The Talent Exchange, un regard engagé sur notre monde
« Notre volonté est d’encourager l’innovation esthétique et technique, mais surtout de soutenir la création liée au monde d’aujourd’hui »dit Gilles Pécout. Parmi les quatre prix photographiques présentés lors de cette exposition, la Bourse des Talents, initiée par Didier de Faÿs avec le soutien de la Fondation Picto, récompense trois artistes aux démarches engagées. Après avoir vécu huit ans sur l’archipel de Komodo, en Indonésie, pour une mission humanitaire sur les questions liées à la pêche, Guillaume Holzer y revient pour diriger Territoire nomade. « A force de m’intéresser aux questions liées au poisson, j’avais presque oublié de m’intéresser aux questions humaines. De nombreux pêcheurs sont apatrides. Ils n’ont pas de carte d’identité. Pour l’État, ils n’existent pas »dit le photographe. Les portraits d’anonymes font écho à leur situation sur des tirages uniques, réalisés à la gomme bichromatée. Hassan Kurbanbaev nous emmène dans son pays, l’Ouzbékistan, où il rencontre depuis plusieurs années les communautés locales qui peuplent ses terres. ” Il réalise à la fois des portraits et des paysages en couleurs qui montrent comment l’Ouzbékistan tente aujourd’hui d’affirmer une identité loin de la Russie et d’autres influences plus occidentales. », explique Héloïse Conésa, commissaire de l’exposition. Ses images infusent des références iconographiques au cinéma de Khudaibergen Devanov (1879-1940), photographe et réalisateur ouzbek.
La photographie à tout prix se termine par la narration visuelle de l’artiste franco-dominicaine Karla Hiraldo Voleau. “A l’annonce de l’annulation du décret constitutionnel Roe v. Wade (qui, depuis 1973, fixait le cadre juridique de l’accès à l’avortement aux Etats-Unis, ndlr), j’étais furieuse”soutient le photographe. N’étant pas américaine, elle décide de parler de l’interruption volontaire de grossesse sur son île, illégale en toutes circonstances, « même lorsque la grossesse résulte d’un viol ou lorsqu’elle met en danger la vie de la mère »ajoute-t-elle. L’artiste est allé à la rencontre de 30 femmes ayant avorté clandestinement. Ensemble, ils composent Doubles standardsun dialogue entre témoignages écrits et images collaboratives. « Nous avons réalisé des portraits que j’appelle « solidaires », car je les ai invités à prendre eux-mêmes la photo à l’aide d’un déclencheur flexible, lorsqu’ils se sentaient prêts. En général, je m’intègre »explique Karla Hiraldo Voleau. Sur les murs de la BnF, les regards et les postures de ces femmes, tantôt anonymes, tantôt affirmées, mais toujours fières, rappellent qu’aucun droit n’est acquis et que les femmes continuent leur combat à travers la planète pour pouvoir disposer de leur corps. Cette série a également remporté la première édition du prix SAIF Talent Exchange, dédié au développement d’un projet documentaire.
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