En attendant l’adoption de ce nouveau budget, un projet consensuel de « loi spéciale » visant à assurer la continuité du fonctionnement de l’Etat sera examinée lundi par l’Assemblée nationale.
La passation du pouvoir est prévue dans l’après-midi.
Gouvernement d’intérêt général
Cette nomination intervient trois jours après une réunion inédite des dirigeants des partis, hors Rassemblement national et La France insoumise, sous l’égide du chef de l’Etat. Où les contours d’un « accord de coopération démocratique »selon la formule de M. Bayrou mardi : le gouvernement s’engagerait à ne pas utiliser le 49.3 pour imposer ses lois, les opposants à ne pas le censurer, Emmanuel Macron évoquant de son côté son intention de ne plus dissoudre la loi. Assemblée.
Le leader centriste a finalement été préféré à d’autres noms qui ont circulé jusqu’au bout, comme celui de l’ancien Premier ministre socialiste Bernard Cazeneuve, les ministres de la droite de la macronie Sébastien Lecornu ou Catherine Vautrin.
Jeudi, c’est le profil de l’ancien ministre de l’Industrie Roland Lescure, un macroniste social-libéral, qui a été poussé par le secrétaire général de l’Élysée Alexis Kohler, selon plusieurs sources proches des concertations. Mais la droite et le RN sont montés au créneau pour le bloquer.
L’ancien chef de la diplomatie Jean-Yves Le Drian, qui accompagne Emmanuel Macron depuis 2017, lui a carrément fait savoir qu’il avait “refusé” Matignon, jugeant que “ce ne serait pas grave” accepter à 77 ans.
C’est une arrivée à Matignon qui s’annonce comme une consécration particulière pour le lointain ministre de l’Éducation nationale (1993-1997) qui vise depuis longtemps la plus haute fonction : infatigable défenseur d’un centre indépendant, François Bayrou a été trois fois candidat à la présidentielle. élection de 2002 à 2012, sans atteindre le second tour (18,57 % en 2007).
Son alliance avec Emmanuel Macron en 2017 a ouvert la voie à l’élection du plus jeune président de l’histoire, porteur d’un “en même -” droite-gauche en cohérence avec son projet politique.
Mais le Béarnais, nommé garde des Sceaux, n’est resté que 34 jours place Vendôme en 2017, empêché par l’affaire des assistants parlementaires du MoDem, jugée en première instance sept ans plus tard, en février 2024. Si le parti a été lourdement condamné, François Bayrou a été acquitté, mais le parquet a fait appel.
-Depuis 2017, le maire de Pau distille régulièrement des critiques contre la politique – trop à droite – et la pratique du pouvoir – trop personnelle – de son allié, sans jamais se départir de sa solidarité.
Pas de censure d’emblée ?
Peu après l’annonce de la nomination, le président du RN Jordan Bardella a assuré qu’il n’y aurait pas de “pas de censure a priori”.
M. Bayrou devrait en revanche subir la censure de La France insoumise. « Faire tomber Bayrou fera tomber Macron »a prévenu le coordonnateur de LFI Manuel Bompard, qualifiant cette nomination de « nouveau bras d’honneur pour la démocratie ».
L’échec de M. Barnier, Premier ministre choisi en septembre par Emmanuel Macron alors que la gauche réclamait Matignon, remet la pression sur le chef de l’Etat et le Premier ministre.
La situation a-t-elle changé ? Si le Parti socialiste, et dans une moindre mesure les communistes et écologistes, ont donné quelques garanties de compromis, poussant leur alliance avec LFI au sein du Nouveau Front populaire au bord de la rupture, pas sûr qu’ils soutiennent franchement François Bayrou.
Le centriste, qui milite depuis des décennies en faveur de gouvernements œcuméniques, devrait tenter de conserver les ministres du parti de droite Les Républicains, avec qui les relations sont historiquement tendues. Nicolas Sarkozy a notamment usé de son influence pour empêcher cette nomination à Matignon.
M. Bayrou devrait également se tourner davantage vers la gauche, ne parvenant pas à convaincre les membres du Nouveau Front populaire de participer au gouvernement.
Côté RN, le président du MoDem pourrait gagner à avoir apporté son parrainage à Marine Le Pen pour concourir à l’Élysée en 2022, dans un geste destiné à défendre le “pluralisme”.