une relation unique entre la terre, le feu et la création

une relation unique entre la terre, le feu et la création
une relation unique entre la terre, le feu et la création

« Je suis potier, céramiste, pas artisan, ni plasticien, et surtout pas artiste. » Dans « La Main Sauvage », documentaire co-réalisé par Alexis Pierlot et Jonathan Safir, Hervé Rousseau, grand céramiste de La Borne, nous fait pénétrer dans son univers intime d’accoucheuse d’argile, où chaque geste donne vie à la matière.

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La Main Sauvage suit le parcours d’Hervé Rousseau, céramiste basé à Boisdelle, hameau de la commune d’Henrichemont, situé non loin de La Borne, village historique du Cher réputé pour sa longue tradition de poterie. Ce lieu, au cœur du Berry, est un véritable creuset de poterie contemporaine, où se rencontrent tradition et innovation. À travers une année de création, le film explore la relation intime d’Hervé Rousseau avec la terre et le feu, éléments essentiels de sa démarche artistique.

Après avoir débuté en 1977 comme apprenti chez le maître céramiste Augusto Tozzola, il affine son savoir-faire au Québec et dans le sud de la France. En 1981, il s’installe à Boisdelle avec sa compagne Josette Miquel, puis avec Isabelle Pammachius.




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Le chemin de la passion et du cœur


©France Télévisions

« Il y a toujours eu quelqu’un. En fait, je ne sais pas si je pourrais vivre seul. Je ne pense pas.”

« Je ne peux pas regarder un objet s’il n’y a rien autour de lui. Je dois connaître la personne qui l’a fait. C’est comme un livre.

Hervé Rousseau sait qu’un objet créé de ses mains porte l’essence même de celui qui l’a créé. Il connaît intimement cette mêlée entre la terre et l’homme, dont l’œuvre s’abandonne à la danse du feu. Cette subtile union d’éléments, enrichie d’une part de mystère, joue l’âme d’une création unique.

« Je regarde un pot, je sens les spirales, la façon dont il a été tourné, ou les empreintes, il faut que ça me parle. Quand on apprend à tourner de manière très classique, on efface toute trace sur une pièce. J’ai mis beaucoup de temps à sortir de cette affaire, sachant que ce n’est pas ce que je veux exprimer. « Comment fabriquer un manche vivant et non mort. C’est un besoin, c’est bizarre, même pas normal !

« Au début, je me disais que je ferais du travail artisanal, comme tailleur de pierre. Je suis allé voir les compagnons à Paris pour une interview et tout, et puis finalement, j’ai compris que la pierre est dure. La terre est fraîche, elle est douce, elle est douce.

La terre a fini par éclipser la pierre, et cette histoire, commencée en 1977, ne s’est jamais arrêtée.

La terre qu’Hervé Rousseau utilise dans son travail est de l’argile naturelle, brute, extraite des carrières. Après avoir été broyé, il est malaxé en atelier avant d’être façonné. Le processus de modelage commence par une danse primitive, où les pieds martèlent la matière et s’enfoncent dans la terre, suivant un rythme rythmé. A chaque mouvement, la terre battue s’apprivoise sous l’effort. Entre étreinte et lutte, s’engage un échange d’énergie brute où l’homme et la matière se donnent l’un à l’autre.




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Le corps de la terre


©France Télévisions

En 1997, alors que Josette tombe malade et ne peut plus travailler, Hervé se retrouve seul dans l’atelier, pris dans une urgence créative. Il lui fallait poursuivre ce qu’ils avaient construit ensemble :

“J’ai essayé de continuer à faire un peu ce que faisait Jo, décorer, émailler, parce que c’est ce qui nous faisait vivre.”

