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photographe Yann Arthus-Bertrand en famille(s) à Aldudes

L’odeur du café et la chaleur d’une tasse de thé dans vos mains, quand dehors le froid rend vos doigts bleus… Le bar Alfaro imprègne le confort. «Egun, continuez.» » Le producteur Pierre Oteiza entre au bar des Aldudes avec sa famille, dont le photographe Yann Arthus-Bertrand. Une vieille amitié les réunit mercredi au village basque. «Nous nous sommes rencontrés au Salon de l’Agriculture il y a 30 ans», se souvient l’homme du best-seller mondial «La Terre vue du ciel». A l’époque, il représentait des races d’animaux françaises dans la « ferme » parisienne. « J’ai commencé avec un cheval et j’ai tout de suite compris que c’est l’éleveur qui est intéressant. » Le germe du projet « Les Français et ceux qui vivent en ». Celui qui, tant d’années plus tard, fit venir Yann Arthus-Bertrand au village basque. Avec l’ami Pierre, bien sûr.

Comme la veille, le photographe a déployé son « studio » nomade dans la salle jokoberri (1). Une grande toile de jute en fond, un éclairage : le dispositif n’a pas changé depuis les premiers clichés de bétail. Plus de 50 séances dans toute la France et 27 000 personnes composent aujourd’hui « un véritable portrait social de la France ». Yann Arthus-Bertrand fait référence à ses pairs August Sander, Seydou Keïta et Irving Penn. Elle rassemble les visages du pays pour le montrer dans sa réalité, son humanité, et donc sa multiplicité.

Tiens-toi droit, regarde-moi. Et envoie-moi de l’amour !

Confort


Dans la salle jokoberri, une toile de jute donne une teinte tabac aux portraits réalisés par le photographe Yann Arthus-Bertrand.

Émilie Drouinaud

«Je demande aux gens de venir avec les gens qu’ils aiment. Cela peut aussi être l’outil de leur métier, un uniforme, un animal… Quelque chose d’important pour eux, qui les relie. » Celui qui veut vient. Ses assistants orchestrent les plans. “Allez, allons-y!” » Françoise Jacquot lit presque les pensées de Yann Arthus-Bertrand. Elle a déjà travaillé avec lui, à l’époque du Salon. La famille Oteiza, Pierre, Catherine et leur fils Frantxoa passent devant la caméra. « Tiens-toi droit, regarde-moi. Et envoie-moi de l’amour ! »

On avance dans le chaos, mais l’humanité que je retrouve dans ce travail sur les Français me permet de vivre

Tout est dit, ou presque. « Ce travail véhicule beaucoup d’amour. C’est un grand réconfort », savoure le photographe. Il y trouve « une source d’espoir » face à la tristesse de l’époque. L’incendie de Los Angeles, la dévastation de Mayotte, les atermoiements politiques face à la catastrophe… L’écologiste a montré la beauté du monde pour parler de sa fragilité. Il pense aux « enfants qui ont 20 ans aujourd’hui ». « On avance dans le chaos, mais l’humanité que je retrouve dans ce travail sur les Français me permet de vivre. » Les autres sont chaleureux.


Yann Arthus-Bertrand tire « un grand réconfort » de son ouvrage intitulé « Les Français et ceux qui vivent en France ».

Émilie Drouinaud


Yann Arthus-Bertrand avec son vieil ami Pierre Oteiza.

Émilie Drouinaud

Pierre Oteiza a amené quatre porcs Kintoa, une race qu’il a contribué à préserver. « Ils font partie des dix que nous présenterons au Salon de l’agriculture en mars. » Les animaux du concours mangent un morceau de jute, s’oublient un peu, mais posent docilement avec le porcher Gracien Bordères et leur chauffeur personnel, Éric Belgarde. TUUUT ! Françoise Jacquot lance un appel à faire tourner la tête des cochons. « Cela fonctionne aussi avec les humains. » « Un cheval et une famille recomposée » attendent leur tour. « Est-ce que le producteur de poivre est là ? », anticipe Françoise.

“La chose d’une vie”


In front of the camera of documentary filmmaker Sibylle d’Orgeval, Pierre Oteiza, Gracien Borderes, Éric Belegarde and their protégés.

Émilie Drouinaud

Célia Paris se présente avec ses pots, ses pinceaux, sa tenue de travail mouchetée. La jeune femme a changé de vie, quitté le commerce international, empilé les containers pour l’aspect tangible de la peinture en maison. « Je me sentais coupable de venir, car je travaille actuellement pour un client. Il m’a dit : ‘vas-y, c’est Yann Arthus-Bertrand, c’est le truc d’une vie’.» Elle souhaite dire un mot sur le réseau BatiFemmes qui défend les femmes artisanes. « Et puis ça me fait du bien de me voir dans cette image. » Légers tramblotti dans la voix et voile sur les yeux…

Être ici est pour moi une façon de dire que je suis vivant

« Les gens se donnent, ils se mettent un peu en danger », connaît Yann Arthus-Bertrand. Il ne joue pas un rôle d’autorité, la relation est simple et directe. « Nous sommes cool. » A 78 ans, son expérience d’éco-ballon médiatique pour une bande d’intérêts restreints l’incline à relativiser le summum. “Je me suis toujours éclaté, alors tu sais, le monstre sacré…”


Un écran permet de suivre le résultat tout au long du tournage.

Émilie Drouinaud

« Sourire sexy »

Natasha Azais Kroupnic est originaire de Biarritz et vient de bien plus loin : « Je suis née à Kiev, en Ukraine. Avec tout ce qui se passe dans mon pays, je suis d’humeur un peu désespérée. Je suis venu pour quelqu’un qui photographie la vie. Être ici est pour moi une manière de dire que je suis vivante. »

Arrêtez de la faire rire ! C’est magnifique ! C’est la plus belle photo que j’ai prise ici !

Clic-clac, randonneurs. Clic-clac, une autre famille, un boulanger… « On a un sacré jour ce matin », s’enthousiasme Yann Arthus-Bertrand. Les professionnels du transport se précipitent avec leurs emballages. La photo fonctionnera très bien puisque chaque modèle en recevra une. Mais Babeth Munduate saura raconter l’histoire de la femme emballée et emballeuse. Désormais Françoise Jacquot l’enveloppe dans une sorte de mousseline en carton, comme une robe vestale. “C’est beau!” » Le photographe tient quelque chose. “Donnez-moi un sourire sexy.” » « Vous pourrez signer des autographes », se disputent les collègues. « Arrêtez de la faire rire, les gens ! » Regardez-moi au lieu de les écouter ! C’est magnifique ! C’est la plus belle photo que j’ai prise ici ! »


Yann Arthus-Bertrand donne ses instructions, épaulé par une équipe de cinq personnes.

Émilie Drouinaud

(1) Demi-cliquet.

 
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