Depuis Syngman Rhee, premier président de la Corée du Sud élu en 1948, pas moins de sept présidents de l’île ont été inculpés par la justice.
Il n’y a que Moon Jae-in (2017-2022), Kim Young-sam (1993-1998) et le prix Nobel de la paix Kim Dae-jung (1998-2003), artisan d’un rapprochement avec la Corée du Nord, à avoir exercé pacifiquement et accompli leur mandat. Même si ce dernier fut encore condamné à mort pour sédition en 1980, sous le dictateur Chun Doo-hwan, auquel il s’opposa avant d’être autorisé à s’exiler aux Etats-Unis.
À ces exceptions près, presque tous les présidents sud-coréens ont connu un sort désastreux. Jusqu’à ce que le président Yoon Suk Yeol, au pouvoir depuis 2022, soit destitué samedi 14 décembre par le parlement sud-coréen. Le Parlement venait de le sanctionner pour une tentative ratée d’imposer la loi martiale et avait envoyé l’armée au Parlement pour le museler la semaine précédente.
Élections truquées et coup d’État
Le destin désastreux des chefs d’État sud-coréens commence avec le premier d’entre eux, Syngman Rhee, élu en 1948. En 1960, il est contraint à la démission par une insurrection populaire menée par les étudiants, après avoir tenté de prolonger son mandat par des élections truquées. Il s’exile ensuite à Hawaï (États-Unis), où il meurt cinq ans plus tard, en 1965. Quelques mois à peine après son départ, son successeur, le président Yoon Bo-sun, est également renversé, cette fois par un coup d’État mené par le général Park Chung-hee, père du futur président Park Geun-hye. Le président déchu sera maintenu provisoirement à son poste, puis remplacé en 1962.
Mais le sort persiste : le général Park Chung, qui exerce alors le pouvoir, est tué d’une balle dans la tête en octobre 1979 par son principal officier du renseignement après un banquet, après avoir échappé, onze ans plus tôt, à une tentative d’assassinat par un commando nord-coréen. infiltré à Séoul. Chun Doo-hwan et Roh Tae-woo, alors généraux de l’armée, profitèrent de la confusion politique qui s’ensuivit pour fomenter un coup d’État en décembre 1979. Chun Doo-hwan devint président en 1980, après avoir obtenu la démission du nouveau président Choi. Kyu-ha.
Seize ans plus tard, en 1996, Chun Doo-hwan, surnommé le « Boucher de Gwangju » pour avoir ordonné une répression sanglante dans cette ville du sud-ouest lors de son arrivée au pouvoir en 1980, est condamné à mort alors qu’il remettait déjà la main à Roh Tae-hwan. courtiser en 1987. Sa peine a ensuite été commuée en prison à vie. Il a finalement été gracié en 1998 après seulement deux ans derrière les barreaux, et est décédé d’une leucémie en novembre 2021, quelques jours après son successeur Roh Tae-woo.
Des millions de dollars en pots-de-vin et partage de documents classifiés
Roh Tae-woo, élu après le départ de Chun Doo-Hwan, qu’il avait aidé à accéder au pouvoir, a dirigé la Corée du Sud de 1988 à 1993. En 1996, il a été condamné à 22 ans de prison pour corruption et trahison. . Il a d’ailleurs été amnistié deux ans plus tard, avant de décéder, comme son prédécesseur, d’une leucémie en novembre 2021 à l’âge de 88 ans.
Après 13 années sans drame au sommet de l’Etat, un nouvel événement secoue le pays en mai 2009 : président de 2003 à 2008, Roh Moo-hyun se suicide en se jetant du haut d’une falaise. Il était la cible d’une enquête sur le versement par un riche fabricant de chaussures d’un million de dollars à son épouse et de cinq millions de dollars au mari d’une de ses nièces. En mars 2004, le Parlement a adopté une motion de destitution sans précédent qui a suspendu M. Roh de ses fonctions, une procédure invalidée par la Cour constitutionnelle deux mois plus tard.
La première femme présidente de Corée du Sud, Park Geun-hye, n’a pas été épargnée. Au pouvoir depuis 2013, elle a été démis de ses fonctions le 9 décembre 2016 par le Parlement, puis mise en examen et incarcérée. Celle qui se présentait comme incorruptible est accusée d’avoir reçu des dizaines de millions de dollars de la part de conglomérats sud-coréens, dont Samsung, d’avoir partagé des documents classifiés, d’avoir mis en place un “liste noire” des artistes critiques à l’égard de sa politique, voire pour avoir licencié des fonctionnaires qui s’opposaient à ses abus de pouvoir. La fille de l’ex-dictateur Park Chung-hee a été définitivement condamnée en 2021 à 20 ans de prison et de lourdes amendes, avant d’être finalement graciée en décembre 2021 par son successeur Moon Jae-in.
Enfin, en octobre 2018, Lee Myung Bak, au pouvoir de 2008 à 2013, a été condamné à 15 ans de prison pour corruption. Il est notamment reconnu coupable d’avoir reçu, une nouvelle fois, des pots-de-vin de la part de Samsung pour gracier le président du conglomérat, Lee Kun-hee, qui avait été reconnu coupable de fraude fiscale. Avant d’être gracié, en décembre 2022, par le président Yoon Suk Yeol, qui vient de tomber.