Discours de politique générale : Bayrou ignore le climat

1,9 %, soit un peu plus d’une minute. C’est le fragment donné par François Bayrou à la question écologique, dans son interminable grand oral. Le 14 janvier, le Premier ministre de 73 ans s’est retrouvé face à l’hémicycle de l’Assemblée nationale, pour le traditionnel discours de politique générale. Une tirade de près de 90 minutes, sans jamais évoquer le défi de XXIe siècle : la crise climatique.

« Il existe d’innombrables préoccupations» entonna le maire de Pau depuis la tribune du Palais Bourbon, mais il y en a un qui émerge avec une force flagrante. » Lequel ? Celle du surendettement de la . Ce « épée de Damoclès »ce qui n’a jamais été tel « depuis la guerre »» a obsédé François Bayrou au début de son discours.

Le locataire de l’hôtel de Matignon a alors assumé un ordre protocolaire bouleversé, à l’image de ses priorités. L’éducation, première place. À l’étranger, deuxièmement. La sécurité, avec Gérald Darmanin au ministre de la Justice et Bruno Retailleau à l’Intérieur, troisième. « Cinquante minutes de discours, et toujours pas un mot sur l’écologie »s’est alarmée Marine Tondelier, secrétaire nationale des Écologistes, sur le réseau social Bluesky.

Yaël Braun-Pivet, présidente de l’Assemblée nationale, et François Bayrou, le 14 janvier.
© NnoMan Cadoret / Reporterre

Un thème que le leader du Modem a fini par évoquer après 1h06 d’errance. Comme Élisabeth Borne, Gabriel Attal et Michel Barnier avant lui, François Bayrou est néanmoins responsable de la planification écologique et énergétique. Mais pas de panique : à ses yeux, la France a déjà commencé à s’emparer de ce sujet crucial, « mieux et plus que n’importe quel autre pays au monde ».

Une ardente obligation que les Béarnais ont promis – en 1 minute 40 – de poursuivre. Notamment en finalisant la stratégie bas carbone, en préservant la biodiversité et en produisant de manière décarbonée grâce aux nouvelles technologies. Il a décrit l’énergie nucléaire et l’énergie géothermique comme« axe essentiel » — sans parler des énergies renouvelables — et a déclaré « prendre possession » la question de l’eau, à travers une grande conférence nationale organisée au niveau régional.

L’aficionado présidentiel du Falcon a clôturé cette courte parenthèse écologiste en certifiant qu’il garde un oeil attentif sur la question de la mobilité adaptée, « l’hydrogène pour le cyclisme ».

La crise climatique jetée aux oubliettes

« Les agriculteurs, les paysans, le monde dont je viens, avaient jusqu’à récemment la certitude d’être les meilleurs connaisseurs et défenseurs de la nature.a poursuivi le Premier ministre devant la chambre basse. Aujourd’hui, ils sont accusés de nuire à la nature. Et c’est une blessure profonde. » Les mêmes éléments de langage que ceux répétés par l’union des FNSEAestimé avec leAFP Antoine Gatet, president of France Nature Environnement.

Plus marquante encore pour lui, cette attaque « inacceptable » contre des agents de l’Office français de la biodiversité : « Quand [ils] venir inspecter des fossés ou des points d’eau avec une arme au ceinturon, dans une exploitation déjà mise à rude épreuve par la crise, c’est une humiliation »a scandé François Bayrou. Avant de reprendre le refrain des normes environnementales françaises qui ne seraient pas imposées à nos voisins.

« Aucune référence n’est faite aux travaux du GIEC »

A 16h29, la star du jour descendait de son piédestal. La crise climatique a été oubliée. « Aucune référence n’est faite aux travaux du GIEC, au franchissement du seuil de +1,5°C pour 2024. Pas un mot sur les mégaincendies qui ravagent Los Angeles, et même Mayotte n’est évoquée que pour l’immigration. »a déclaré Jean-François Julliard.

Le directeur de Greenpeace France a également dénoncé une vision productiviste et techno-solutionniste de la lutte contre le changement climatique, le Premier ministre s’étant d’ailleurs réjoui que « La Silicon Valley déroule ses tapis rouges à nos ingénieurs en numérique et en intelligence artificielle ».

La gauche prête à censurer

Bégayant, se perdant dans ses notes et s’excusant de devoir encore le faire « apprendre le métier »François Bayrou a tenté de plaider pour la réconciliation nationale : « Comme à l’heure où le sort même de notre nation est en cause, l’intérêt général nous impose de dépasser les préférences partisanes pour que le pays puisse se ressaisir. »

Cependant, aussitôt l’exercice terminé, un défilé d’orateurs mécontents s’est formé sur la tribune. « Nous ne nous attendions pas à grand chose, mais nous avons quand même été déçus.began the communist Stéphane Peu. Votre tâche n’a pas été facile, puisque votre gouvernement est le produit de l’aveuglement du Président de la République, de son refus de voir et d’admettre le vote des Français. »


« Nous n’aurons d’autre choix que de continuer à vous censurer », a déclaré Cyrielle Chatelain, la présidente des Écologistes.
© NnoMan Cadoret / Reporterre

Les écologistes réclamaient que 7 milliards d’euros soient consacrés à la transition. « Tant que vous persisterez à ne rien changer, nous n’aurons d’autre choix que de continuer à vous censurer. », a déclaré Cyrielle Chatelain, la présidente du groupe. Une menace aussitôt réitérée par l’Insoumise, Mathilde Panot : « Plus tôt vous partirez, mieux ce sera. »

Le PS ne veut pas pas de portefeuille ministériel »

Restait à observer les réactions des socialistes. Quelques heures plus tôt, Olivier Faure, leur premier secrétaire, faisait allusion à un potentiel accord de non-censure avec Matignon. « Nous restons dans l’oppositiona finalement assuré Boris Vallaud, président des députés PS. Nous ne voulons pas de portefeuille ministériel et nous refusons les stratagèmes et les rapprochements. Nous ne vous rejoignons pas. »

Un claquement de porte trop tard aux yeux de Jean-Luc Mélenchon, qui accuse Olivier Faure et ses camarades d’avoir mis le Nouveau Front populaire « par terre » en négociant avec François Bayrou : « Les concessions accordées aux socialistes sont tellement grotesques, nous leur laisserons le plaisir de vous expliquer en quoi cela consiste »il a plaisanté.

En décembre 2024, Michel Barnier est renversé, trois mois seulement après son entrée en fonction. Du jamais vu depuis 1962. François Bayrou sera-t-il encore plus éphémère ? ? Comme ses trois prédécesseurs, le maire de Pau a refusé le traditionnel vote de confiance, censé ponctuer le discours de politique générale.

En réponse, les Insoumis ont déposé une motion de censure. Cela devrait être examiné le 16 ou le 17 janvier. Pour l’instant, le Premier ministre joue à l’autodérision : « 84 % des Français jugent apparemment que le gouvernement ne passera pas l’année, et je me demande même où est le 16 % restant trouvent la source de leur optimisme ? »

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