L’œuvre « sauvage » de l’Américain Peter Voulkos résonne alors profondément en lui. Son approche brute, laissant des empreintes et des coups dans la terre, correspondait à ce qu’il ressentait : une manière de libérer ses émotions sans retenue. Hervé se lance alors dans une frénésie créatrice, où la forme devient secondaire, seule l’expression compte :

« Ne réfléchis plus trop, je ne pense pas, surtout pas. C’est plus dans la forme, c’est plus construit, c’est tout lâcher, c’est bien, ce n’est pas bien, accepter ce qu’on a fait.

Au fil du temps, cependant, le geste de la main s’est atténué pour prolonger l’histoire. Moins impatient, Hervé adoucit peu à peu son travail. Lui qui aimait aller à l’essentiel se retrouve à lisser, à trouver du plaisir dans cet intermède.




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“Vous travaillez dans le vide”


©France Télévisions

« Il y a encore la notion de peau quelque part. C’est un puzzle, pas dans les formes, mais dans le toucher, dans le modelé, c’est sensuel quand même.

Quand Hervé est arrivé à Boisdelle, il y avait déjà un four, mais il ne l’aimait pas. “Un potier doit me construire son four, c’est comme un bébé, c’est très personnel. Le four le contraint mais lui donne une ligne, un chemin qui lui convient.

Les proportions viennent du four

« Le four est allumé pendant huit jours. Les trois premiers jours de préchauffage, suivis de cinq jours à haute température. Le four monte d’abord à 1 300°C, puis descend à 1 000-1 100°C, avant de remonter à 1 300°C. Ce cycle de montée et de descente de température se répète plusieurs fois au cours de quarante-huit heures.




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L’alchimie des énergies


©France Télévisions

Cette cuisson crée une superposition de matières et d’atmosphères, mêlant cendres, oxydation et réduction, qui influencent la terre de manière complexe. Même si les artistes veillent sur le four, le processus reste largement imprévisible. « La météo, les cuisinières, l’ambiance de cuisiner avec les gens, il y a plein de choses qui jouent… « Et c’est toujours la magie du feu qui aura le dernier mot.

Tout ce qui sort de ce four est bon quoi qu’il arrive.

Le temps est rythmé par ces temps de cuisson, préparation du bois, chargement, retrait et refroidissement. Le temps s’étire et enseigne la patience.




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« Découvrez petit à petit »


©France Télévisions

Autour du four, une communion chaleureuse et conviviale se crée entre les veilleurs du feu. Ensemble, ils insufflent une énergie et des vibrations qui influencent la cuisson, ajoutant un supplément d’âme aux créations qui se laissent mordre par les flammes.

La Borne, c’est avant tout une tradition de potiers perpétuée depuis des générations, produisant des céramiques à la fois simples et d’une grande beauté. Dans les années 1950, de nombreux artistes s’installèrent sur ce site, créant des œuvres d’une remarquable pureté.

La Borne, c’est aussi une histoire d’échanges et de rencontres : peintres, sculpteurs, et même étrangers, venus de tous horizons, ont laissé leur empreinte sur ce lieu emblématique. Ils ont tous laissé leur empreinte, façonnant au fil des années une riche aventure collective.

A l’image de ses mains rugueuses, façonnées par le travail et créant des œuvres d’art, Hervé Rousseau cache sa sensibilité sous les rires, les phrases inachevées, les regards et les silences.

Comme il le ferait avec ses poteries, il observe les contours, le débordement et le vide de l’autre, à la recherche de ce qui échappe aux mots. L’émotion est palpable lorsqu’il évoque son enfance, ses parents et lit la lettre que sa fille a écrite à sa mère partie trop tôt.

Chacune de ses œuvres est un objet vivant qui porte en lui ce trésor caché.

La Main Sauvage est un documentaire co-réalisé par Alexis Pierlot et Jonathan Safir, une coproduction de Tikkoun et France Télévisions.

► « La Main Sauvage », un film à découvrir le jeudi 21 novembre à 23h05 dans La France en vrai sur France 3 Centre-Val de Loire, disponible en avant-première et en replay sur france.tv.

 
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