Michel Fugain, chanteur et compositeur français, est le créateur du Big Bazar, cette troupe à l’esprit hippie communautaire post-soixante-huitième. Il sera médecin, tout comme son père, le résistant Pierre Fugain. Mais le cinéma et la Nouvelle Vague le détournent de sa voie apparemment toute tracée. Il rencontre d’abord Yves Robert – et sera son assistant, puis Jean Delannoy, Yves Furet et Michel Sardou. Lundi 4 novembre, Michel Fugain vient nous parler de son dernier album qui vient de sortir La vie, l’amour, etc. Il se produira au théâtre Bobino à Paris tous les lundis entre le 6 et le 27 janvier 2025.
franceinfo: La vie, l’amour, etc. Ce sont 10 chansons pour vous parler du temps qui passe et de l’importance de vivre.
Michel Fugain : En gros et un peu dans le désordre, c’est exactement ça. Oui, avec le temps, je dois le faire, compte tenu de mon âge canonique. Les mêmes thèmes sont toujours là, c’est-à-dire la liberté, la liberté de pensée bien sûr, cette liberté qu’on a ou qu’on n’a pas et après laquelle on court, pour laquelle on se bat. Mais cela devient beaucoup plus simple avec le temps, justement. Le temps arrange beaucoup les choses, ça devient beaucoup plus simple et comme c’est plus simple, c’est plus difficile à exprimer.
Pourquoi est-ce que je chantec’est le titre qui termine l’album. Pourquoi chantes-tu ?
Comment se fait-il que je chante encore pour commencer ? En fait, cette chanson arrive exactement à la fin du spectacle. On a fini, on a salué, on a remercié, mais le public nous a aussi remercié. Et je suis très sensible à cela. Et je leur dis : ne restez pas les bras croisés, j’ai un dernier mot à vous dire. Je l’aime. Il est très difficile de garder l’esprit tranquille. Il y a beaucoup d’émotion. Parce qu’à ce moment-là, je ne suis qu’un individu qui a effectivement le droit de parler et qui dit : «C’est pourquoi je chante. Je chante pour ceux qui ont encore une âme, ceux qui ont gardé la flamme. Je chante pour changer la dépit en espoir. Je chante pour tuer le silence. Et comme arme, je n’ai que la musique« .Et j’aime le début de cette chanson alors que je reprends la fin »,ni les hauts murs, ni la censure, ni les dictatures au pouvoir ne peuvent étouffer les cris que sont les chants d’espoir« . Pour moi, c’est tout. Quoi qu’il arrive à cette humanité à laquelle j’appartiens, je continuerai à chanter pour elle.
La musique a toujours fait partie de votre vie. C’est le sentiment que vous ressentez lorsque vous regardez ce voyage. Comment le voyez-vous ?
J’ai suivi un chemin strictement logique. J’ai été élève de chant auprès de maîtres magnifiques. J’ai appris le spectacle avec le Big Bazaar. C’est au Grand Bazar que j’ai tout appris, pratiquement tout sur la scène. J’ai suivi mon chemin en respectant qui je suis, sans presque jamais faire de compromis. Je n’ai pas gâché.
«J’ai toujours essayé de préserver mon innocence. J’ai bien fait de ne pas m’ennuyer, de rester intact, d’avoir encore la moelle, d’avoir encore la voix.
Michel Fugainsur franceinfo
Quand on écoute cet album, il y a des chansons qui font sourire, comme Un souriretout simplement. Cela met aussi en lumière quelque chose qui vous caractérise depuis vos débuts, c’est toujours l’envie de rassembler, de partager des choses. C’est ainsi qu’est né le Grand Bazar.
Je sais maintenant, avec le temps, que je suis un rassembleur. Je l’ai appris avec le Big Bazaar. On ne peut pas gérer 35 personnes – il y avait 15 personnes sur scène, 11 musiciens, techniciens – on ne peut pas garder ça uni, uni, si on n’est pas fédérateur. Être fédérateur, c’est : ne pas penser d’abord à soi, ne pas passer son temps à se regarder et à écouter tout le monde. C’est terriblement instructif. Cela devient beaucoup plus facile avec le temps parce que, comme je vous l’ai dit, le temps fait le tri, il fait aussi le tri entre les gens avec qui on travaille, ceux qui restent, ceux qui resteront quoi qu’il arrive et que j’aime profondément, et ce qui fait que quand on monter sur scène, on va à la récréation, on va à la récréation.
Enfin, qu’est-ce que La vie, l’amour, etc. pour toi ?
Je ne l’ai jamais rendu aussi personnel. Je termine avec une chanson intitulée Vivre la vie parce que c’est “Longue vie à la vie« parce que je sais que ça peut être difficile, etc. Vous parliez de mon père résistant, je fais partie de la génération qui arrive juste derrière et qui a reçu tous les messages.
« Un résistant, pour quelque raison que ce soit, mange, boit et aime la vie. Et il aime d’autant plus la vie qu’il peut la perdre le lendemain.
Michel Fugainsur franceinfo
Chaque fois que les gens parlent de résistance, ils lèvent un peu les sourcils, comme s’il y avait de la douleur. Je sais et je l’ai entendu, je l’ai vu, je l’ai contrôlé, ce sont des gens qui ont aimé la vie et qui se sont engagés parce qu’il n’était même pas question de faire autre chose.