
Il s’appelle le peau de l’océan. Invisible à l’œil nu, cette fine couche d’eau, avec une épaisseur inférieure à 2 millimètres, couvre toutes les mers du globe. Pendant longtemps, les chercheurs soupçonnaient qu’elle avait joué un rôle dans les échanges de gaz entre l’atmosphère et les océans, sans pouvoir mesurer l’impact précisément. Mais une nouvelle étude dirigée par une équipe de l’Université d’Exeter, en collaboration avec l’Agence spatiale européenne (ESA), vient de confirmer une hypothèse cruciale: la peau de l’océan contribue de manière significative à l’absorption du dioxyde de carbone (CO₂), l’un des principaux gaz à effet de serre. Mieux encore, cette absorption serait largement sous-estimée jusqu’à présent.
Une couche mince mais décisive
La peau océanique est cette zone juste à l’interface entre l’air et l’eau. Il est légèrement plus froid que les couches sous-jacentes de l’eau – une petite différence de température, mais suffisante pour modifier la capacité de l’eau à dissoudre les gaz. C’est précisément ce que la nouvelle étude a publié dans Géoscience de la nature : Ce film mince favorise la capture du CO₂, agissant comme un véritable timbre climatique.
Jusqu’à présent, cette idée a été surtout explorée dans des modèles théoriques ou des expériences de laboratoire. Grâce à des instruments intégrés à des navires scientifiques sillonnant l’Atlantique, les chercheurs ont pu effectuer des mesures spécifiques dans des conditions réelles pour la première fois.
Une absorption 7% plus élevée que prévu
Les résultats sont frappants. Selon les mesures, l’Atlantique absorbe environ 7% du CO₂ chaque année que les estimations traditionnelles ne le suggèrent. Cela peut sembler modeste, mais si ce chiffre est appliqué à tous les océans, cela représenterait une quantité supplémentaire de co₂ équivalent à une fois et demie que la forêt d’Amazonie capture chaque année.
Cet excédent d’absorption, qui n’a pas été pris en compte dans les modèles climatiques jusqu’à présent, a des implications majeures: elle pourrait améliorer la précision des projections liées au changement climatique, tout en redéfinissant le rôle exact des océans dans la régulation du carbone.
Un rôle central dans la lutte contre le changement climatique
Comme nous le savons, les océans absorbent environ un quart des émissions mondiales d’origine humaine. Ils constituent donc un pilier essentiel dans la lutte contre le réchauffement climatique. Mais cette fonction a un coût: l’excès de carbone dissous acidifie progressivement les océans, ce qui menace la biodiversité marine.
-Comprendre comment et à quel rythme les océans capturent le Co₂ est donc vital, non seulement pour la recherche, mais aussi pour les décideurs politiques qui comptent sur ces données pour établir leurs stratégies de réduction des émissions.
Science au service des modèles climatiques
En intégrant ces nouvelles observations sur la peau océanique dans le budgets carbone Global, les scientifiques peuvent désormais affiner leurs modèles. Cela fournira finalement des scénarios climatiques plus fiables – et développera donc des politiques environnementales plus efficaces.
Le Dr Daniel Ford, auteur principal de l’étude, le résume comme suit:
«Nos résultats confirment finalement, par observation, ce que la théorie a suggéré depuis des années. Cette couche minuscule mais omniprésente joue un rôle essentiel dans les échanges de gaz entre l’océan et l’atmosphère.» »
Vers une meilleure gestion des écosystèmes marins
Les implications de cette étude ne se limitent pas aux chiffres. En mettant en évidence le rôle sous-estimé de ce micro-couche océanique, les chercheurs lancent également un message clair: l’océan Santé est étroitement liée à celle du climat mondial.
Cela plaide pour une plus grande considération des écosystèmes marins dans les politiques climatiques, par la protection des zones côtières, la surveillance de l’acidification des océans ou le soutien à l’innovation dans la surveillance des satellites.