Un courage incroyable et un acte politique fort. Une étudiante iranienne a été filmée déambulant en sous-vêtements sur le campus d’une université de Téhéran avant d’être interpellée samedi 2 novembre. Les images de cette jeune femme, dont l’identité n’a pas été confirmée, ont fait le tour des réseaux sociaux et ont fait l’objet de nombreuses réactions, notamment de la part de plusieurs ONG, dont Amnesty International.
Cette nouvelle arrestation intervient près de deux ans après la mort, le 16 novembre 2022, de Mahsa Amini, une Kurde iranienne de 22 ans arrêtée par la police des mœurs pour non-respect du code vestimentaire, qui avait déclenché un vaste mouvement de protestation. . dans tout le pays. Franceinfo résume ce que l’on sait de cette arrestation dont l’écho résonne bien au-delà des frontières du pays.
Une jeune femme en sous-vêtements interpellée dans la rue
La vidéo publiée par le site étudiant Amir Kabir montre une jeune femme marchant sur le campus de l’université Azad, dans la capitale iranienne. Elle ne porte qu’une culotte et un soutien-gorge. La vidéo ne montre pas comment ni pourquoi la jeune femme se retrouve dans cette tenue. Selon Amir Kabir, elle a été harcelée par des membres de la force paramilitaire Basij, affiliée aux Gardiens de la révolution, qui lui ont reproché des vêtements inappropriés, en l’occurrence la façon dont elle portait le voile. Ils l’auraient ensuite malmenée et lui auraient arraché ses vêtements.
En signe de protestation, la jeune femme s’est déshabillée, selon le site étudiant. Elle a ensuite erré sur le campus en sous-vêtements, les bras croisés pendant quelques minutes, montre la vidéo, avant d’être emmenée de force dans une voiture par quatre membres des forces de sécurité du pays. Le site étudiant iranien évoque une blessure lors de son arrestation.
Dans un message sur le réseau social X, la branche iranienne de l’ONG Amnesty International a simplement indiqué que l’étudiant avait été arrêté pour « avoir déshabillé en signe de protestation contre l’application abusive du port obligatoire du voile ». L’organisation réclame sa libération « immédiatement et sans condition ». « Les allégations de coups et de violences sexuelles portées contre lui lors de son arrestation doivent faire l’objet d’une enquête indépendante et impartiale »ajoute-t-elle.
L’université se défend en remettant en question la santé mentale de l’étudiant
Amir Mahjoub, directeur général des relations publiques de l’Université Azad, a évoqué l’incident dans une série de posts sur X. Il confirme que« Après l’acte attentatoire à la pudeur d’une des étudiantes de l’Université des Sciences de Recherche, la sécurité de l’université est intervenue et l’a remise au commissariat. La motivation et les raisons de l’action de cet étudiant sont en cours d’investigation”. Il précise qu’après un examen médical, la jeune femme « était soumis à une forte pression mentale et souffrait de troubles mentaux ». L’étudiant a été admis dans un hôpital psychiatrique, selon les informations du site Internet Amir Kabir.
Le manager a également partagé une vidéo sur X d’un homme, le visage flou, présenté comme le mari de la jeune femme. Il demande que la vidéo de l’élève ne soit plus partagée. « Elle est mère de deux enfants et ils ne peuvent pas vivre sans elle »» déclare-t-il avant de fondre en larmes, sans que franceinfo puisse établir dans quel contexte cette vidéo a été réalisée.
L’agence officielle iranienne Fars, qui a également rapporté la scène, assure que la jeune femme portait des vêtements “inapproprié” en classe et “sortir” après avoir été rappelé à l’ordre. Selon “témoins” cités par Fars, les agents ont parlé “calmement” envers la jeune femme et n’a pas agi de manière agressive. La loi islamique iranienne impose un code vestimentaire très strict aux femmes, qui doivent porter un foulard et des vêtements amples dissimulant leurs formes.
Une vague de réactions pour soutenir l’étudiant
Cette arrestation a suscité de nombreuses réactions de soutien et d’indignation. « Aujourd’hui, tout le monde est derrière cette jeune femme et revendique la dimension politique et collective de son acte »analyse pour France 2 Chowra Makareni, anthropologue spécialiste de la société iranienne.
En France, de nombreuses personnalités ont défendu cet étudiant. La porte-parole du gouvernement, Maud Bregeon, s’est félicitée, sur le réseau social « un courage sans nom, la tête haute et les cheveux au vent face à l’obscurantisme ». Le président du Rassemblement national (RN), Jordan Bardella, lui a parlé « un courage incroyable ».
La sénatrice LR Valérie Boyer et l’eurodéputée Renew Nathalie Loiseau ont partagé le même dessin de cette jeune femme en sous-vêtements brisant un mur. « Si le courage avait un nom, ce serait Ahou Daryaei »assure le premier, reprenant l’une des identités qui ont fuité, sans pouvoir la confirmer. « Comme beaucoup d’autres, j’admire son courage. Mais je comprends aussi son désespoir”avancer la seconde.
De son côté, Sandrine Rousseau a également partagé un autre dessin représentant l’étudiante en soutien-gorge et culotte. La députée verte exprime son soutien « Aux femmes iraniennes, aux femmes afghanes, à tous ceux qui souffrent d’oppression. Notre corps, et tout ce que nous mettons – ou non – pour le vêtir, nous appartient. ».
Des personnalités du monde culturel comme la comédienne Sophia Aram, l’essayiste Rachel Khan ou encore l’écrivain Kamel Daoud ont également manifesté leur soutien. Le premier salué “l’immense courage” de l’étudiant « face à la dictature islamique »OMS « restera dans l’histoire ». Le second a rendu hommage à “cette force qui éclaire notre lâcheté”. Enfin, le lauréat du prix Goncourt 2024 a simplement partagé une photo de la jeune femme sur le campus.