Enfin le résultat ? Le président Emmanuel Macron a repoussé à vendredi matin le moment de nommer un Premier ministre, laissant fleurir rumeurs et spéculations entre le centriste François Bayrou, reçu tôt vendredi à l’Elysée, l’ex-socialiste Bernard Cazeneuve ou encore un candidat surprise comme l’ancien ministre Roland. Lescure.
François Bayrou, dont le nom revient à plusieurs reprises depuis plusieurs jours, est arrivé à 8h30 à l’Elysée pour s’entretenir avec le président.
Mais on ne sait pas si Emmanuel Macron reçoit son allié historique pour lui annoncer sa nomination ou au contraire lui expliquer les raisons de ne pas être à nouveau nommé.
De retour d’une visite éclair en Pologne, à peine arrivé sur le sol français, Emmanuel Macron a déçu les attentes jeudi soir et a annoncé que la nomination du nouvel hôte de Matignon pour succéder à Michel Barnier n’interviendrait que le lendemain.
Le délai de 48 heures qu’il s’est lui-même fixé mardi dernier devant les chefs de parti ne sera donc pas respecté.
Le chef de l’État tergiverse-t-il encore comme lorsqu’il avait mis 51 jours pour nommer Michel Barnier en remplacement de Gabriel Attal ? Est-il encore indécis, jouant sur les nerfs des politiques et des principaux favoris au poste ?
“Il termine ses consultations”, a indiqué jeudi soir à l’AFP son entourage. Mais l’attente est propice à la diffusion d’informations non vérifiées et à un climat délétère dans la classe politique, marqué par des attaques contre des prétendants potentiels.
L’un d’eux a admis jeudi soir qu’il n’était pas sûr des choix du président.
– « Dans le piège » –
“Ils sont dans le piège”, il y a un “barrage à chaque nom”, a déploré un proche d’Emmanuel Macron. “Personne n’est en harmonie autour du président”, a-t-il ajouté.
Jeudi, c’est le nom de Roland Lescure, ancien ministre de l’Industrie et des premiers macronistes qui a fait irruption dans le débat.
A 58 ans, le député des Français établis à l’étranger pour l’Amérique du Nord, plutôt marqué à gauche de la macronie, pourrait devenir un super-animateur à la tête d’un gouvernement de poids lourds, à cet égard plus difficile à censurer.
Plusieurs députés du Rassemblement national, dont les cadres Sébastien Chenu et Jean-Philippe Tanguy, ont successivement marqué leur hostilité à sa nomination sur X. « Roland Lescure ? Motion de censure», a écrit la porte-parole du groupe lépéniste Laure Lavalette, avant de supprimer son message.
Prenant l’hypothèse « au sérieux », l’entourage du ministre de l’Intérieur démissionnaire, Bruno Retailleau, a prévenu que ce serait un « gros problème » pour son parti, Les Républicains (LR), car Roland Lescure « porte une ligne inverse » sur immigration.
L’équation politique reste infiniment complexe malgré le mouvement opéré par le parti socialiste. Le prochain chef du gouvernement devra créer les conditions de sa survie politique pour ne pas subir le sort de Michel Barnier, renversé le 4 décembre par les députés lors d’une censure inédite depuis 1962, qui laisse le pays sans budget pour 2025.
Le premier secrétaire du PS Olivier Faure, comme la chef des écologistes Marine Tondelier, ont proposé une formule : le renoncement à l’article 49.3 de la Constitution, qui permet au gouvernement d’imposer des textes au Parlement, si un Premier ministre de gauche était nommé. En contrepartie, une majorité de députés s’engageraient à ne pas le censurer.
Cette formule a relancé l’option Bernard Cazeneuve, l’ancien Premier ministre de François Hollande et figure de la gauche modérée hostile à l’alliance avec La France insoumise (LFI).
Ce ne sera en aucun cas l’ancien ministre des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, qui a déclaré à l’hebdomadaire breton Le Penthièvre avoir « refusé » le poste, s’estimant trop vieux à 77 ans.
En fait, le président semble réticent à se tourner vers la gauche. Dès lors, les noms du ministre inamovible des Armées Sébastien Lecornu et celui des Territoires Catherine Vautrin, tous deux passés de la droite à la macronie, sont également cités comme possibles Premiers ministres.
Mais plus encore que d’autres prétendants, ils se retrouveraient dans une situation politique similaire à celle de Michel Barnier, avec un fort risque de censure si la gauche et le Rassemblement national s’associaient pour l’occasion.