Anne Émond, qui a vu de nombreux corps nus passer et entrelacés devant son appareil photo, souffle chaude et froide. Si le rétablissement des scènes d’intimité est l’une de ses réflexions, le cinéaste juge qu’il est nécessaire de continuer à montrer la sexualité afin de ne pas le donner complètement à la pornographie.
Le réalisateur connaît la propension de la pornographie à une production audiovisuelle appropriée pendant très longtemps, trop longtemps. Déjà en 2011, des scènes de son long métrage Nuit # 1Inauguré par 15 minutes d’inbulons chauds, a pris d’assaut les sites XXX.
Rebelote en 2016 avec NicheFilm inspiré de la vie et des écrits de Nelly Arcan. Puis très récemment et dans une moindre mesure avec Lucy Grizzli Sophieinterprétation cinématographique de la pièce Le pack. Triste ironie, parmi les thèmes du film: les ravages des images intimes partageant sur Internet.
«Cela me fait ressortir», explique Anne Émond dès le départ. «Chaque fois, ça me prépare, ça me fait reculer, et je me demande comment filmer les corps des acteurs en ne sachant pas comment ils seront réutilisés. Il y a un sentiment de culpabilité.» »
La culpabilité, puisque les scènes de nudité qui portent l’histoire sont le printemps des réalisateurs, tandis que les corps appartiennent aux acteurs. «J’ai toujours essayé de travailler avec respect, même si j’ai sûrement fait des erreurs», explique le cinéaste, qui note un avant et après #MeToo.
Devoir [cette récupération]Cela m’affecte énormément, mais je ne pense pas à mon art ou à mon droit d’auteur. Je pense vraiment aux gens dont les images sont prises.
Anne Émonde
Ce serait néanmoins une erreur de tourner le dos à la sexualité dans les films et les séries, insiste le cinéaste. “Sinon, ce n’est que de la pornographie qui s’en occupe, et je le trouve complètement hypocrite. Nous cessons de montrer le sexe à la télévision et au cinéma, mais le soir, tout le monde se dirigeait à bord pour le consommer sur Internet.” “
En habitant son art, la société se priverait d’un look «qui est important, ce qui permet de montrer la sexualité dans un contexte beaucoup plus sain», avec une plus grande palette de corps et de pratiques, croit qu’Anne Émond. «La pornographie est souvent misogyne, il n’y a aucune inclusion, aucune diversité corporelle», note-t-elle.
Au nom de l’histoire
Anne Émond juge que la sexualité explicite est parfois utile pour «se sentir». C’est parmi ceux qui défendent la nudité brute deAorFilm récompensé avec un Oscar du meilleur film et la plus récente Palme d’Or à Cannes. Le travail construit autour d’un jeune travailleur sexuel de Brooklyn a attiré de nombreux éloges, mais aussi des critiques pour sa soi-disant «sexualité de spectacle».
«Avec le rôle [d’Ani]Je pense que je ne me suis jamais rapproché de ce qu’il peut être de vendre votre corps, de payer le prix et de me sentir tellement humilié. C’est un film qui m’a fait réfléchir tellement que je continue de trouver ça [la nudité] valait la peine de défendre certains caractères et certains messages. »»
Elle s’oppose Aor a Des choses pauvresPar exemple, un film où le réalisateur Yórgos Lánthimos semblait avoir «un look marionnettiste». À l’autre extrémité du spectre, la cinéaste Monia Chokri a expliqué dans différentes interviews sur la touche de la sortie du film Simple comme SylvainChargée d’érotisme, qu’elle avait voulu passer la sexualité à travers le regard plutôt que par la nudité.
Au coup de toutes ces considérations, Anne Émond n’a pas arrêté de position. Son sixième film, Apocalypse amourExposera un peu de peau au Festival de Cannes – les amateurs qui assisteront à la première mondiale dans le cadre de la quinzaine des réalisateurs, dans quelques jours.
Je ne sais pas si je deviens vieux ou moins courageux, mais je commence à me demander ce que je continuerai à montrer. J’y pense de plus en plus.
Anne Émonde
Les usurpateurs pornographiques sont là pour de bon, elle se résigne. «À moins qu’il n’y ait un changement radical dans la réglementation d’Internet, et que nous parcourons le chemin opposé. Je suis très pessimiste. Il faut dire qu’au moins, nous pouvons atteindre un certain public de bonne foi qui mettra le film dans son intégralité et qui en tiendra un message. conditions. “”
Et pour les actrices qui feraient le choix de refuser un projet impathique en considérant «After», Anne Emond est empathique. «Je vois des acteurs qui se déshabillent pour un rôle et je me dis: Oh mon Dieu, je ne serais pas en mesure de le faire. De plus, sachant comment il est récupéré, si quelqu’un décide qu’il ne se soumet plus à ce processus, respect! Je n’ai aucun jugement.» »