l’essentiel
Les réquisitions du parquet sont tombées mercredi. L’ancien président du RN pourrait être condamné à une peine d’inéligibilité mais sans être privé de tout avenir politique.
La concomitance est inquiétante. Pendant que Marine Le Pen attend de connaître la sentence qui sera la sienne dans le procès des assistants parlementaires du RN, Jordan Bardella est en pleine promotion de son livre. Tonneins dimanche dernier, Nice samedi prochain… Le président du RN se dévoue de toutes ses forces. Marine Le Pen ne quitte pas le tribunal de Paris où elle a assisté aux mises en examen mardi 12 novembre. Sa peine sera déterminée mercredi 20 novembre et celle-ci pourrait bien s’accompagner d’une mesure d’inéligibilité « obligatoire » de dix ans maximum. Tandis que l’un semble prendre son envol, l’autre pourrait voir ses ailes coupées.
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Peu de risque
L’ancienne candidate à l’élection présidentielle se voyait déjà au second tour en 2027. Après avoir échoué en 2017 puis en 2022, elle espérait même face à un candidat moins rassembleur qu’Emmanuel Macron pouvoir l’emporter. Une peine d’inéligibilité enlèverait donc tout espoir de gravir les marches de l’Élysée dans 3 ans. “Derrière (moi), il y a des millions de Français qui, de fait, seraient privés de leur candidat à la présidentielle”, s’indigne-t-elle à la barre. Toutefois, pour que cette décision ait un véritable impact sur le calendrier électoral de Marine Pen, il faudrait que le tribunal ordonne l’exécution provisoire de sa peine d’inéligibilité. Dans un tel cas, les futurs recours judiciaires ne suspendent pas cette peine. Dans le cas contraire, jusqu’à ce qu’une condamnation soit définitive, les sanctions légales ne sont pas appliquées. Autant dire qu’une éventuelle peine d’inéligibilité prononcée définitivement avant 2027 paraît peu probable. Quant à son mandat de député, il ne serait menacé que dans le cas où le tribunal ordonnerait l’exécution provisoire de sa peine d’inéligibilité.
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Stratégie de victimisation
Il y a très peu de risque que cela soit le cas car le tribunal serait alors aussitôt accusé par les électeurs du triple candidat, prompts à penser que la justice s’acquiert par le pouvoir en place, de vouloir faire taire un opposant gênant. Si Marine Le Pen brandit la menace c’est certainement pour se protéger mais surtout parce qu’elle sait que la stratégie de victimisation a toujours réussi pour elle. Plus les partis traditionnels l’attaquent, plus il gagne du soutien. Au lieu de lui nuire, ce procès pourrait donc l’aider dans sa conquête du pouvoir.
Un billet avec Bardella
Et même si Marine Le Pen était inéligible, son parcours politique ne s’arrêterait pas mercredi. L’ancienne candidate à la présidentielle avait annoncé il y a quelques mois qu’elle pourrait se présenter sur un ticket avec l’actuel patron du RN. Elle pense alors à briguer l’Élysée et Jordan Bardella Matignon. Mais l’inverse serait aussi possible. « Aujourd’hui, je suis le candidat naturel de mon camp, mais un parcours présidentiel requiert plusieurs éléments, dont l’envie et la capacité de l’être. Et je sais à quel point la vie politique peut vous glisser des peaux de banane», analysait-elle récemment, semblant accepter l’idée d’être obligée de passer son tour. Mais même si elle était inéligible, Marine Le Pen ne serait pas empêchée de faire campagne aux côtés de Jordan Bardella ou de se présenter à Matignon. Cette solution d’urgence aurait l’avantage de rassurer les électeurs inquiets du jeune âge du patron du RN qui pourrait se retrouver cantonné à la gestion de la politique étrangère alors que Marine Le Pen Premier ministre serait la véritable capitaine de la politique nationale. Quelle que soit la décision du tribunal rendue mercredi, le chemin est loin d’être arrêté pour le triple candidat à l’élection présidentielle.