Longtemps confinées en périphérie, les enseignes discount s’installent désormais au cœur de Lille – parmi les boutiques et restaurants des rues piétonnes. Au grand regret des petits commerçants…
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« C’est deux euros » est le dernier magasin à s’être installé entre la gare et la Grand-Place. Cette enseigne française vient d’inaugurer son 46ème magasin. Nicolas Hollande, responsable du réseau de l’entreprise, parcourt les rayons : «Un petit flexible de douche… Et tous les accessoires nécessaires pour votre salle de bain. Nous avons environ 1300 références en magasin.»
Ici, tous les produits sans exception sont vendus au même prix. Ce sont ces prix attractifs qui attirent les clients. En ville aussi, le pouvoir d’achat est la priorité. “La vie est chère, on n’a plus les moyens d’acheter quoi que ce soit… Alors des prix comme ça, notamment à Lille, ça nous fait du bien», explique une cliente d’une cinquantaine d’années.
Le groupe n’a pas souhaité communiquer le loyer payé pour cette superficie de 180 mètres carrés en plein centre de la capitale flamande. Au total, trois personnes ont déjà été embauchées. Avec un panier moyen de six euros par client, l’enseigne assure qu’il est là : «Nous avons la chance aujourd’hui de pouvoir continuer à développer la marque», précise le gérant. “L’idée est vraiment de trouver le bon local, au bon endroit, au bon loyer ! C’est du bon sens.»
L’idée est vraiment de trouver le bon local, au bon endroit, au bon loyer ! C’est du bon sens.
Nicolas HollandeResponsable du réseau « C’est deux euros »
Implantés en périphérie et dans les zones commerciales, les discounters misent sur le centre-ville. Au moins six enseignes différentes se sont installées à Lille depuis cet été. Une arrivée massive qui interroge les riverains.
“C’est plus sympa quand le centre a plus de charme, plus de commerces spécifiques, plus de produits de qualité», juge une jeune femme d’une vingtaine d’années au coin de la rue de Béthune.
Une autre femme est triste de voir ces magasins fleurir, au détriment des petits commerçants : «Je suis un ancien restaurateur et je peux vous dire que les loyers sont trop élevés. J’ai quitté Lille à cause de ça !
Ce sont des cellules de grande taille, peu adaptées aux commerçants indépendants. Et avec des loyers assez élevés.
Romuald CatoirePrésident de la Fédération du Commerce de Lille
Car seuls les grands groupes peuvent aujourd’hui se permettre ces emplacements de choix dans des locaux commerciaux auparavant vides. “Ce sont des cellules de grande taille, peu adaptées aux commerçants indépendants”, explique Romuald Catoire, Président de la Fédération du Commerce de Lille. « Et surtout, ce sont des cellules avec des loyers assez élevés qui vont de pair avec le chiffre d’affaires et la fréquentation que génèrent ces commerces.»
« Normal », la marque danoise, en est un exemple. Dans ce magasin, les prix des produits d’hygiène ou d’entretien sont en moyenne 30 % moins chers. Chaque jour, plusieurs centaines de clients passent leur commande dans les deux magasins du centre de Lille inaugurés coup sur coup.
Le groupe, qui ouvre actuellement chaque semaine une boutique en France, ne compte pas s’arrêter en si bon chemin. “Normal veut s’implanter partout en France. Et dans des villes comme Lille, on peut estimer qu’on peut avoir 15 ou 20 magasins. » estime Sébastien Chirouze, directeur France de “Normal”. « Aujourd’hui, nous avons cinq ou six magasins à proximité de Lille. Une dizaine dans la région lilloise. Et il y a beaucoup plus de place pour nous que ce que nous occupons actuellement.»
Le groupe nie se substituer aux commerçants indépendants. Les premières personnes concernées voient rouge.
Si l’on veut seulement des villes formatées, qui se ressemblent… Pourquoi les gens viendront-ils à Lille plutôt qu’ailleurs ? Voulons-nous que tout disparaisse ?
Hélène NatierPrésident de la Fédération du Commerce Indépendant de la Métropole de Lille
“Ce n’est pas le pot de fer contre le pot de terre, c’est le rouleau compresseur ! Que va devenir la ville ? Ce ne sont pas seulement les traders qui doivent réagir, c’est tout le monde… »» souffle Hélène Natier, présidente de la Fédération du Commerce Indépendant de la Métropole de Lille. « Si on veut seulement des villes formatées, qui se ressemblent… Pourquoi les gens viendront-ils à Lille plutôt qu’ailleurs ? Voulons-nous que tout disparaisse ? C’est la question que nous devons nous poser.»
Contactée, la municipalité n’a pas répondu à nos demandes. Une chose est sûre : le discount séduit les consommateurs. Selon une étude du site spécialisé LSA et Havas Commerce, 82 % des Français déclarent fréquenter de telles marques.
Avec Martin Vanlaton
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