongée dans la foi. L’héroïne se demande de qui elle a hérité. Elle n’est plus cette fêtarde qui titubait sur les trottoirs. En salopette, elle tente de réparer les dégâts. Et si l’ivresse appartenait au passé ? Intelligence et poésie vont ici de pair. Cette histoire d’addiction, inspirée du livre d’Amy Liptrot, qui a participé au scénario, évite les écueils, épargne les pleurnicheries et les remords. Il faut dire que la prestation de Saoirse Ronan mérite tous les éloges. FR

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DroneAvoir

Thriller de Simon Bouisson, 1h50

Le spectateur entre dans le film comme par effraction. Dans un glissement séduisant, l’œil de la caméra se dirige vers le quinzième étage d’un immeuble périphérique. On perçoit distinctement le rugissement intrigant de ce drone qui se plante devant les baies vitrées de l’appartement de la jeune héroïne. La séquence est orwellienne. Qui peut l’observer sans bruit ? Et pourquoi ? Les protagonistes se regardent. Entre ces deux-là commence une relation singulière, à la limite de la persécution et du contrôle. Est-ce réel ? Émilie (Marion Barbeau) commence par douter de ce qui lui arrive. Le jour, cet étudiant en architecture introverti doit soumettre des plans de réhabilitation de bâtiments patrimoniaux à un maître exigeant (Cédric Khan). Et elle est attaquée par un camarade sans vergogne. Le soir, la jeune femme solitaire et sans le sou s’exhibe sur internet pour financer ses études. Plus elle tente d’échapper à son mystérieux harceleur aérien, plus cet objet s’immisce dans son existence. Le thriller paranoïaque digne des années 1970-80 commence. Pour son premier film, Simon Bouisson voit grand. Après avoir réalisé des séries, Tigeou 36 15 Monique le réalisateur de 39 ans investit le techno-thriller anxiogène, avec un « polar » numérique, ambitieux, malin et même assez effrayant. DO

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Joker : la folie à deux– A éviter

Action de Todd Phillips, 2h19

En 2019, Todd Philipps se considère comme un auteur sérieux en filmant un clown. Artiste hollywoodien jusqu’ici inoffensif, réalisateur de Très mauvais voyage 1, 2, et 3 Philipps tente une partie de poker avec Joker .Et ça marche. Le film a remporté le Lion d’Or à la Mostra de Venise avant de rapporter plus d’un milliard de dollars de recettes au box-office international. Joaquin Phoenix perd 23 kg et remporte un Oscar pour son interprétation d’Arthur Fleck, un outsider qui vit seul avec sa mère dans un appartement très triste, un humoriste raté dans un Gotham qui ressemble fortement au New York criminogène des années 1970 et Années 1980. Joker est un savant pastiche des films de Scorsese et Lumet de cette époque (Chauffeur de taxi, La Valse des marionnettes, Un après-midi de chien, Réseau ). Joker, parabole fourre-tout et simpliste, séduit le plus grand nombre par sa noirceur nihiliste. Nous souhaitons du courage aux exégètes tentés de lire Joker : folie à deux, dévoilé en compétition à Venise début septembre, autre chose qu’une reprise du premier volet. Arthur Fleck croupit en prison, en attente de son procès. Abasourdi par les médicaments, il a des entretiens avec son avocat et un psychiatre. Le gardien de prison Sullivan (Brendan Gleeson), mélomane, inscrit le détenu modèle dans la chorale. C’est le coup de foudre pour Harley Quinn, incarnée par Lady Gaga, sans son costume de super-méchante arlequin noir et rouge – sans regretter la version punk proposée par Margot Robbie. Joker, nez rouge et fleur bleue, fait la navette entre le tribunal et la prison et c’est partout la même chanson : l’accusé histrionique sous l’œil des caméras, son cercle d’admirateurs s’agrandit. Des numéros musicaux servent d’interludes. Joaquin Phoenix et Lady Gaga chantent de manière volontairement approximative. On dirait la version prison et blues de La La terre,moins les compositions de Justin Hurwitz et le dynamisme de Damien Chazelle. D’ailleurs, la vision de la maladie mentale dépasse la caricature. ES

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