Après Mon garçon de Christian Carion, sorti en 2017, Guillaume Canet et Mélanie Laurent se retrouvent dans un nouveau long-métrage chargé d’émotions, mais surtout d’histoire. Ils incarnent respectivement Louis XVI et Marie-Antoinette lors de leur incarcération en 1792 dans la tour du Temple, en attendant leur procès, avant leur exécution. Une partie de leur vie et de l’histoire de France que personne n’avait encore racontée à l’écran. Les carnets de Cléry, valet de chambre de Louis XVI qui l’accompagna pendant son emprisonnement et jusqu’à sa mort, inspirèrent grandement le cinéaste Gianluca Jodice. C’est en lisant un passage sur le procès de Louis le Dernier que le réalisateur a eu l’idée de dévoiler les derniers mois du roi et de sa famille.
Avant sa sortie officielle en salles, Le déluge a été présentée lors de l’ouverture du festival de Locarno, qui s’est tenu en août dernier. Mélanie Laurent et Guillaume Canet, métamorphosés dans ce drame grâce à la magie du maquillage et des prothèses, ont tous deux été honorés du Prix d’Excellence Davide Campari, pour récompenser l’ensemble de leur carrière. A l’occasion de la sortie du long-métrage ce mercredi 25 décembre 2024, le duo a convenu de revenir sur Le éclaireur sur le plateau, les difficultés qu’ils ont pu rencontrer ou encore leur rapport à leurs personnages historiquement emblématiques. Rencontre.
Qu’avez-vous ressenti lorsqu’on vous a proposé de jouer Marie-Antoinette et Louis XVI et lorsque vous avez lu le scénario ?
Guillaume Canet: J’ai été assez surpris que les gens pensent à moi. Je n’y ai pas forcément vu de ressemblance avec Louis XVI ! J’ai rencontré le réalisateur, qui semblait très investi dans ce projet et ce pan de l’histoire de France que je connaissais peu. J’étais très heureux, surtout quand j’ai lu le scénario. J’ai trouvé le personnage très intéressant, dans son état psychologique. Cet homme un peu perdu dans un rôle qui ne lui convient pas et qu’il est incapable de diriger. Comme le disait son père, Louis XV : “Après moi, le déluge.” D’où le titre du film !
Mélanie Laurent: Ce fut un véritable choc à lire. Le scénario est très bien écrit et structuré. Trois actes avec trois titres très forts : Les dieux, Les hommes et Les morts. C’est assez rare d’être acteur dans un rôle aussi bien écrit et des personnages historiques. Ce sont de nouveaux costumes à enfiler qui font peur, mais on a cette chance de parler d’une partie de l’histoire là où les films s’étaient souvent arrêtés.
Vous reconnaissez-vous dans vos personnages ?
CG : J’ai quelques points communs, dans la difficulté d’être avec les gens. C’est quelque chose qui me parle. Dans la description du personnage que j’ai lue, notamment dans les carnets de Cléry, qui était son valet de chambre, il décrit un homme qui n’aime pas trop le bruit et les gens. C’est vrai que je suis quelqu’un qui ne se sent pas très à l’aise quand il y a beaucoup de monde. A part ça, je me sens très différent de lui dans mon caractère. Je ne pense pas avoir jamais pensé que j’étais un dieu [rires] !
ML : Quand j’ai préparé le film, j’ai lu la biographie de Zweig. J’ai été en colère contre Marie-Antoinette à plusieurs reprises. Quand j’ai vu le manque de curiosité, le manque d’envie de se connecter avec tout ce qui l’entoure… Je me sens très opposé à tout ça. On me reproche souvent d’être trop curieux. [rires] ! Après, il faut aimer les personnages quand on les incarne. J’ai beaucoup d’empathie pour tout personnage complexe qui se retrouve confronté à la mort et qui, quand il est trop tard, veut devenir mère, s’intéresser à la politique, être une bonne épouse, comprendre les choses… Qui laisse derrière lui beaucoup de frivolité pour s’intéresser à tout. Il y a quelque chose dans le domaine de “déjà trop tard” qui est passionnant à jouer et à regarder, qui représente totalement l’humanité qui attend toujours d’être au pied du mur pour se réveiller… [Rires]
CG : Le déluge C’est d’ailleurs un des films où j’ai eu le plus de transformations. J’avais quatre heures de maquillage chaque matin. J’avais déjà beaucoup de maquillage sur le tournage de Rock’n roll (2017) et j’avais le même type de prothèse. Mais je n’avais pas les costumes de Louis XVI…
ML : Pour ma part, j’ai été très heureux lors du moment de retrait total, à partir de l’acte II. Quand j’ai enlevé cette perruque, j’ai enlevé le corset et la robe. Très vite, dans le film, Marie-Antoinette n’a plus besoin de cette présence. Elle ne porte plus de bijoux ni de maquillage. J’étais alors souvent en pyjama. Je n’avais que cinq minutes pour me préparer. On n’avait pas les mêmes horaires de maquillage avec Guillaume [rires] ! J’ai beaucoup sympathisé ! C’est aussi très agréable de jouer la laideur, le côté fantomatique. Travaillez uniquement sur les cernes, fatiguez le visage et jouez avec la peau. Pour un acteur, c’est bien de laisser tomber cela et de ne plus avoir à agir de manière fraîche ou présentable.
L’une des scènes les plus fortes, celle où Marie-Antoinette ne peut plus retenir ses émotions et s’éclate, a-t-elle été la plus difficile à jouer ?
ML : C’était au début du tournage. Il y avait un côté : “C’est cool, on va s’en débarrasser” [rires]. J’ai un souvenir du moment que j’ai vu dans le script : “Elle crie comme un animal et la légende raconte qu’on pouvait l’entendre de l’autre côté de Paris.” Quand j’ai lu cette phrase… je ne savais pas trop comment on allait l’aborder [rires]. Je ne savais pas ce que j’allais en faire jusqu’à ce que je le fasse. Je ne crie jamais, donc c’est compliqué pour moi de jouer un cri. Du coup, ma voix monte dans les aigus et n’est pas du tout contrôlée. [rires]. C’est ce qui m’a terrifié. Lorsque nous connaissons les sentiments ou les émotions que nous éprouvons dans la vie, nous savons à quoi nous accrocher. Un cri m’a donné le vertige. Nous n’avons pas fait beaucoup de prises et je ne sais pas si j’aurais pu faire plus, ne serait-ce qu’en termes d’endurance. Je me souviens m’être cassé la voix très rapidement.
CG : Je ne me souviens pas d’une scène particulièrement compliquée. Par contre, il y a une scène que j’ai pris beaucoup de plaisir à tourner, celle où je parle avec le bourreau. C’est une scène longue qui aurait pu être compliquée, mais j’ai pris beaucoup de plaisir, car j’ai vraiment eu le temps de monter quelque chose. J’ai vécu un moment extrêmement agréable en tant qu’acteur. C’est très excitant pour un acteur d’avoir le temps de jouer sans être interrompu. C’est un beau souvenir.
Le délugede Gianluca Jodice, avec Guillaume Canet et Mélanie Laurent, 1h41, en salles le 25 décembre 2024.
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